Tumgik
navisseli · 3 years
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tu as quel âge?
Bonjour Anon, Seli et moi avons 26 ans !
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navisseli · 3 years
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Tome 5 : Au coeur du Maelström
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2010
Nombre de pages : 48
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Encore un super tome. C’est vachement anar comme bédé ! J’aime beaucoup les réflexions distillées sur l’autogestion, notamment dans le domaine éducatif : tout le monde participe à toutes les tâches, les enfants s’éduquent entre eux et utilisent le savoir comme outil d’élévation. L’école, telle qu’iels la vivaient “avant”, était un carcan oppressif - pas l’éducation et le savoir. 
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Cette saga est très politique, l’assume parfaitement, et j’adore. Elle est distillée de multitudes de petites allusions à des sujets de société, comme par exemple de végétarisme.
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Leïla prend enfin un peu d’importance, et j’ai envie de dire, c’était pas trop tôt ! Elle s’affirme de plus en plus en tant que meneuse et preneuse de décision, non plus dans l’ombre de Dodji mais par elle-même, ce que j’ai particulièrement apprécié car je la sentais vraiment mise de côté depuis quelques tomes.
Concernant l’histoire et l’intrigue, ce tome, encore une fois, est sombre et profond - impression renforcée par des références inquiétantes comme le monolithe clarkéen/kubrickien de l’Odyssée de l’espace. 
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Bref, l’univers est toujours aussi intriguant et j’ai hâte de lire la suite.
Ma note : 16/20.
Seuls
Bonjour ! Je commence aujourd’hui ma chronique sur mon coup de coeur de l’année dernière en matière de bande-dessinée, la série Seuls. Je procéderai tome par tome, en rebloguant le dernier billet à chaque chronique histoire d’avoir une chaine complète.
Tome 1 : La Disparition
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2005
Nombre de pages : 56
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Ce premier tome a été une lecture mitigée. Les personnages sont intéressants, j'apprécie particulièrement Dodji et Yvan qui est bizarrement clairvoyant. Je tiens à noter que 2 des 5 personnages principaux de cette BD sont racisé-es (Dodji est noir, Leïla est maghrébine) et qu’il s’agit des deux personnages les plus importants du groupe, pas de side-kicks en arrière-plan.
Un truc m’a mis un peu mal à l’aise : l’espèce d’obsession de Bruno Gazzotti à dessiner Terry nu (trois vignettes en moins de 30 pages ça fait beaucoup quand même ><) et à dessiner des pénis !
Bref, c’est un premier tome intriguant, avec son lot de scènes fortes, mais un peu plat parce que trop court !
Ma note : 11/20.
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navisseli · 3 years
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Tome 4 : Les Cairns rouges
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2009
Nombre de pages : 48
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Ce tome prenant explore encore un nouveau modèle de société, avec cette fois-ci un petit groupe autogéré qui laisse à chaque enfant la possibilité d’explorer ses goûts, ses passions et sa personnalité. 
C’est l’occasion de développer les relations entre personnages ! Yvan est, encore une fois, un coup de coeur pour moi dans ce tome. En revanche, je déplore toujours le fait que Leïla soit en retrait par rapport aux autres personnages : elle est moins complexe, moins développée, et se contente d’être “la maman du groupe” alors qu’elle a tellement plus de potentiel... 
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Je tiens encore une fois à saluer la représentation de cette série, qui présente de nombreux personnages féminins et/ou racisés, principaux comme secondaires.
Cette série est de plus en plus prenante au fil des tomes. Celui-ci se finit par un sacré cliffhanger, donc si vous ne l’avez pas lu, je vous recommande d’être en mesure d’enchainer directement sur le tome suivant !
Ma note : 14/20.
Seuls
Bonjour ! Je commence aujourd’hui ma chronique sur mon coup de coeur de l’année dernière en matière de bande-dessinée, la série Seuls. Je procéderai tome par tome, en rebloguant le dernier billet à chaque chronique histoire d’avoir une chaine complète.
Tome 1 : La Disparition
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2005
Nombre de pages : 56
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Ce premier tome a été une lecture mitigée. Les personnages sont intéressants, j'apprécie particulièrement Dodji et Yvan qui est bizarrement clairvoyant. Je tiens à noter que 2 des 5 personnages principaux de cette BD sont racisé-es (Dodji est noir, Leïla est maghrébine) et qu’il s’agit des deux personnages les plus importants du groupe, pas de side-kicks en arrière-plan.
Un truc m’a mis un peu mal à l’aise : l’espèce d’obsession de Bruno Gazzotti à dessiner Terry nu (trois vignettes en moins de 30 pages ça fait beaucoup quand même ><) et à dessiner des pénis !
Bref, c’est un premier tome intriguant, avec son lot de scènes fortes, mais un peu plat parce que trop court !
Ma note : 11/20.
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navisseli · 3 years
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Tome 3 : Le Clan du requin
/!\ ATTENTION : cette chronique contient des spoils sur des points majeurs de l’intrigue. Elle traite également des sujets suivant : sexisme, viol, homophobie, racisme, neurophobie, nazisme. /!\
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2008
Nombre de pages : 48
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Le début de ce tome m’a un peu secoué en ce qu’il est super abrupt. On quitte les personnages à Fortville, et on les retrouve au milieu de rien, sans transition ! Où est-ce qu’on est ? Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Pourquoi on est là ? Probablement pas grand chose, sinon on nous l’aurait présenté, mais quand même, pour un-e lecteurice qui enchaine les tomes, c’est déstabilisant !
J’ai adoré ce tome plus sombre que les autres, qui traite avec aisance de tout un tas de sujets difficiles qu’il aborde frontalement. L’antagoniste, Saul, est un nazi. Et ce n’est pas une figure de style pour décrire quelqu’un dont je ne partage pas les opinions politiques : c’est un vrai nazi. Il a littéralement une biographique d’Hitler à son chevet.
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Saul est menaçant pour tout le monde : les filles (Camille qu’il menace de viol, toutes les autres qu’il marie de force et force à se charger des tâches domestiques), les homosexuels ou ceux qu’il désigne comme tels (Yvan), les personnes racisées (Dodji), les personnes neuroatypiques (Anton). Il n’est pas traité comme ridicule, mais bien comme une menace réelle de retour à une société traditionaliste qui renforce encore davantage le statut des oppresseurs - ce qui donne l’occasion à cette BD de faire une petite critique féministe sur la répartition genrée des rôles traditionnels.
