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#Yves Rebouillat
manieresdedire · 1 year
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J'aime bien ce texte... et ce n'est pas parce que je connais celui qui l'a écrit...🙃😉
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y-rebouillat · 4 years
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Moi, Yves Rebouillat...
... j’ouvre un Blog en nom propre, distinct donc et différent (intentions, publications, fonctionnement,...) du Blog collectif  “Manières de Dire”...
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manieresdedire · 1 year
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En attendant la réouverture des colonnes de ce blog dont la date est indéterminée, peut-être une lecture de ce petit texte très contemporain, une revue des maux qui gangrènent le monde...
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manieresdedire · 2 years
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Il était une fois...
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... une grande allée bordée de quatre lignes de grands chênes centenaires....
Le gravier crissait sous les roues de l'auto que je conduisais précautionneusement de crainte de fâcher un lieu étranger aux souillures sonores du moteur à explosion. La vaste pelouse était rase et brune ; des parterres de plantes vivaces et de fleurs encore humides de l'arrosage du matin, déchagrinaient le parc brûlé par le soleil.
La façade de pierres blanches, les grandes et nombreuses fenêtres du château du XVe siècle, restauré de frais, son opulence retrouvée, pouvaient intimider ou assouvir une envie raisonnable de confort et de luxe jusque dans les dépendances dont la fonction sera d'abriter les courts instants de sommeil dérobés à l'aube du lendemain par les hôtes proches venus de trop loin pour y retourner tôt en toute sécurité.
Un couple avait pris momentanément possession du Domaine et préparait la réception qui commencerait le jour suivant, après qu'auront été prononcés leurs engagements croisés de veiller à bien vivre longtemps ensemble en s'aimant.
J'ignorais qu'il fût possible d'enchanter l'institution du mariage et d'en faire une célébration  de l'amour où la réalité surpasse les fictions littéraires et cinématographiques.
Tandis que la nuit tombait après que les derniers rayons du soleil eurent balayé les hautes frondaisons des arbres géants – dont un cèdre époustouflant, énorme et splendide – poussés lentement, au fil des siècles, dès avant l'édification du château, je fis quelques pas dans le parc en pensant que les heures à venir seraient uniques. Forcément.
Le repas fut subtil, suffisant. Servi par des vins bien choisis. Les discussions, les découvertes allaient bon train. Il y eut des ivresses légères, rien qui ne fut grotesque ou vulgaire.
À la fin du repas, ce fut Elle qui prit la parole et émut l'assemblée en retraçant son envie de longue date de Ce Mari, son désir d'être Sa Femme... puis elle appela à envahir la salle de danse. Lui, très ému, souriait. Les moins jeunes bougeaient gracieusement, fidèles aux expériences de leurs tendres années, différemment de ce qu'inventaient les plus jeunes dont la folie sous contrôle était spectaculaire, et même... technique.
La beauté du couple captait l'attention. Une sorte de gravité se nichait par instants et depuis longtemps, dans les regards des deux impétrants. Une inquiétude face à l'officialisation de leur union ? La crainte qu'un grain de sable n'enrayât le déroulement de la fête ? Il y avait  comme un mimétisme : des participants graves aux mêmes instants, comme retenus de d'exprimer bruyamment leur joie, leur complicité avec le couple, de la dignité, un recueillement unanime, une politesse, d'exemplaires amitiés.
L'amour que se portent les deux jeunes gens les rendait comme sensibles aux battements respectifs de leur cœur qu'à défaut d'entendre de loin parce qu'ils avaient quitté leur table, ils percevaient à la lecture des expressions du visage de l'autre. Et toutes les personnes autour, étaient conscientes de ce dialogue muet qui se déroulait et qu'elles devinaient aux mouvements de leurs têtes qui se cherchaient qui n'étaient pas de l'ordre de l'agitation. Mais l'adresse d'une question : « tout va-t-il comme tu le souhaites ? » ; une triple affirmation : « on est ensemble, tout va bien, je t'aime ». Un besoin partagé de confirmation et d'approbation qui ne dément rien de leur confiance absolue, l'un.e en l'autre.
Nous prenions des photos, filmions, afin d'immortaliser des instants précieux, pour faire durer, de retour chez nous, une fête dont le souvenir qu'elle fut magique aura besoin de preuves, encore longtemps après son achèvement. Histoire de se répéter que personne n'a triché avec ses souvenirs, ne s'est menti en s'inventant le bénéfice ancien d'un privilège exorbitant, de dire et de se dire « J'y étais ! Regarde ce qu'elle fut !» Ce n'est pas un conte.
Yves Rebouillat (in Le Tarn Libre du 7octobre 2022)
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manieresdedire · 2 years
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Obsessionnellement... la 8ème.
Comment ne pas y penser tout le temps ?
https://www.albiana.fr/blog/lnd-2022-septembre/yves-rebouillat-reminiscences-et-circonstances-chroniques
En dodécasyllabes... ça commence comme suit :
"Adolescent ce cadeau de l'amie chérie
Michel Strogoff parcourant toute la Russie
Poursuivi de Moscou à Irkoutsk Sibérie
Puis un jour d'Alexandre Pouchkine découverts
En français traduits les innumérables vers
Privés de la musicalité d'origine
Mal à l’aise tels des poissons en bassine
Qu'une acariâtre âgée professeure agrégée
Parents russes blancs à Paris chauffeurs de taxi
Restituait dans leur langue et leur harmonie
Dans les classes les chambres les rencontres enfiévrées
Des poèmes des strophes récitées ou déclamées
La lecture des livres de Tolstoï Dostoïevski
Une langue apprise réduite à quelques fragments
..."
https://www.albiana.fr/blog/lnd-2022-septembre/yves-rebouillat-reminiscences-et-circonstances-chroniques
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manieresdedire · 4 years
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ROMAN-FEUILLETON : S’aimer n’est pas une petite entreprise
PREMIER ÉPISODE
Première partie
- I - Adrien
Le soleil d'été inondait la vaste cuisine aux murs et aux meubles blancs, jaunes paille et bleus pastel. Assis face à la fenêtre, songeur et détendu, Adrien buvait un café et s’apprêtait à savourer le beurre cru de baratte et la confiture d'abricots qu'il avait généreusement étalés sur des tranches découpées dans une grosse miche de pain frais.
