Grâce à ma panne de réveil ce matin, j’ai entendu une bribe de l’émission du matin de France Inter, et j’ai découvert l’existence de ce livre : S’enforester, écrit par Baptiste Morizot (philosophe) avec la photographe Andrea Olga Mantovani au sujet de la dernière forêt primaire d’Europe (non détruite au Moyen-Age) qui se trouve en Pologne.
Je vois les photos et je rêve de voir, voire de posséder ou d’offrir ce livre… qui a l’air sublime. Le propos, de ce qu’il m’a semblé, est également intéressant : parler de la forêt comme d’un lieu à la fois mythologique, décor de contes mais aussi plein de réel et de vie. Un monde en soi, qui n’a pas besoin de l’humain, qui peut l’accueillir mais qui réclame aussi qu’on l’accueille en soi.
Ils ont parlé tous deux de la présence des loups, d’une vieille dame solitaire retirée du monde au passé très urbain, des émotions ressenties dans leur immersion, du changement opéré dans leurs corps et leurs cœurs au contact de la nature sauvage et mystérieuse.
J’ai un peu peur de la forêt, mais le mot me transporte, me fait rêver, et j’ai le désir physique d’en sentir l’odeur.
Il y a un appel, si vous voyez ce que je veux dire. Alors même si j’ai peu de chance d’aller en Pologne prochainement, je veux bien m’enforester dans les environs… en attendant, j’écoute Julianna Barwick.
Baptiste Morizot et Andrea Olga Mantovani nous emmènent dans la forêt primaire de Bialowieza
Baptiste Morizot, écrivain et maître de conférences en philosophie à l’Université d’Aix-Marseille, et Andrea Olga Mantovani, photographe et correspondante pour le New York Times, co-auteurs de "S’enforester" (D'une rive à l'autre), sont les invités du Grand entretien de France Inter.
Bruno Gadenne. S’enforester. Jusqu’au 03 mai 2019, galerie du jour « nomade ». #geoffroirecommended https://www.instagram.com/p/Bv164SKhgY9/?utm_source=ig_tumblr_share&igshid=dpdxfsvekzq3
Très très beau roman de Caroline Hinault, Traverser les forêts.
La photo ci-dessus est prise dans la forêt primaire, la seule d’Europe, en Pologne, par Andrea Olga Mantovani, pour le livre écrit avec Baptiste Morizet, S’enforester ; forêt précise qui est le personnage principal du roman de Caroline Hinault.
Forêt effrayante, sublime, refuge, prison ou tombeau…
A travers les trois femmes qui l’occupent en même temps, pour des raisons très différentes, l’autrice explore une tranche d’humanité très actuelle, entre la migrante syrienne qui cherche à quitter la Biélorussie, pour survivre, condamnée à errer au péril de sa vie parmi les ronces et les bisons, n’ayant que ses pieds et ses mains pour possession, et Véra, journaliste biélorusse qui cherche refuge dans le silence et la contemplation, pour contrer la violence du monde.
Les destins se frôlent, s’entrecroisent… se renvoient des solitudes, des interrogations.
Ce qui m’a frappée, c’est le style. Dès le départ, c’est saisissant, c’est intense, à la fois brut et recherché. Tranchant. Le dénuement d’Alma, sa peur, petit chaperon à la doudoune rouge, qui paraît si immense et qui se heurte, qui se frotte à l’immensité de la forêt, à l’intensité de ses odeurs et de ses bruits, son indifférence végétale, son indépendance vitale. C’est terrible et beau. Il y a une vraie poésie mise au service du récit, et de ces moments suspendus, colorés de peur ou d’espoirs. Lire ce livre est comme une expérience de l’altérité, face à un lieu sauvage, face à des idéologies contraires, qui ne convergent que vers ce désir primaire, violent et vibrant, de rester en vie, malgré le cauchemar si palpable, alimenté par des citations de Dante, issues de L’Enfer. Une actualisation percutante de ces différents périls infernaux.