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À ce propos, j’en profite pour faire une parenthèse sur Yvan, qui se démarque vraiment dans ce tome : il est ultra stylé dans sa robe améliorée !! j’aime beaucoup qu’on détourne le fait que non, c’est pas humiliant de porter une robe quand on est un garçon, et on peut même être badass !
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L’univers est de plus en plus intriguant, et j’ai trouvé très intéressant de voir développée cette ville de gamin-es et le message un peu anarchiste qui est porté : on a initialement une société autoritaire et conservatrice dirigée par un nazi, dont le chef meurt et est remplacé par un nouveau chef qui refuse son statut et abolit une hiérarchie injuste.
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Bref, un très bon tome, qui m’a donné envie d’en savoir plus !
Ma note : 16/20.
Seuls
Bonjour ! Je commence aujourd’hui ma chronique sur mon coup de coeur de l’année dernière en matière de bande-dessinée, la série Seuls. Je procéderai tome par tome, en rebloguant le dernier billet à chaque chronique histoire d’avoir une chaine complète.
Tome 1 : La Disparition
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2005
Nombre de pages : 56
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Ce premier tome a été une lecture mitigée. Les personnages sont intéressants, j'apprécie particulièrement Dodji et Yvan qui est bizarrement clairvoyant. Je tiens à noter que 2 des 5 personnages principaux de cette BD sont racisé-es (Dodji est noir, Leïla est maghrébine) et qu’il s’agit des deux personnages les plus importants du groupe, pas de side-kicks en arrière-plan.
Un truc m’a mis un peu mal à l’aise : l’espèce d’obsession de Bruno Gazzotti à dessiner Terry nu (trois vignettes en moins de 30 pages ça fait beaucoup quand même ><) et à dessiner des pénis !
Bref, c’est un premier tome intriguant, avec son lot de scènes fortes, mais un peu plat parce que trop court !
Ma note : 11/20.
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navisseli · 3 years
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Tome 2 : Le Maître des couteaux
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2007
Nombre de pages : 48
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
J’ai trouvé ce tome beaucoup plus fort et marquant que le précédent. L’ambiance est incroyable, y’a vraiment une vibe Tales From The Loop, avec le côté « les enfants sont livrés à eux-mêmes sans pouvoir compter sur des adultes ». Cette BD sonne très juste : souvent, dans les livres, les enfants ne se comportent pas comme des enfants... et là, c’est exactement ce que feraient des gamins qui se retrouvent complètement seuls, en fait ! J’ai particulièrement apprécié la scène des jouets, où Terry se fait trois chambres remplies de jouets qu’il a collecté, ou bien Camille avec son poney... Et toute la fin est particulièrement touchante.
Par ailleurs, la force de cette BD, ce sont ses personnages. J’adore Dodji, sa bienveillance, sa relation à Terry dont il est un peu le grand frère, le fait qu’il lise des manga de magical girls sans que cela remette en question sa maturité. Terry est chouette aussi en vrai, il est... attachiant. Les personnages, en général, sont très humains. Au final, j’ai l’impression que Leila est celle qui a le moins de personnalité...
Ma note : 18/20.
Seuls
Bonjour ! Je commence aujourd’hui ma chronique sur mon coup de coeur de l’année dernière en matière de bande-dessinée, la série Seuls. Je procéderai tome par tome, en rebloguant le dernier billet à chaque chronique histoire d’avoir une chaine complète.
Tome 1 : La Disparition
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2005
Nombre de pages : 56
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Ce premier tome a été une lecture mitigée. Les personnages sont intéressants, j'apprécie particulièrement Dodji et Yvan qui est bizarrement clairvoyant. Je tiens à noter que 2 des 5 personnages principaux de cette BD sont racisé-es (Dodji est noir, Leïla est maghrébine) et qu’il s’agit des deux personnages les plus importants du groupe, pas de side-kicks en arrière-plan.
Un truc m’a mis un peu mal à l’aise : l’espèce d’obsession de Bruno Gazzotti à dessiner Terry nu (trois vignettes en moins de 30 pages ça fait beaucoup quand même ><) et à dessiner des pénis !
Bref, c’est un premier tome intriguant, avec son lot de scènes fortes, mais un peu plat parce que trop court !
Ma note : 11/20.
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navisseli · 3 years
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Seuls
Bonjour ! Je commence aujourd’hui ma chronique sur mon coup de coeur de l’année dernière en matière de bande-dessinée, la série Seuls. Je procéderai tome par tome, en rebloguant le dernier billet à chaque chronique histoire d’avoir une chaine complète.
Tome 1 : La Disparition
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Auteurs : Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 2005
Nombre de pages : 56
Genre : BD, post-apocalyptique, survie
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Ce qu’en pense Naviss :
Ce premier tome a été une lecture mitigée. Les personnages sont intéressants, j'apprécie particulièrement Dodji et Yvan qui est bizarrement clairvoyant. Je tiens à noter que 2 des 5 personnages principaux de cette BD sont racisé-es (Dodji est noir, Leïla est maghrébine) et qu’il s’agit des deux personnages les plus importants du groupe, pas de side-kicks en arrière-plan.
Un truc m’a mis un peu mal à l’aise : l’espèce d’obsession de Bruno Gazzotti à dessiner Terry nu (trois vignettes en moins de 30 pages ça fait beaucoup quand même ><) et à dessiner des pénis !
Bref, c’est un premier tome intriguant, avec son lot de scènes fortes, mais un peu plat parce que trop court !
Ma note : 11/20.
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navisseli · 3 years
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Tome 3 : La Vipère géante
/!\ ATTENTION : cette chronique contient des spoils mineurs. /!\
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Auteur : Brian Jacques
Maison d’édition : Mango
Date de publication : 1999 (édition), 1986 (original)
Nombre de pages : 190
Genre : Fantasy, historique
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Ce qu’en pense Naviss :
Bonjour ! Voici ma dernière chronique sur Cluny le Fléau, le neuvième tome de Rougemuraille dans l’édition complète française, mais, je viens de l’apprendre, le tout premier tome de Rougemuraille jamais paru ! En consultant le Wikia, j’ai appris que Cluny le Fléau (qui s’appelle juste Redwall en anglais, à savoir bêtement “Rougemuraille”) était en fait le seul tome présentant des références à notre monde à nous. Il semblerait donc que l’auteur ait fait son choix, et le bon !