La cloche de l'église du village venait de sonner une huitième et dernière fois. Le programme de sa journée n'était pas encore fixé. Sa nuit avait été douce et tranquille. Il se sentait de grandes possibilités.
Sa maison réclamait un peu de rangement. Du linge propre empilé patientait sur un guéridon. Des chemises, des polos, des sous-vêtements et des chaussettes, le tout déjà porté, jonchait le sol, le canapé et même un meuble ou deux. Des livres ouverts retournés ou fermés, qui auraient été davantage à leur place sur un chevet, une étagère ou le bras d'un fauteuil, étaient abandonnés n'importe où, au pied du lit, sur le parquet d'une chambre, les tomettes du séjour, le tapis du salon, le rebord de la baignoire. Des verres étaient posés ici et là, exactement aux endroits où ils s'étaient retrouvés définitivement vides. Des bouteilles de vin de Madiran, de Pacherenc et de Fronton, blancs et rouges, se dressaient honteuses et vides dans la cuisine, le salon, et même dans la salle de bain.
Il régnait dans la grande chambre un joyeux et coloré capharnaüm : draps froissés oranges, oreillers aplatis jaunes et bruns, traversin ocre tordu, tapis aux dessins kandiskyniens, coins rabattus, tout semblait sens dessus dessous, dans un fouillis presque esthétique.
Avant le grand ménage, Adrien pensait marcher à vive allure, deux ou trois heures, sur les sentiers des environs, à travers la prairie et les bois, le long de la rivière proche. Il déjeunera d'un casse-croûte qu'il composera dans les instants suivant sa toilette. Après quoi, en fin d'après midi, il se rendra à Marciac dans le Gers, chez Vincent, son ami de toujours, où tous les deux boiraient un peu de vin et iraient ensuite flâner dans la cohue du village des restaurants provisoires, traîner autour des manifestations “off”, puis assister aux deux grands concerts d’ouverture du festival de Jazz.
La semaine avait été inféconde du point de vue de son activité journalistique, mais riche de relations sociales. Sept jours durant, il avait reçu voisins, voisines et amis de fraîches dates, petits producteurs fermiers pour converser, approfondir sa connaissance des victuailles de la région : confits de canard, fois gras d'oie et fromages de brebis, légumes, charcuteries…
Il n'avait pu faire affaire sans goûter ni boire. Jamais seul. Un essai, un vin, une fricassée, une poêlée avaient succédé à d'autres et la petite maison de village qu'Adrien louait depuis un an était vite devenue, après quelques jours à ce régime, un foutoir sans pareil.
Une femme généreuse et accorte l’avait accompagné jusqu’au petit matin et lui avait laissé, avant de se retirer, vraisemblablement sur la pointe des pieds, ce petit mot charmant : "Tout fut à mon goût, particulièrement toi".
Le désordre n'était pas au nombre de ses tendances, mais depuis sa dernière liaison qui n'avait pas duré trois ans, il avait changé. Ses pratiques domestiques, ses habitudes de vie se modifiaient. Ses notions d'ordre et de désordre se confondaient sur un étroit nuancier.
Journaliste indépendant, il vivait de piges, faisait dans la culture et la chronique tous sujets. Il était l'auteur de cinq romans policiers qui avaient su trouver des lecteurs. Il lui arrivait de faire des reportages.
Depuis qu'il avait quitté Élisa avec laquelle il n'avait pas su vivre, il était sonné et s'en voulait. Il avait fui les querelles à propos de rien mais qui gâchaient trop d'heures passées ensemble, invariablement suivies de mises au point et de réconciliations sans souffle. Le conflit s’était installé, la conviction d’un avenir commun éclipsée.
Il ne parvenait pas encore à se persuader qu'il avait eu raison de rompre.
Au cours de petites séquences, il s'efforçait de s'intéresser à son avenir, tentait de refaire de petits projets.
Il était fort du temps présent et prenait ce qui passait à portée de sa vie qui filait, comme une chance d'échapper à la solitude et à la tristesse.
Copains d'un soir, amies fugaces, brèves amours, il ne perdait aucune occasion de faire connaissance, de tisser des liens, légers et éphémères, de faire de petites fêtes. En veillant à ne pas entamer sévèrement sa santé ni gâcher sa bonne forme physique. Il avait peur non tant de vieillir mais que lui-même remarquât qu'il se dégradait.
Il restait hanté par Élisa et ne pouvait avoir une nouvelle relation sans comparer. Plus leurs corps présentaient des ressemblances avec celui d’Élisa, plus forte était sa nostalgie. Si les différences étaient bien marquées et que la belle fût moins bien faite, ses regrets retardaient son excitation puis son plaisir, quand ils ne les empêchaient pas. Il la cherchait chez toutes. Les visages se succédaient sans qu'il lui fût permis d'y retrouver Élisa. Elle restait unique. Il n'avait pas rencontré femme plus aimable et affriolante, plus intelligente et cultivée.
Il avait quitté Paris qu'il ne supportait plus - la pollution, les embouteillages et surtout Elle, qui y vivait encore - pour un village de Haute Garonne qu'il avait découvert avec des copains étudiants, dix ans plus tôt.
Il s'était installé à Fronton, au Nord de Toulouse et avait choisi cet endroit parce qu'il était résolument au sud de la France
Après avoir vécu longtemps en Rhénanie puis en région parisienne, passé ses plus belles vacances des étés de sa jeunesse dans le Var et l’Hérault, avec deux incursions espacées en Corse, "Sud" et "Méditerranée" étaient restés des mots magiques qui mettaient en marche sa fabrique de rêves.
Deux noms qui n’avaient rien perdu de leur pouvoir de raviver les vieux souvenirs :  longs trajets jusqu’à Fréjus ou Propriano, jeux de plages, d’eau et de ballons, familles en roue libre, boîtes de nuit. Aujourd’hui, ils évoquaient davantage un climat, des végétations, une lumière éclatante, les brûlures du soleil, les fragrances des maquis, les fleurs innombrables du printemps, la rocaille rouge de l’Estérel, des apéritifs pris en groupe, en terrasses à l’ombre des platanes au centre de villages, de l'amour sans lendemains, des corps dévêtus, une liberté éphémère et illusoire. Sur le tard, sa perception imaginaire et excentrique de la planisphère s’était "enrichie" d’un invraisemblable chaos personnel de géographie planétaire, d’histoires et de cultures. "Mare Nostrum" devenait le centre du monde qu’il habitait et la Corse, sa région capitale, ses rivages et ses ports, de Nice à Menton - en faisant le tour par Sète, Barcelone, Gibraltar-Cueta, Tanger, Alger, Tunis, Tripoli, Alexandrie, Haïfa, Beyrouth, Mersin, Athènes, Durrës, Dubrovnic, Split, Rijeka, Trieste, Naples -, passaient pour des "spots" prodigieux d’où des hommes et des femmes hardis, éclaireurs de leurs civilisations et candidats emballés à tous les brassages, s’étaient élancés et avaient essaimé, faisant particulièrement de Marseille, un absolu et lumineux melting-pot. Tandis que ceux qui restaient sur tous les quais à la ronde, se disposaient à les bien accueillir. Bien sûr, nulle part la vie n’avait pris durablement la couleur rose ni la douceur d'une friandise, elle alternait le pire et le meilleur. Et ce, sans interruption depuis au moins les conquêtes romaines. Et, il y aurait fort à parier, bien avant.
Fronton donc, moins à la mode que de nombreux villages du Languedoc et du Roussillon - parce que, aussi, la proximité d'une grande ville à taille humaine, Toulouse, était en mesure de lui procurer ce qu'il avait aimé à Paris : concerts, cinémas, restaurants, promenades urbaines dans les vieux quartiers. L'on y mangeait et buvait bien, pas moins que dans le Gers qu'il retrouvera dans quelques heures.
Toulouse dont le cœur est plus petit que Paris n’était pas comme elle, "la capitale", blanche et grise. Plus orange sanguine que rose, ville lumière par excellence, le soleil se mirait dans ses briques, y résidait et son peuple savait prendre son temps aux terrasses des troquets, tard la nuit et faire la fête. Il lui manquait le calme, le bruit et la fureur des flots mais les littoraux des mers du sud étaient à portée des automobiles et des trains. Et les montagnes, proches. Ses cours intérieures et ses palais, ses vieux immeubles, ses hôtels particuliers, ses couvents et cloîtres ne ressemblaient pas à leurs homologues parisiens, mais impressionnaient. Et toujours ces couleurs. Il y avait moins de ponts extraordinaires au-dessus de la Garonne qu’il y en avait enjambant la Seine, ce qui n’empêchait personne d’aller d’une rive à l’autre et de s’y balader. Rien, cependant, ne rivalisait avec le Louvre ni avec les jardins publics parisiens et le Pont des Arts, la grandeur de Paris était inégalable. Mais la ville s’était, hélas, installée au nord.
Dans sa vie personnelle et professionnelle, Adrien n'avait pas toujours craint ni fuit les explications parfois difficiles où il ne cédait rien sur ses principes. Il pouvait parfois ramener de la voilure quand il estimait qu'il avait pu se tromper ou qu’il s’y était mal pris pour convaincre. Il était homme ordinaire, peu passionné par la rhétorique, ni têtu, ni non plus très facile à affronter dans les joutes verbales qu'il n'aimait pas, où souvent, même modestement, celui qui voyait l'autre rejoindre ses positions, triomphait. Il avait su œuvrer, parfois, à des synthèses qui faisaient l’unanimité, non qu'il cherchât à tout prix le consensus mais, souvent, il estimait que tous avait un peu raison et tort et que les désaccords naissaient quand les observations se faisaient sous des angles différents, non de l'ignorance ou de l'inintelligence d'un fait, d'un processus, d'un concept.
Dans ses relations amoureuses il tentait le plus souvent de fuir les explications rudes et franches qu'il estimait vaines dès qu'il s'agissait de l'auscultation du couple. "Couple", ce mot qu'il n'aimait pas, dont l’utilisation signifiait souvent qu'il fallait "sauver" l'entité en péril désignée par ce terme, en revenir à une relation qui s'était délitée et qu'il aurait fallu restaurer, redynamiser. Ou qu’il était naturel de le vanter niaisement.
Il savait qu'un premier malentendu en entraînait un second puis un autre, jusqu'à la rupture ou la folie. Et préférait mettre fin, voire, qu'on le quittât et esquiver ces échanges où s'étaient ensablées les relations entre ses parents, faites de disputes infinies où la mauvaise foi prévalait comme la conviction de chacun que l'autre était un monstre d'égoïsme.
Le seul contre-feu qu'il connaissait quand la mésentente vache menaçait, c'était la rupture. Il y avait perdu d'agréables compagnes - il ne dépréciait pas tout - et  des heures précieuses de sommeil, du poids, mais, à la longue, gagné en sérénité. Il n'était pas blasé et gardait la faculté d'enchantement de l'enfance. Il restait sujet aux coups de foudre de l’adolescence et pensait encore que l'aventure l'attendait au détour de son chemin.
- II - Vincent
Sept ans plus tôt, Vincent s'était retiré à Marciac, son gros village natal. Il avait exercé, pendant vingt ans le dur métier de "lignard" chez "PTT-France-Télécom" à Paris, plus souvent dans les égouts qu'au sommet des poteaux de surface.
Après avoir, un jour, tout envoyé promener - rats, eaux usées, boues, gaz toxiques, pestilences, obscurité, petits chefs acariâtres, astreintes, blessures, épuisements et "HLM" de banlieue -, il avait ouvert un commerce de vente de produits alimentaires du pays.
Tandis qu'il était encore fonctionnaire, son réseau d'amis, de collègues, de connaissances, lui avait d'abord assuré, de petits débouchés lucratifs et illégaux pour des foies gras, des magrets, des grattons de porc et de volaille, de l’Armagnac, qu'il achetait en quantités réduites à des gens du pays qui n'en espéraient pas tant. Puis le bouche-à-oreille avait fonctionné, désormais son fichier "clients" comportait près d'un millier de noms de personnes et de raisons sociales répartis dans plusieurs régions et particulièrement en Île de France. Ses plus gros marchés étaient constitués de comités d'entreprise qui passaient toujours des commandes importantes et auxquels il consentait des remises en proportion des volumes achetés. Il avait su concilier affaires et liens de cœur avec la CGT. Les seconds garantissant le succès des premières. Il payait encore ses cotisations syndicales.