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Sssssssss-ça va barder !
I. Un style toujours aussi plat
J’ai lu ce tome un peu plus d’un an après les deux précédents, et le style ne m’avait pas manqué... Je le trouve, encore une fois, fade et plat. J’ai trouvé que l’humour aussi était insipide : quelques répliques de Basile ont pu m’arracher un vague sourire par-ci par-là, mais c’est tout. Je pense toujours que ce soucis de force est essentiellement dû au fait que ce soit une traduction : il est difficile de transmettre le style d’un-e auteurice d’une langue à l’autre, et les plaisanteries, jeux de mots et autres calembours sont intraduisibles et nécessitent beaucoup d’habilité que la traductrice n’a malheureusement pas, ou n’a pas su transcrire. Ou peut-être que Brian Jacques avait un style plat lors de son premier tome, et que c’est ce que la traductrice a voulu transmettre, je ne sais pas. Je compte commencer Martin le Guerrier très prochainement et j’ai pu voir que ce n’est pas Emmanuelle Lavabre qui s’est occupée de la traduction, mais un certain Jean-Noël Chatain. Je vous dirai ce que ça change lors de ma prochaine chronique.
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Illustration de Pete Lyon.
II. Un intérêt inégal
Je suis assez mitigé sur le fond. J’ai adoré les deux passages chez le seigneur chat Julien de Cajolin ainsi que ce qui précède et qui suit, à savoir la rencontre avec les musaraigne de l’Ugmuray et l’entretien avec le Capitaine Neige, que ce soit à l’arrivée et au retour de Mathieu. J’ai trouvé ces quelques chapitres intéressants et divertissants. Et... c’est tout. Parce qu’en vrai, tout ce qui se passe à Rougemuraille pendant ce temps, à savoir plusieurs chapitres décrivant l’abbaye en état de siège, c’est pas super intéressant, et je préfèrerai suivre la quête principale de Mathieu... 
Vous voyez, dans le Seigneur des Anneaux, ces moments où on s’intéresse aux aventures de Merry, Pippin, Aragorn, Gimli et Legolas pendant que Frodon et son copain Sam sont occupés à sauver le monde ? Ca me fait le même effet : l’impression qu’on ne me montre cela uniquement parce que si on ne s’intéressait qu’à la quête principale, le livre serait trop court. Sauf que le Seigneur des Anneaux avait le mérite de rendre ses intrigues parallèles intéressantes.
Bon, l’analogie est un peu foireuse, mais vous voyez l’idée. Et franchement, pour ce qu’il s’y passe, à Rougemuraille... Ne pas insister autant sur ce passage aurait pu nous éviter des aberrations. Pour récompenser les défenseurs de l’abbaye, Basile ordonne qu’on organise un grand repas dans l’abbaye (le siège n’est pas terminé, seulement l’attaque !). Faire un repas de fête pendant un siège, c’est pas ce qu’il y a de plus malin…
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III. Des anachronismes, encore et toujours
Parmi les mythes que j’entends le plus concernant le Moyen Âge, outre la peste et les famines, je vois toujours revenir cette histoire d’huile bouillante que l’on sur les assaillants pendant les sièges. Brian Jacques n’y échappe pas. Je l’ai déjà dit et je le répète : non, on ne jette pas d’huile bouillante pour se défendre lors d‘un siège. Ca coûte cher et c’est rare… On jettera plutôt des pots remplis de poix, de soufre et de salpêtre, ou bien tout simplement de l'eau bouillante.
Bon, pour être honnête, l’huile lancée sur les assaillants pendant le siège de Rougemuraille n’avait pas pour but d’ébouillanter les ennemis, mais de rendre les ennemis et surtout leur bélier glissant afin qu’ils ne puissent le tenir. De l’eau savonneuse ou de la poix auraient tout autant fait affaire, et auraient été beaucoup moins coûteuse ! Mais bon, pas sûr que l’argument économique ait de l’importance pour Rougemuraille. On parle quand même d’une abbaye qui se paie des mets de luxe et organise des banquets pendant qu’elle est assiégée...
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IV. Des personnages secondaires qui s’affirment davantage
Je passe rapidement sur Mathieu dont j’ai déjà dit tout ce que je pensais dans les deux chroniques précédentes. Tout ce que j’ai de nouveau à rajouter à son sujet, c’est qu’il est inconsistant et qu’il change de personnalité selon les besoins du plot.
Concernant Florine, qui ne servait à rien dans les tomes précédents ne servait à rien à part être la meuf de Mathieu, elle prend enfin un peu plus de place en se rendant utile lors du siège, où elle s’occupe notamment du ravitaillement. Bon, il ne faut pas rêver non plus, sa fonction principale c’est, pour citer les mots de l’abbé, d’être « une bonne épouse [dont] la beauté ravira Rougemuraille et gouvernera le coeur de notre Mathieu » (je rappelle qu’elle l’âge de Mathieu donc 13 ans…). Rôle qu’elle remplit visiblement à merveille, puisque l’épilogue nous apprend qu’un an plus tard, elle a eu un gosse avec Mathieu. 
Un gosse ? Attendez... Mais... il avait pas 13 ans, Mathieu ? Du coup euh, genre Florine et lui sont parents à 14 ans ? Ah... Je vois.
J’en profite pour noter qu’il y a un peu plus de personnages féminins dans ce tome. Les femmes prennent de l’importance notamment lors du siège : Dame Blaireau notamment, mais aussi Jeannette, Isa, Madame Camparaigne et Florine. J’ai été heureux de voir le retour de Becquerelle, personnage sympathique du tome précédent, qui est désormais reine des Moinos. Je note également l’introduction d’un nouveau personnage féminin, Ugmuray des Ugmuray, qui est aussi une guerrière !