Entiché de son bout d'Occitanie, et désireux de faire des émules, Vincent eut l'idée de composer un recueil de photographies commentées sur l'art alimentaire de sa "Province". Présentant semailles et plantations jusqu'à la vente de produit finis. Les champs, les élevages et les fermes puis les étals des marchés de plein air et les coquettes boutiques. Des agriculteurs, des éleveurs, déjeunant dehors ou évaluant la la croissance des végétaux, la récolte, l’état des bêtes. Un élevage de taureaux de combat, des fauves dans les collines de Saint-Mont. Des bottes de paille de blé disposées en ordre sur des champs récemment fauchés ou entassées sur des charrettes en partance vers les granges des éleveurs de bovins. Légumes dans les jardins et les vastes terres, fruits sur les arbres, oies et canards dans les basses-cours. Avec vues de villages de Midi-Pyrénées dans les cuisines desquels les plats traditionnels sont mitonnés, mis en scène pour séduire le promeneur, l'esthète du "bien manger", l'affamé, le gourmet, l'inquiet pour sa santé, le randonneur, les amoureux, les enfants et les anciens.
Il alternera gros plans et mise en exergue des environnements de proximité ou plus lointains, l'arbre qui porte le fruit, le champ qui accueille l'arbre, la plaine ou le coteau qui supporte la culture, le produit seul et ses partenaires possibles dans une belle cocotte émaillée, jusqu'à la façade d'un bâtiment du seizième siècle à l'ombre duquel le stand du fromager se tient les jeudis et samedis matins. Les gras pâturages, où paissent des animaux sains qui seront bientôt appelés à donner des laits crémeux ou des viandes persillées...
Ce sera aussi une manière de présenter une quinzaine de villages, qu'il aimait bien avec leur halle aux grains, aux vins, aux marchés multicentenaires, hebdomadaires, saisonniers, leur place grossièrement pavée au milieu de laquelle trône l'inévitable fontaine dont le bronze blanchit sous les dépôts de calcaire, les arcades abritant les trottoirs et encadrant l'espace rectangulaire ou carré, centre de vie administratif, avec sa mairie, son agence du Crédit agricole et son bureau de poste portant encore discrètement, en haut de sa façade, "Postes, Télégraphes et Téléphones" en lettres défraîchies, l'église se tenant en retrait de l'endroit où sont traitées les affaires strictement terrestres. Les rues, le long desquelles les éventaires des marchands débordent quand la place centrale est trop exiguë ou l'offre de produits sur-abondante.
Il fixera des gros plans de haricots de Tarbes dont les tiges s'enroulent en pointant vers le ciel et s'enchevêtrent autour des cannes de maïs leur servant de tuteurs, des pieds de tomates de Marmande d'un rouge écarlate, au moment où leur nombre fait ployer leur axe, des aubergines semblant vernies, des fèves, des poivrons, des piments doux ou assassins. L'aubépine mêlée aux mûriers qui bordent les champs d'orge à proximité desquels des paysans-rois se désaltèrent simplement. Des foies gras entiers protégés par un emballage qui ne cache rien de leur couleur. Des magrets fumés, des aiguillettes confites dans leur graisse jaune, du lard, des saucissons, des jambonneaux, du boudin noir et des andouillettes, des salades et des carottes. Des petits tas de champignons, de ceps, de bolets, de chanterelles, de rosés des prés et même de morilles en bien moins hautes pyramides. Des choux et des poireaux. Des légumes d'été et des légumes d'hiver, de printemps aussi. Des viandes à griller, à rôtir, à fondre dans une poêle, du gibier à préparer.
Vincent qui n'oubliait pas qu'il avait été ouvrier, se promettait de faire figurer dans son livre, des recettes anciennes, simples à réaliser, succulentes et à des prix abordables pour lecteurs à faible pouvoir d'achat. Un très gros bouquin. Sans doute, pour faire face à l'inflation des sujets, un premier tome suivi d'au moins deux autres. Il ne voulait pas d'un objet trop épais ni excessivement cher.
Adrien aura en charge l'élaboration d'un texte léger à connotations poétiques qui tiendra une place discrète en venant lier le tout, les couleurs - le blanc et les gris des pierres, le rouge orangé des briques, les bruns rougeoyants des colombages et des charpentes aperçues sous les avant-toits -, les lieux - plans zoom et vues distantes, étroites et grand-angle -, un village et un autre, une construction et une nature vierge... Lier, comme une sauce le ferait, des morceaux de viande d'un miroton cuit longuement à feux doux, sur un fourneau de grand-mère, dans une grosse marmite en fonte suspendue à une crémaillère dans l’âtre d'une cheminée. Ou un très riche cassoulet du pauvre. Adrien formulera des phrases courtes, avec des mots simples et éloquents qui feront passerelles entre les différentes photographies, comme on accompagne d'une main légère ceux que l'on souhaite amener dans une direction, sans les forcer, mais en les conduisant insensiblement au meilleur endroit pour voir, sentir, entendre. Les influençant sans rien leur imposer.
Quand Adrien vivait Paris, Vincent l'invitait chez lui tous les mois d'août, pour, bien sûr le revoir, mais aussi pour assister en sa compagnie au festival de jazz dont les affiches toujours aussi alléchantes drainaient un public nombreux qui venait là en voisin ou de très loin. Hors ces jours d’été, les deux hommes ne se téléphonaient ni ne s’écrivaient jamais. Alors, tous les ans, ils refaisaient invariablement le point sur leurs vies respectives. La répétition était leur rituel de reconnexion. Et puis, entre temps, des faits s’étaient produits qu’ils pouvaient se raconter.
Chaque année, il participait comme bénévole à l'organisation du festival d'été, à l'instar de la moitié des villageois. Il s'engageait pour une durée de quatre ou cinq  jours ; il était inenvisageable de faire une pause trop longue du fait son activité commerciale aussi, pendant cette "parenthèse", laissait-il la gestion de sa boutique à sa fille adorée.
- III - Jazz In Marciac
Ce deux août de l'année 2004,...
à suivre...
Yves Rebouillat
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manieresdedire · 5 years
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Frustration de mai
Nous aurions aimé vous présenter sur cinq colonnes (ou six) à la une, en une seule fois (ou deux), une série sur la Corse du Sud, prétexte à toutes nos divagations.
Merci d'accepter que nos billets soient publiés au jour le jour…
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“Journal de mai” en 14 épisodes (et un peu plus) faits de photos, de textes et de vidéos
Bonne découverte !
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Légende des photographies :
Entre Serra-Di-Ferro et Campomoro
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manieresdedire · 5 years
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Zigzags parisiens : Saint-Lazare, Opéra, Concorde, Comédie Française, Tuileries, Grand-Louvre, Bastille -  II/II
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manieresdedire · 5 years
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Terre !
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Terre enfin...
Ce que j'aime dans la campagne où je vis, plus que ma maison, c'est le bout de nature attenant que j’appelle le "jardin".
Il y a peu, arbres, pelouse, massifs et "espace à jardiner", ont été mis en place sans atermoyer. Pas question alors de perdre plus d'une saison.
Aujourd'hui, l’ensemble est à peu près harmonieux mais il ne me convient pas.
J'ai donc entrepris d'en modifier l’organisation, de redéfinir des contours, de transférer en pleine terre des plantes et des petits arbustes qui vivotaient en pots et qu’avec lassitude, je ne cesse d'arroser l'été et de rempoter chaque printemps.
Je remanie ce qui est en place et qui peut encore bouger.
Je viens de reconfigurer le potager, trop difficile à entretenir. Mais sans grand effort cérébral, en réduisant le vaste rectangle à un petit carré. Une végétation folle dominée par les chardons concurrençait, sans grande lutte, mes légumes et prenait sur eux un avantage funeste, les empêchant de trouver leur place ou en contrariant leur croissance. Travailler la terre, collante par temps humide, dure sous la chaleur, est une affaire ardue.
La complexité et l’extrême rigueur de l'œuvre verte, géométrique, experte et belle de mon voisin le jardinier, m'ont dissuadé de tenter d'en adopter les principes d'ordonnancement : lignes droites sans défaut, tunnels amovibles de protection et de réchauffement, dispositif contre les vents, cultures protectrices d'autres végétaux, pérennité des productions...
Pas question non plus donc d'y créer un séduisant désordre, un fouillis savant et poétique... faute d’irrésistible inspiration. Seulement d'une année l'autre, veiller à alterner les cultures. Réfléchir un peu, calculer à peine, ne pas laisser trop de place à l'imagination. Aller vite et bien.
Une bande dédiée aux herbes fines et quatre ou cinq cultures de saisons suffiront. L'été, des tomates, des courgettes, des aubergines, des haricots. Des concombres ? L'hiver, une variété, voire une deuxième, pas davantage. Des fèves par exemple. Plus jamais l'ail, ni l'oignon, trop d’attente, trop de soins. Le tout disposé avec application mais sans égard pour les normes "à la française" des jardins d'antan et d'à côté. Il faudra cependant que le tout me plaise et soit d'un accès facilitant l’entretien et la cueillette.
Dans l'aire maraîchère libérée par l'opération de resserrement, travailler le terrain, l’ameublir, extraire les racines des chardons semblables à de longues mèches profondément enfouies dans la matière, réserver les emplacements destinés à recevoir les petits arbres et les plantes vivaces une fois libérés de leur pot, les placer, les arroser abondamment, ratisser, amender la parcelle au moyen du terreau issu du compost, disposer les graines du futur gazon, se débarrasser en déchetterie des dizaines de kilos de cailloux amenés en surface et extraits d'abord à la pelle, puis par poignées et enfin l'un après l'autre, avec deux fois deux doigts.
Il me fallait aussi revoir les massifs.
Les élargir pour rendre harmonieuses les proportions de chaque élément du petit paysage. Arracher l'ivraie et le chiendent qui s’étaient solidement implantés, intriqués aux racines des vivaces et aux robustes rhizomes des iris. Employer la manière forte : couper, arracher, extraire, jeter, composter, replacer, arranger avec netteté et précision les bordures. Manier résolument la fourche-bêche, la bêche, la pioche, et pour parachever le tout, le râteau et même le balai.
Pour davantage d'efficacité et de méticulosité, agir, à l'occasion, genoux appuyés au sol et lunettes chaussées.
Expulser les grosses larves blanches qui ont envahi les pots en les offrant à l'appétit insatiable des oiseaux. Modeler la glèbe à la main, l’étaler, trier en humant les parfums de l'humus qui récompensent des efforts déployés pour faire beau.
Tailler les arbres fruitiers qui, en trois ans, n’ont formé que de longues branches parties à l'assaut du ciel et ont oublié de produire ce pourquoi ils ont été plantés : satisfaire les envies de croquer des fruits frais et fournir matière à pâtisseries, à confitures. Le cerisier a consenti au fleurissement, les pruniers, n'ont pas eu cette délicatesse ! Seul un figuier encore nain, récemment installé, isolé, a réussi là où les autres ont démérité.
Passer une dernière fois en revue la haie, couper, tailler les arbustes en les dotant de belles formes.
Réunir en tas tous les déchets verts, les broyer, les mettre à composter.
Haubaner les arbres hauts menacés par les vents d'Ouest et l'Autan, après avoir ôté les tuteurs anciens qui les blessaient. Et continuer à craindre les tempêtes.
Sculpter le houppier d'un mûrier-platane dont les branches secondaires pointent vers le soleil au lieu de se développer en parasol, avec pour objectif un été avec ombre et chaise longue dessous. Un rêve toujours lointain.
Puis, alors que, justement, le soleil s’apprête à disparaître mais que la lumière est encore belle, se reculer, corriger un peu, ratisser encore, remettre, quelques minutes, les mains dans la terre, retoucher une dernière fois, sachant que rien n'est jamais définitivement achevé.
À la fin (quand ?), attendre.