J’ai toujours de l’affection pour Basile, qui est un personnage amusant et haut en couleurs. Mais mon vrai coup de coeur de ce tome, c’est le seigneur Julien de Cajolin : j’aime ses manières et son élégance, mais surtout, j’aime sa relation au Capitaine Neige. C’est l’exemple même des deux vieux amis qui s’adorent et se détestent, et trouveraient n’importe quel prétexte pour se disputer. (Et en plus, Julien de Cajolin est une élite rurale !!!!! Mon sujet de mémoire !!!!)
Ma note : 7/20.
Pour conclure, je dirai que Cluny le Fléau pose les bases d’un univers qui a le potentiel de devenir intéressant et complexe, ce qu’il deviendra, je n’en doute pas, dans les 21 tomes (oui oui, je parle bien des intégrales !) qui suivront ce premier opus. Certes, le style est plat, mais je laisse le bénéfice du doute à l’auteur et je vous dirai ce que valent les autres traduction quand je les lirai. Certes, le héros et son intérêt romantique sont inintéressant-es au possible, mais cela est rattrapé par une multitude de personnages secondaires sympathiques. Je pense vraiment que cette saga a du potentiel... Mais il faut le temps que ça se lance.
Ma note générale : 6/20.
Rougemuraille : Cluny le Fléau
/!\ Attention : cette critique contient des spoilers mineurs sur l’intrigue. /!\
Pour une raison qui m’échappe (l’argent *kof kof*), en France, on aime bien découper en plusieurs tome des livres qu’on va ensuite nommer “intégrales”, afin de pouvoir vendre 30 euros un livre qui n’en vaudrait qu’entre 16 et 22, en persuadant læ lecteurice qu’iel fait une bonne affaire (mais si, 10 € le tome au lieu de 30 !!!). Cette review en trois partie est en fait celle d’un seul et même livre, à savoir le neuvième tome de la saga Rougemuraille (Redwall en anglais) de Brian Jacques.
Ca faisait un bail que je voulais lire Rougemuraille. Depuis le collège, à vrai dire. Il faut dire que les couvertures sont magnifiques : au CDI, Les Ombrenards et La Forteresse en péril m’avaient tout de suite tapés dans l’oeil. S., ma compagne de lecture dont je vous parle tout le temps, y ayant été plus sensible encore que moi : elle avait donc lu La Forteresse en péril, donc le tout premier tome de la saga, et m’avait dit de renoncer en avançant comme argument que le style était plat, et que ce n’était pas aussi bien qu’il n’y paraissait.
Il y a plusieurs milliers d’années, en septembre 2019, j’apercevais tous les tomes de la saga sur les étagères d’un ami dont c’était l’anniversaire. Je lui fis part de mes regrets de n’avoir pas cédé à l’époque à l’appel de ces jolies couvertures animalières médiévalisantes, et il me confia immédiatement neuf tomes (donc trois), en me disant que je les lui rendrai la prochaine fois qu’on se verrait. 
Je les ai toujours…
J’avais lu deux tomes, puis j’avais un peu laissé tombé vu que je n’accrochais pas. Mais comme je compte bien les lui rendre, j’ai décidé de me sortir les doigts du… menton, et de les lire une bonne fois pour toutes ! C’est chose faite pour le tiers (trois tomes, donc un… vous suivez toujours ?), puisque j’ai enfin fini hier Cluny le Fléau !
Tome 1 : Le Seigneur de la guerre
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Auteur : Brian Jacques
Maison d’édition : Mango
Date de publication : 1999 (édition), 1986 (original)
Nombre de pages : 190
Genre : Fantasy, historique
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Ce qu’en pense Naviss :
I. Une traduction française plat et inconstante
En lisant ce livre, j’ai compris ce que voulait dire mon amie S. lorsqu’elle me rapportait que le style est plat. Je ne sais pas si c’est la faute de l’auteur ou de la traductrice car je n’ai pas lu le livre en VO, donc il faudrait voir ce qu’en pense le lectorat anglo-saxon… Je penche quand même pour la traductrice, car il y a un certain nombre d’inconsistances au sein du livre qui me semblent vraiment être liées à des problèmes de traduction. Je pense notamment à la fouine Sac-d’os, le lieutenant du rat Cluny. Sac-d’os est genré au féminin jusqu’à ce qu’il ait enfin la parole, et se genre lui-même au masculin. Donc deux possibilités :
Ou bien l’auteur s’est dit en cours de route qu’une femme à un poste militaire, ça ne va pas. Je ne penche pas pour cette théorie, étant donné qu’on trouve plus tard des guerrières comme le moineau Becquerelle au tome 2 ou la musaraigne Ugmuray au tome 3.
Ou bien la traductrice est inconsistante, ce qui me parait être la théorie la plus vraisemblable.
Toujours sur la forme, j’ai apprécié des originalités comme le fait que la moitié des chapitres sont centrés sur Cluny, l’antagoniste, et en point de vue interne. Je ne vois pas ça souvent et j’ai trouvé cela intéressant.
II. Un lore prometteur, mais trop confus !
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Source. Sans déconner, ça donne pas envie ?
Ce qui fait la force de Rougemuraille, son attrait principal, si je puis dire, c’est la combinaison entre des animaux vaguement anthropomorphes et une Angleterre basse-médiévale voire de la première modernité pré-Réforme. Moi qui suis un fan du Robin des Bois de Disney, j’en suis ravi ! 
Le soucis, c’est qu’aucun de ces deux aspects ne semble avoir été pensé jusqu’au bout, ce qui crée un certain nombre de confusions, d’incohérences et d’anachronisme.
Sur le plan historique, d’une part, le roman collectionne les anachronismes. Cela ne me gênerait pas dans un univers purement fantasy, mais comme je l’ai dit, il nous pose un contexte réaliste historique : on est en Angleterre, on sait que la France existe puisqu’on nous la mentionne, on sait que le monastère de Rougemuraille est d’obédience catholique et qu’on y prie la Vierge et Jésus. Le roman cherche à recréer un réalisme médiéval, mais malheureusement ne va pas jusqu’au bout. Ainsi, les personnages mangent avec une fourchette alors que celle-ci ne se diffuse dans la société qu’au XVIIIe siècle. Avant cela, elle reste l’apanage exclusif des cours royales. La nourriture qui est consommée ne fonctionne pas du tout, il s’agit essentiellement de produits d’importation américaine qui n’étaient pas encore consommés à l’époque : la pomme de terre et la tomate par exemple. Le roman commence par un grand repas organisé à l’abbaye où tout le village semble être convié, ce qui donne lieu à des aberrations comme par exemple le fait que les hommes, dans l’abbaye, soient mélangés aux femmes, ou bien qu’on laisse performer des saltimbanques (dont un illusionniste !!) dans l’abbaye . 
Et parfois, certains éléments nous sortent complètement de ce bas Moyen Âge anglais réaliste, comme par exemple lorsque l’abbé nous parle tantôt de Dieu, tantôt des dieux, comme si l’auteur était incapable de se décider entre un univers de fantasy et un univers réaliste. 
Bref, même si la saga Rougemuraille a le potentiel d’introduire un jeune lectorat à l’histoire médiévale, elle échoue à cela à cause de son aspect incomplet. Ces romans utilisent des lieux communs ahistoriques concernant la société médiévale afin de créer un contexte exotique mais pas trop quand même, qui reste familier de ce que le lectorat croit connaître sur la période, mais elle demeure en fin de compte une introduction superficielle à l’histoire médiévale. Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous conseille l’article de Cynthia Rostankowski publié en 2003, The Monastic Life and the Warrior’s Quest: The Middle Ages from the Viewpoint of Animals in Brian Jacques’s Redwall Novels.
Cette indécision se sent également dans tout ce qui touche à l’animalité. Les tailles n’ont aucun sens. Par exemple, on nous explique que 400 rats sont stationnés à l’église Saint-Ninien, une petite église de campagne, ce qui signifie que l’église est à taille humaine et que les animaux ont des tailles d’animaux. Mais un peu plus tard, ces mêmes rats sont décrits comme montant à cheval - des chevaux adaptés à leur taille, j’entends. 
Parfois, tout le monde a l’air de faire plus ou moins la même taille, comme sur cette charte :
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Mais parfois, la différence de taille est vraiment tangible, comme ici.
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Et malheureusement, je trouve que ces inconsistances rendent difficiles le fait de se projeter dans cet univers : comment le faire quand tout change en permanence, quand on n’est jamais sûr-e ne serait-ce que de la taille des personnages les uns par rapport aux autres ?
III. Des personnages trop souvent sans saveur
Je vais déjà commencer par le protagoniste, la souris Mathieu, novice de Rougemuraille qui se découvre un lien avec le fondateur de l’ordre, le guerrier légendaire Martin. Je… n’aime pas Mathieu pour de multiples raisons, la principale étant qu’il est un Gary Stu. Il est l’Elu et ça sort de nulle part, il n’a pas le moindre défaut, il passe de souris timide à super guerrier de ouf sans transition, tout le monde l’aime, il contre les plans de Cluny sur des pressentiments…
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Est-ce que vous voyez son sourcil droit se froncer, alors qu’il essaie de paraître gentil et inoffensif ? Ton numéro ne marche pas avec moi, Mathieu !
Je n’aime pas du tout sa relation à Florine, une villageoise de l’âge de Mathieu et son intérêt romantique. Je la trouve d’une part inconsistante, comme si l’auteur ne savait pas très bien quel était le rapport entre ses personnages et que leur relation changeait d’une scène à l’autre. Et d’autre part, est-ce que c’était nécessaire de coller une romance à un futur moine ? C’est super forcé, on dirait que l’auteur voulait à tout prix caser un personnage romançable, mais sans faire l’effort de développer ladite romance. 
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En vrai j’ai bien envie de voir le dessin animé, leur romance y a l’air un peu plus intéressante…
Je trouve aussi super malaisant la façon qu’ont les personnages de « sexualiser » constamment Mathieu et Florine, en mode « regardez on dirait un couple s’occupant de leurs bébés » lorsqu’ils sont avec les jumeaux Souricis. Ce sont des enfants… ils ont 13 ans !! C’est pas mignon du tout de les imaginer avec des gosses à leur âge…
Les autres personnages secondaires sont sympathiques, sans plus. Un seul est véritablement au dessus du lot : Basile Lelièvre-Cerf. Il est stylé, grandiloquent, drôle, et c’est le plus caractérisé dans ses dialogues !
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Ne déborde-t-il pas de charisme ?
L’autre grand défaut, c’est Cluny. Cluny est un méchant cliché et sans aucune perspective. Je rigole pas, son objectif c’est, comme énoncé par lui-même, d’avoir un domaine avec des esclaves qui le servent, et son moyen pour y parvenir c’est de tuer tout le monde… Moins creusé, comme objectif, tu meurs !! Tous les antagonistes sont extrêmement décevants. Ils sont tellement tous montrés comme bêtes, incapables et désunis que c’est à se demander comment ils en sont arrivés jusque là, et en quoi ils représentent vraiment une menace…
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GREUHAHAHEUEHAHEUHHEU JE SUIS MÉCHAAAAANT.
Bref, pour résumer : un premier tome (ou un début de tome) plutôt plat, qui manque cruellement d’enjeux, et qui est d’autant plus décevant qu’il était prometteur.
Ma note : 3/20.
3 notes · View notes
navisseli · 3 years
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Tome 2 : L'Épée légendaire
/!\ ATTENTION : cette chronique contient des spoils mineurs. /!\
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Auteur : Brian Jacques
Maison d’édition : Mango
Date de publication : 1999 (édition), 1986 (original)
Nombre de pages : 253
Genre : Fantasy, historique
______________________________________________________________
Ce qu’en pense Naviss :
Voici donc la suite de ma chronique sur Cluny le Fléau, le neuvième tome de la saga Rougemuraille, découpé en trois tomes par l’édition Mango. Je m’attèlerai maintenant au 2e tome du découpage français, L’Épée légendaire. Les illustrations de ce post proviennent des illustrateurs Gary Chalk, Troy Howell et Chris Baker !