Regarder tous les jours, évaluer, vérifier, guetter une évolution tandis que rien ne se passe en surface. Savoir qu’il faudra sortir de ce bout final d'automne puis de l'hiver qui ne se hâte pas. Patiemment, voir venir. Et, un jour ou l'autre, constater enfin que les enracinements ont réussi. Ou échoué.
Dans l'attente, se réfugier à la maison.
Lire peut-être.
Écrire. Sûrement. Pour donner à voir combien prendre soin d'un bout de planète apporte du bonheur. Sans excès de zèle, en se sentant faire corps, oui, physiquement, avec elle.
Au fait, cet aggiornamento m'a pris près d'une semaine.
Fabien Borgogne
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manieresdedire · 3 years
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Tous les matins d'été
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Enfants heureux, nous avons fait l'expérience de l'été.
Dans les villes et les villages, les jardins et les parcs, à la campagne, au bord de la mer, à la montagne, dans les plaines, le long de rivières sinueuses, sur les pelouses ourlant des lacs, dans les prairies, le long des champs de blés qui ondoyaient sous les vents, après les fenaisons, aux fenêtres de nos appartements ou de nos maisons où s'engouffrait, filtré par les persiennes entrouvertes, un souffle léger empli d'indistincts effluves floraux qui se mêlaient, selon les heures, aux odeurs de pain, de café, de chocolat, de fruits mûrs, de légumes, de viandes et de poissons grillés.
Jamais nous n'avons oublié.
Ces étés nous les chérissons et, dans le petit purgatoire de l'automne et de l'hiver, nous en attendons depuis toujours le retour.
L'été n'arrive pas sans tambour ni trompette. Il s'annonce en grande pompe par l'entremise du printemps - sorte de promesse de l'aube à grande échelle - qui lui cédera un peu des fleurs qui tapisseront les chemins de son retour triomphal, et dont certaines, plus résistantes aux chaleurs, célébreront et accompagneront son installation provisoire.
Un été qui inspirera cent balades en pleine nature, visages au vent, corps baignés de lumière, puis de ces eaux vives qui apaisent des morsures du soleil.
Dans les riches nuits de la belle saison qui se reconnaissent, non à leur brièveté mais à leurs bruits, à leurs parfums, à l'ambiance sensuelle qu'elles installent, nos regards se lèveront vers les étoiles et nous hisseront jusques à elles dans des rêveries seulement interrompues par l’inconfort du port de la tête rejetée en arrière ou les pincements énervants des fourmis sur des corps qui croiront bien faire en s'allongeant au sol, tandis que insectes et oiseaux nocturnes relaieront ceux qui, tout le jour, auront sifflé, crié, bourdonné, vrombit...
Plus robustes que les petites fleurs des arbres fruitiers, celles les lavandes tiendront bon des jours et des semaines et attendront pour quitter la scène, l'apparition des larges efflorescences des hibiscus qui, en même temps que les grappes enivrantes des buddleias, passeront juillet et quelques jours d'août avec les flâneurs et les rêveurs. Les champs jaunes des tournesols et les terres bleues de lentilles réenclencheront des envies de peindre et de photographier.
Les fontaines, au moins autant que les terrasses des bistrots sous les frondaisons des platanes rafraîchiront et calmeront les soifs de fin de randonnées, imaginées et accomplies en anticipant le plaisir de ces longues pauses.
Dans les chambres aux draps frais, les courants d'air apporteront aux corps et aux esprits, dispensés de l'artifice des huiles essentielles dont, en hiver, on débouche pour mémoire les flacons, un surplus de bonheur pendant la lecture, l'écoute de musiques et les amours tendres.
Yves Rebouillat (in "Le Tarn Libre" du 6 aout 2021)
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manieresdedire · 2 years
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Un jour de chasse pas comme les autres
Il marchait depuis peu sur le plateau quand, au sortir d'un petit bois, il aperçut, à un jet de pierre, de drôles de gens formant un petit groupe armé d’arbalètes gigantesques, d'arcs puissants, de longues lances effilées, de sabres rudimentaires et de pétoires moyenâgeuses.
Leurs dégaines l'avaient surpris : certains revêtaient des peaux de bêtes, d'autres des tenues de judokas, de sumos, de cuisiniers, de cadres supérieurs, de cosmonautes, de clowns et de soldats de la "Grande Guerre". Ils émettaient des mots, des sons indistincts et se désaltéraient au jet des zahatos - le pays basque était proche - qui parvenait, parfois, à trouver les bouches. Des effluves de mauvais fruits les enveloppaient.
Il était effrayé, mais après un suprême effort de volonté, parvint à s’adresser à celui des personnages, - aussi loufoques qu'effrayants - le plus proche de lui et se tenant un peu à l'écart, afin qu'il lui indiquât un chemin sûr, loin de leurs armes et projectiles, pour prolonger son itinérance.
- Rien n'est sûr, répondit-il sur la défensive et apparemment en proie à la peur.
Redoublant d’inquiétude, le promeneur solitaire poursuivit l'interrogatoire : "Que se passe-il-donc ?"
- Ben, y a une espèce de dingue qui braconne pas loin, armé d'un tractopelle !
- Un engin de chantier ?
- Quasiment de guerre ! Son conducteur creuse de longues tranchées partout, s'y réfugie toutes les cinq minutes, nous observe, hurle à tour de bras des chansons guerrières, des menaces et des "On les aura", à l’attention d'on ne sait qui : animaux ou nous-mêmes paisibles chasseurs de carnaval, de traditions et d’écologie... Un fada quoi !
- Il vous fait la guerre ?
- J'sais pas ! Il chasse aussi, enfin... ça ressemble un peu à ça...
- Il chasse !?
- Une drôle de chasse ! Avec le godet arrière du bout du balancier de son engin, il attrape les faisans qui courent et des lièvres en vol dont il emplit son large godet frontal.
- Il en chope vraiment, l'insensé, ou vous me faites marcher ?
- Oui, oui, non, non ! Puis il dépose les bêtes dans le petit lac collinaire, la-bas, pour leur apprendre à nager... Il clame vouloir les protéger...
Un bruit strident les fit sursauter...
Au sortir de son lit, encore agité et couvert de sueur, il fila jusqu’au bassin dont l'eau vert-rivière était à peine troublée par les dérives arabesques de quatre ou cinq feuilles mortes détachées des branches du vieux mûrier qui, l’été, enveloppait douillettement de son ombre, les baigneurs au repos.
Rasséréné, il retourna se coucher espérant ne se réveiller qu'au printemps.
Yves Rebouillat (in "Le Tarn Libre" du 3 décembre 2021)
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manieresdedire · 3 years
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Ça recommence !
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Quarante cinq ans que ça dure ! Comme si l’humanité se complaisait dans l'embarras. Peste soit des changements d'heure !
On sait bien le foutoir qui en résulte dans nos vies : désaccoutumance nécessaire et douloureuse avec mille pratiques, investissements dans la lumière de l'heure qu'il faut oublier et réinventer, réglages des dernières horloges, réveils et montres non connectés, programmes informatiques rejoués tous les six mois pour basculer les horaires de circulation des trains et des avions et les mettre en concordance avec d'autres qui, ailleurs, ne changent pas, état de frustration des animaux domestiques des villes et des campagnes du fait des fantaisies de leurs "maîtres-hommes-et-femmes" qui jouent, méthodiquement, en mars et en octobre, à se lever tantôt plus tôt, tantôt plus tard.
Et encore ! Ce ne serait que cela qui est devenu proprement insupportable, ce ne serait rien.
Il y a plus grave, plus intime, plus attentatoire à la vie, qui perturbe l'existence en ce qu’elle a d'essentiel : notre concentration sur le moment qui vient qui ne serait pas gâché par l'annonce bien trop précoce de l'hiver et celle, mensongère, de l'été. "La Nouvelle Heure" est un trouble-fête, elle corrompt les représentations positives et joyeuses des saisons et de leur bel enchaînement. Dans la vie normale, personne ne pense le rythme des saisons, tous se laissent bercer par lui.
Ce mécanisme diabolique "heures d'été / heures d'hiver" - qu'ainsi nommées on oppose entre elles - inventé contre l'ordre naturel pour faire des économies d'énergie, perturbe, de longs et nombreux jours durant, la vie à l'unisson des saisons, l'arrangement intime avec le temps qui passe et voit vieillir chacun.
L’humanité a toujours bien aimé mettre la nature au pas, elle l'a souvent fait à ses dépens. Elle a compris le mouvement des astres, inventé la mesure du temps, écrit les conventions qui le rendent compréhensible à tous (24 heures, 365,25 jours, années bissextiles, douze mois, année 0, dates de bascule dans les saisons...). Ce n'était pas assez. C'est devenu bien trop.
Revendiquer encore et toujours le retour à une heure officielle immuable procède d'une exigence d'écologie appliquée aux personnes. Et ce serait déraison que se demander si une telle mesure verrait Brest et Strasbourg, Hendaye et Menton, spoliées à 19 heures dans leur accès respectif à la lumière du jour et ses nuances .
Yves Rebouillat (in "Le Tarn Libre" du 3 novembre 2021)
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manieresdedire · 3 years
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Faux journal
Un jour ou l’autre
Il fait gris ce matin. Les températures hésitent à descendre en dessous de zéro. Le vent énervé de la nuit fait une pause. L’humidité qui s’est répandue sur la prairie, le chemin et la petite route, décourage les sorties en plein air.
Le café chaud, les tartines grillées garnies de beurre, de confitures d’abricots et de cerises donnent un peu de couleur au temps qui s’étire mollement depuis longtemps et fait se ressembler toutes les matinées et les heures suivantes.
La radio égrène les statistiques du jour : de nouvelles personnes sont contaminées par le virus, alitées, en quarantaine, immobilisées, empêchées, en sont mortes...
Les Pays, les peuples, les économies souffrent. Les commentaires prospèrent. Les âneries avec.
L’espoir n’a pas disparu.
Un autre jour
Les graphiques de la pandémie sont un peu effrayants, on les voudrait différents, inspirateurs de prédictions rassurantes. Les statistiques nationales, enjeux politiques, sont peu lisibles, les comparaisons hasardeuses. Leurs modalités de calcul varient selon les pays ; elles ne sont pas garanties sans falsifications.
En politique intérieure, se préparent les échéances électorales à venir. Les coups bas pleuvent. Les mensonges prolifèrent.
Dans le monde, un président chasse l’autre qui a du mal à partir.
Hier, en fin d’après midi, les vents d’altitude se sont démenés pour faire un peu de place parmi les nuages à des trouées bleues et ont offert aux femmes, aux hommes et aux enfants disposés à la contemplation et rentrés avant l’heure des couvre-feux, un étonnant coucher de soleil. L’astre somptueux, rouge-feu, caressait de sa lumière ardente un ciel complexe qui prenait des tons de blancs, de dégradés de roses et de bleus-mauves.
Les programmes de la TNT sont peu attrayants. "Netflix" attendra encore avant d’entrer dans cette maison. Il y a encore, heureusement, tellement de livres à lire.
Deux ou trois jours plus tard
La marmelade d’orange, le miel, étalés sur des tranches du pain frais, le thé et le café sont d’excellents éveilleurs d’optimisme. Moins cependant que l’azur, le temps sec, le tout sous température enfin hivernale. Une matinée faste !
Il faudra sortir enfin et profiter de ce jour de repos pour marcher, renouer avec l’activité physique, la dépense saine d’énergie. Laisser le portable à la maison, s’habiller chaudement, emporter dans le sac à dos une petite bouteille d’eau, des noix, deux pommes et six clémentines. Faire comme lors des après-midi de printemps et les matinées d’été et ne pas douter que les beaux jours reviendront.