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I. Une traduction française qui laisse à désirer
J’ai vraiment des réserves à émettre concernant l’édition française. J’ai plusieurs fois été dérangé par sa syntaxe douteuse, que ce soit dans l’usage de la ponctuation, le découpage... J’ai pu constater un certain nombre de fautes de grammaires franchement ridicules pour ne surtout pas mettre certains mots au féminin : « la souris guerrier » au lieu de « la souris guerrière » par exemple.
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II. Un lore qui gagnerait à complètement lâcher ses tentatives de justification historique
Encore une fois, l’auteur essaye de renforcer l’encrage historique et géographique de son oeuvre en faisant référence à des territoires qui existent dans notre monde, comme la Chine, nommée clairement. On est en Angleterre, la monnaie en vigueur est le florin - ce qui signifie qu’on est au minimum au XIIIe siècle, mais du coup le renforcement du contexte historique met d’autant plus en lumière des anachronismes variés, notamment en ce qui concerne la nourriture. Pour en citer deux :
Le thé ne se diffuse pas en Europe avant le XVIe siècle. Oui, on est en Angleterre, mais non, les personnages ne peuvent pas boire de thé...
Le coing est connu mais pas encore massivement diffusé, il ne se produit qu’en climat méditerranéen, et ça m’étonnerait qu’une abbaye de campagne ait accès à de tels mets d’importation pour en faire des tartes.
Ce n’est pas très important, mais dans un contexte qui se veut historique et médiéval, j’aimerais bien que l’auteur s’intéresse à la période qu’il dépeint de manière moins superficielle. J’aimerais également qu’on définisse davantage à quel point le monde est proche ou éloigné du nôtre... et je préférerai qu’il soit plus éloigné. Car tout ce qui est original et propre à ce monde, est sympathique et donne envie d’en savoir plus ! Je pense notamment à l’introduction du peuple des Moinos, qui m’ont fait penser à un mélange entre le Roi Burgonde de Kaamelott pour leur manière de parler, et les Dynasties de la Canopée de Roots, des oiseaux souhaitant redonner à leur espèce autrefois majestueuse sa gloire d'antan au sein de la forêt en reprenant le contrôle de ses clairières...
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III. Un scénario plus haletant
Il n’y a pas la moindre scène de bataille dans ce tome, contrairement à celui qu’il suit et celui qu’il précède. Pourtant, des trois tomes, c’est celui que j’ai trouvé le plus haletant. Il présente par ailleurs de bonnes idées et des retournements de situations qui maintiennent læ lecteurice en haleine, comme le double cross d’un double cross...
On a toujours des chapitres du point de vue interne de l’antagoniste, à peu près 1 sur 3 désormais, ce que je trouve toujours original. Malheureusement, les méchants sont toujours montrés comme si nuls et pathétiques qu’on se demande en quoi ils représentent une menace.
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IV. Des personnages qui gagnent en consistance
Mathieu prend enfin un peu de matière. Il s’affirme un peu plus, il gagne en personnalité, il est toujours un peu Gary Stu mais il est plus nuancé. Mais les efforts mis pour le faire paraître héroïque, le rendent en fait un peu inhumain. Je pense notamment à la scène où il est au milieu d’un champ de cadavres et vient d’assister à un meurtre, et où il est à peine impressionné.
Florine aussi, mais je trouve son développement décevant et superficiel. Elle n’a aucune volonté ou identité propre. Elle est tellement faible qu’un BÉBÉ (Sol) qui suce encore son pouce doit lui servir de garde du corps ?! Elle sert à apporter à manger ou faire des tâches ménagères, c’est tout. Et malheur à elle si elle tente de sortir de ce rôle : quand elle s’apprête à parler, on la coupe et on la renvoie car sa présence distrait Mathieu... Elle est donc punie pour l’attirance d’un garçon envers elle ! Florine a été décrite comme une enfant pendant tout le premier tome et là d’un coup, une semaine plus tard tout le monde la drague, notamment Basile, qui du coup baisse dans mon estime... Je rappelle que Florine a 13 ans et que Basile, vétéran de guerre, a au grand minimum deux fois son âge.
La romance Florine-Mathieu est d’ailleurs toujours aussi forcée : on ne développe aucune intimité entre les deux personnages, tout ce qu’on sait c’est que Florine est jolie et riche...
De nouveaux personnages moralement ambigus sont introduits, notamment Sylva la renarde, mon coup de coeur de ce tome, qui peut être définie en une phrase : “J'ai revendu leurs propres oeufs à des poules et volé leurs moustaches à des chiens de ferme".
Comme tous ses congénères, Sylvia n'appartenait à personne. [...] Depuis des années, la renarde se servait de son esprit rusé pour survivre. Il était dans sa nature de jouer double-jeu : dans chaque conflit, dans toute dispute, elle vendait toujours les secrets d'un camp à l'autre et vice-versa. C'était un jeu dangereux, mais dont elle était jusqu'à présent sortie gagnante."
Par ailleurs, tous les personnages sont intéressants et ont leur petite scène qui les caractérise, ce que je tiens à saluer car ça manquait beaucoup au premier tome.
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Bref, ce second tome était bien plus intéressant que le premier, mais je regrette que l’auteur n’étoffe pas davantage son propre univers et préfère à la place se reposer sur un contexte historique qu’il ne maîtrise pas.
Ma note : 9/20.
Rougemuraille : Cluny le Fléau
/!\ Attention : cette critique contient des spoilers mineurs sur l’intrigue. /!\
Pour une raison qui m’échappe (l’argent *kof kof*), en France, on aime bien découper en plusieurs tome des livres qu’on va ensuite nommer “intégrales”, afin de pouvoir vendre 30 euros un livre qui n’en vaudrait qu’entre 16 et 22, en persuadant læ lecteurice qu’iel fait une bonne affaire (mais si, 10 € le tome au lieu de 30 !!!). Cette review en trois partie est en fait celle d’un seul et même livre, à savoir le neuvième tome de la saga Rougemuraille (Redwall en anglais) de Brian Jacques.
Ca faisait un bail que je voulais lire Rougemuraille. Depuis le collège, à vrai dire. Il faut dire que les couvertures sont magnifiques : au CDI, Les Ombrenards et La Forteresse en péril m’avaient tout de suite tapés dans l’oeil. S., ma compagne de lecture dont je vous parle tout le temps, y ayant été plus sensible encore que moi : elle avait donc lu La Forteresse en péril, donc le tout premier tome de la saga, et m’avait dit de renoncer en avançant comme argument que le style était plat, et que ce n’était pas aussi bien qu’il n’y paraissait.
Il y a plusieurs milliers d’années, en septembre 2019, j’apercevais tous les tomes de la saga sur les étagères d’un ami dont c’était l’anniversaire. Je lui fis part de mes regrets de n’avoir pas cédé à l’époque à l’appel de ces jolies couvertures animalières médiévalisantes, et il me confia immédiatement neuf tomes (donc trois), en me disant que je les lui rendrai la prochaine fois qu’on se verrait. 
Je les ai toujours…
J’avais lu deux tomes, puis j’avais un peu laissé tombé vu que je n’accrochais pas. Mais comme je compte bien les lui rendre, j’ai décidé de me sortir les doigts du… menton, et de les lire une bonne fois pour toutes ! C’est chose faite pour le tiers (trois tomes, donc un… vous suivez toujours ?), puisque j’ai enfin fini hier Cluny le Fléau !
Tome 1 : Le Seigneur de la guerre
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Auteur : Brian Jacques
Maison d’édition : Mango
Date de publication : 1999 (édition), 1986 (original)
Nombre de pages : 190
Genre : Fantasy, historique
______________________________________________________________
Ce qu’en pense Naviss :
I. Une traduction française plat et inconstante
En lisant ce livre, j’ai compris ce que voulait dire mon amie S. lorsqu’elle me rapportait que le style est plat. Je ne sais pas si c’est la faute de l’auteur ou de la traductrice car je n’ai pas lu le livre en VO, donc il faudrait voir ce qu’en pense le lectorat anglo-saxon… Je penche quand même pour la traductrice, car il y a un certain nombre d’inconsistances au sein du livre qui me semblent vraiment être liées à des problèmes de traduction. Je pense notamment à la fouine Sac-d’os, le lieutenant du rat Cluny. Sac-d’os est genré au féminin jusqu’à ce qu’il ait enfin la parole, et se genre lui-même au masculin. Donc deux possibilités :
Ou bien l’auteur s’est dit en cours de route qu’une femme à un poste militaire, ça ne va pas. Je ne penche pas pour cette théorie, étant donné qu’on trouve plus tard des guerrières comme le moineau Becquerelle au tome 2 ou la musaraigne Ugmuray au tome 3.
Ou bien la traductrice est inconsistante, ce qui me parait être la théorie la plus vraisemblable.
Toujours sur la forme, j’ai apprécié des originalités comme le fait que la moitié des chapitres sont centrés sur Cluny, l’antagoniste, et en point de vue interne. Je ne vois pas ça souvent et j’ai trouvé cela intéressant.
II. Un lore prometteur, mais trop confus !
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Source. Sans déconner, ça donne pas envie ?
Ce qui fait la force de Rougemuraille, son attrait principal, si je puis dire, c’est la combinaison entre des animaux vaguement anthropomorphes et une Angleterre basse-médiévale voire de la première modernité pré-Réforme. Moi qui suis un fan du Robin des Bois de Disney, j’en suis ravi ! 
Le soucis, c’est qu’aucun de ces deux aspects ne semble avoir été pensé jusqu’au bout, ce qui crée un certain nombre de confusions, d’incohérences et d’anachronisme.
Sur le plan historique, d’une part, le roman collectionne les anachronismes. Cela ne me gênerait pas dans un univers purement fantasy, mais comme je l’ai dit, il nous pose un contexte réaliste historique : on est en Angleterre, on sait que la France existe puisqu’on nous la mentionne, on sait que le monastère de Rougemuraille est d’obédience catholique et qu’on y prie la Vierge et Jésus. Le roman cherche à recréer un réalisme médiéval, mais malheureusement ne va pas jusqu’au bout. Ainsi, les personnages mangent avec une fourchette alors que celle-ci ne se diffuse dans la société qu’au XVIIIe siècle. Avant cela, elle reste l’apanage exclusif des cours royales. La nourriture qui est consommée ne fonctionne pas du tout, il s’agit essentiellement de produits d’importation américaine qui n’étaient pas encore consommés à l’époque : la pomme de terre et la tomate par exemple. Le roman commence par un grand repas organisé à l’abbaye où tout le village semble être convié, ce qui donne lieu à des aberrations comme par exemple le fait que les hommes, dans l’abbaye, soient mélangés aux femmes, ou bien qu’on laisse performer des saltimbanques (dont un illusionniste !!) dans l’abbaye . 
Et parfois, certains éléments nous sortent complètement de ce bas Moyen Âge anglais réaliste, comme par exemple lorsque l’abbé nous parle tantôt de Dieu, tantôt des dieux, comme si l’auteur était incapable de se décider entre un univers de fantasy et un univers réaliste. 
Bref, même si la saga Rougemuraille a le potentiel d’introduire un jeune lectorat à l’histoire médiévale, elle échoue à cela à cause de son aspect incomplet. Ces romans utilisent des lieux communs ahistoriques concernant la société médiévale afin de créer un contexte exotique mais pas trop quand même, qui reste familier de ce que le lectorat croit connaître sur la période, mais elle demeure en fin de compte une introduction superficielle à l’histoire médiévale. Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous conseille l’article de Cynthia Rostankowski publié en 2003, The Monastic Life and the Warrior’s Quest: The Middle Ages from the Viewpoint of Animals in Brian Jacques’s Redwall Novels.
Cette indécision se sent également dans tout ce qui touche à l’animalité. Les tailles n’ont aucun sens. Par exemple, on nous explique que 400 rats sont stationnés à l’église Saint-Ninien, une petite église de campagne, ce qui signifie que l’église est à taille humaine et que les animaux ont des tailles d’animaux. Mais un peu plus tard, ces mêmes rats sont décrits comme montant à cheval - des chevaux adaptés à leur taille, j’entends. 
Parfois, tout le monde a l’air de faire plus ou moins la même taille, comme sur cette charte :
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Mais parfois, la différence de taille est vraiment tangible, comme ici.