Yves Rebouillat (in le Tarn Libre du 12 janvier 2021)
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manieresdedire · 3 years
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Hommage aux masques
On s'habitue à tout. Question de survie. On finit par faire d'une contrainte une opportunité. La preuve par les masques sanitaires. Les populations non habituées à porter une telle protection ont eu beaucoup de mal à s'y faire, et pas seulement de petites fractions déraisonnables. Réellement, c'était pénible : il fallait y penser, en emporter avec soi, se rappeler où et quand il fallait la porter, la retirer... Derrière, on respirait mal, il fallait en changer, compter les heures d'utilisation, ne pas les jeter n'importe où, les laver, compter le nombre de lavages... Une épreuve, une calamité ! La conviction et la peur de l’opprobre et de la contravention, nous installèrent durablement dans le respect du "geste barrière"... propice à tout. On s'y fit donc. L’humanité jouit du double pouvoir de dissimuler et d'imaginer. Elle ne se priva pas d'en jouer et même d'en abuser. Les masques cachaient une partie importante des visages. Les sourires qui manifestent l'amitié, le plaisir, le bien-être, l'amour, la tendresse, l'admiration, la connivence ; les rides qui disent les habitudes et parfois l'âge ; les grimaces qui expriment, l'humour, la dérision, le rejet et la complicité. Ils contrarient les jeux de mime, de parodie, l'expression des envies de comédie. Nous reconnaissions des gens, mais c’était une nouvelle approche que de s'attarder sur leurs yeux, de comprendre ce qu'ils exprimaient. De scruter leurs regards comme jamais auparavant nous l'avions fait ni osé le faire. Nous ne saisissions pas tout, interprétions tant bien que mal ce langage des yeux, nouveau et vieux comme le monde. Nos efforts étaient méritoires. Avec les inconnus ou les non-reconnus nous nous amusions bien. Il fallait imaginer un visage "complet" sous l'artifice, sans savoir si le résultat était fidèle au réel, l'enjolivait ou l'abîmait. Parfois sortis d'un lieu clos ou populeux, nous nous autorisions à tomber les masques, nous eûmes alors des surprises, de belles et d'autre moins, d'hilarantes et d'autres tristes. Il y eut des déconvenues et des fou-rires, des indifférences, de l'intérêt... Nous ne gagnions jamais : la réalité défie l'imagination. Pour le meilleur et le pire. Il y avait, parmi les surpris, des optimistes généreux et gais et des pessimistes mal gracieux et pareillement embouchés. Moqueurs tendres ou railleurs méchants. En silence. Les années 2020/2021 auront été, et seront longtemps, celles du plus grand mouvement de masse d’imagination de tous les temps. Jamais nous n'avons été tant inventifs pour reconstituer selon nos humeurs, ce qui, entre les yeux d'autrui et son cou, se dérobait à notre curiosité. Les historiens du déguisement, des carnavals, du rire, de la dérision et de la moquerie, nous le confirmeront. En attendant, il n'est pas interdit de remettre les masques de temps en temps. Avec ou sans pandémie, juste pour jouer sous cape... ou dissimuler ce qu'on ne veut pas montrer. Yves Rebouillat (in le Tarn Libre du 2 juillet 2021)
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manieresdedire · 3 years
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Chronique en quelques rimes quand sourdent les déprimes
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À quoi une pandémie serait-elle utile ?
Fichtre ! Qui pourrait donc dire du bien de l’hostile ?
Le danger, la peur de perdre, entravent, annihilent
Les femmes et les hommes et les enfants si fragiles.
Osons former quelques spéculations agiles
Et l’impossible champ deviendra fertile.
*****
L’épreuve des confinements, de l’isolement,
La restriction des libertés, des consentements,
Les preuves de la déraison, de l'intelligence,
De la science comme des spectaculaires ignorances,
Les masques dissimulant, révélant autrement,
Les immobilités forcées, le ruissellement
Des informations, des annonces, de tant d’alertes,
Tout encourage à la réflexion, aux bilans.
À ne pas rester cérébralement inerte,
À scruter l’avenir, fouiller passé, présent.
*****
Le drame fige les heures et de la conscience instille.
Hier, possiblement étourdis, imprudents,
Aurions-nous laissé s’échapper trop de temps ?
Des opportunités expiraient, inutiles.
Une longue fuite qui aujourd’hui horripile.
*****
Le regard dessille : nos vies seraient-elles futiles,
Comme modelées dans une consentante argile ?
Les privations sont des défaiseuses d’amnésie.
Des souvenirs pêle-mêle défilent, d’autres mutilent.
Leur cortège s’anime, se rue avec frénésie.
Une revue sévère qui met en lumière des torts.
Laissant de nombreux regrets et même des remords.
Des actes irréfléchis, abstentions, humeurs,
Naguère sans importance, aujourd’hui des erreurs,
Ont conduit insidieusement tout au fond des nasses.
Mené droit à de laides et de lugubres impasses.
Amoindrissant l’éclat inouï des joies anciennes,
Amours sincères, solidarités quotidiennes.
Et les bonheurs furtifs, cueillis à la va-vite :
Sourires, baisers, caresses, rencontres insolites...
Les images cachées, les souvenirs qu’on empile,
Les mauvais résistent à l’oubli, créent de la bile,
Suscitent de la mauvaise conscience, ce curare ;
Tous ceux qui provoquent des larmes de crocodile,
Et les plus beaux ou les plus tendres et les plus rares,
Arrangés, embellis, mais sincères, authentiques,
Quelques dizaines dans beaucoup moins de décennies ;
Blessures, douleurs, soutien, consolations magiques,
Lâchetés, élans bienveillants, voire héroïques,
Arbitraire, mesquineries, une longue litanie.
*****
Avant les rebonds salutaires, que reste-il ?
Introspection, livres, cinéma à domicile,
La maison, comme une oasis, un asile,
Les villes, les paysages depuis l’automobile,
Redécouverts, dans le lointain et qui défilent.
Et des projets, minuscules, géants, dix, cent, mille.
Ce qu’il faudra à l’avenir de soi exiger :
Dépasser un jadis chaotique et fébrile,
Mieux passer, partager un temps inestimable,
Ne plus, à son insu, le laisser s’égarer.
De toutes les mauvaises passions se séparer,
Chercher toujours en tout ce qu’il y a d’aimable.
Agir, pourquoi pas, pour des causes admirables.
*****
Demain sera mieux qu’hier selon Michel Serres,
En cette matière tellement volubile naguère.
La paix renaîtra passée la crise sanitaire,
Cette exécrable, singulière, guerre meurtrière.
L’avide Covid, l’hurluberlu qui tue, atterre,
Qui, après avoir saturé nos cimetières,
Jeté à terre, mordra à son tour la poussière.
Yves Rebouillat (In “Le Tarn Libre” du 05/02/2021)
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manieresdedire · 3 years
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