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Et malheureusement, je trouve que ces inconsistances rendent difficiles le fait de se projeter dans cet univers : comment le faire quand tout change en permanence, quand on n’est jamais sûr-e ne serait-ce que de la taille des personnages les uns par rapport aux autres ?
III. Des personnages trop souvent sans saveur
Je vais déjà commencer par le protagoniste, la souris Mathieu, novice de Rougemuraille qui se découvre un lien avec le fondateur de l’ordre, le guerrier légendaire Martin. Je… n’aime pas Mathieu pour de multiples raisons, la principale étant qu’il est un Gary Stu. Il est l’Elu et ça sort de nulle part, il n’a pas le moindre défaut, il passe de souris timide à super guerrier de ouf sans transition, tout le monde l’aime, il contre les plans de Cluny sur des pressentiments…
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Est-ce que vous voyez son sourcil droit se froncer, alors qu’il essaie de paraître gentil et inoffensif ? Ton numéro ne marche pas avec moi, Mathieu !
Je n’aime pas du tout sa relation à Florine, une villageoise de l’âge de Mathieu et son intérêt romantique. Je la trouve d’une part inconsistante, comme si l’auteur ne savait pas très bien quel était le rapport entre ses personnages et que leur relation changeait d’une scène à l’autre. Et d’autre part, est-ce que c’était nécessaire de coller une romance à un futur moine ? C’est super forcé, on dirait que l’auteur voulait à tout prix caser un personnage romançable, mais sans faire l’effort de développer ladite romance. 
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En vrai j’ai bien envie de voir le dessin animé, leur romance y a l’air un peu plus intéressante…
Je trouve aussi super malaisant la façon qu’ont les personnages de « sexualiser » constamment Mathieu et Florine, en mode « regardez on dirait un couple s’occupant de leurs bébés » lorsqu’ils sont avec les jumeaux Souricis. Ce sont des enfants… ils ont 13 ans !! C’est pas mignon du tout de les imaginer avec des gosses à leur âge…
Les autres personnages secondaires sont sympathiques, sans plus. Un seul est véritablement au dessus du lot : Basile Lelièvre-Cerf. Il est stylé, grandiloquent, drôle, et c’est le plus caractérisé dans ses dialogues !
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Ne déborde-t-il pas de charisme ?
L’autre grand défaut, c’est Cluny. Cluny est un méchant cliché et sans aucune perspective. Je rigole pas, son objectif c’est, comme énoncé par lui-même, d’avoir un domaine avec des esclaves qui le servent, et son moyen pour y parvenir c’est de tuer tout le monde… Moins creusé, comme objectif, tu meurs !! Tous les antagonistes sont extrêmement décevants. Ils sont tellement tous montrés comme bêtes, incapables et désunis que c’est à se demander comment ils en sont arrivés jusque là, et en quoi ils représentent vraiment une menace…
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GREUHAHAHEUEHAHEUHHEU JE SUIS MÉCHAAAAANT.
Bref, pour résumer : un premier tome (ou un début de tome) plutôt plat, qui manque cruellement d’enjeux, et qui est d’autant plus décevant qu’il était prometteur.
Ma note : 3/20.
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navisseli · 3 years
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Rougemuraille : Cluny le Fléau
/!\ Attention : cette critique contient des spoilers mineurs sur l’intrigue. /!\
Pour une raison qui m’échappe (l’argent *kof kof*), en France, on aime bien découper en plusieurs tome des livres qu’on va ensuite nommer “intégrales”, afin de pouvoir vendre 30 euros un livre qui n’en vaudrait qu’entre 16 et 22, en persuadant læ lecteurice qu’iel fait une bonne affaire (mais si, 10 € le tome au lieu de 30 !!!). Cette review en trois partie est en fait celle d’un seul et même livre, à savoir le neuvième tome de la saga Rougemuraille (Redwall en anglais) de Brian Jacques.
Ca faisait un bail que je voulais lire Rougemuraille. Depuis le collège, à vrai dire. Il faut dire que les couvertures sont magnifiques : au CDI, Les Ombrenards et La Forteresse en péril m’avaient tout de suite tapés dans l’oeil. S., ma compagne de lecture dont je vous parle tout le temps, y ayant été plus sensible encore que moi : elle avait donc lu La Forteresse en péril, donc le tout premier tome de la saga, et m’avait dit de renoncer en avançant comme argument que le style était plat, et que ce n’était pas aussi bien qu’il n’y paraissait.
Il y a plusieurs milliers d’années, en septembre 2019, j’apercevais tous les tomes de la saga sur les étagères d’un ami dont c’était l’anniversaire. Je lui fis part de mes regrets de n’avoir pas cédé à l’époque à l’appel de ces jolies couvertures animalières médiévalisantes, et il me confia immédiatement neuf tomes (donc trois), en me disant que je les lui rendrai la prochaine fois qu’on se verrait. 
Je les ai toujours...
J’avais lu deux tomes, puis j’avais un peu laissé tombé vu que je n’accrochais pas. Mais comme je compte bien les lui rendre, j’ai décidé de me sortir les doigts du... menton, et de les lire une bonne fois pour toutes ! C’est chose faite pour le tiers (trois tomes, donc un... vous suivez toujours ?), puisque j’ai enfin fini hier Cluny le Fléau !
Tome 1 : Le Seigneur de la guerre
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Auteur : Brian Jacques
Maison d’édition : Mango
Date de publication : 1999 (édition), 1986 (original)
Nombre de pages : 190
Genre : Fantasy, historique
______________________________________________________________
Ce qu’en pense Naviss :
I. Une traduction française plat et inconstante
En lisant ce livre, j’ai compris ce que voulait dire mon amie S. lorsqu’elle me rapportait que le style est plat. Je ne sais pas si c’est la faute de l’auteur ou de la traductrice car je n’ai pas lu le livre en VO, donc il faudrait voir ce qu’en pense le lectorat anglo-saxon... Je penche quand même pour la traductrice, car il y a un certain nombre d’inconsistances au sein du livre qui me semblent vraiment être liées à des problèmes de traduction. Je pense notamment à la fouine Sac-d’os, le lieutenant du rat Cluny. Sac-d’os est genré au féminin jusqu’à ce qu’il ait enfin la parole, et se genre lui-même au masculin. Donc deux possibilités :
Ou bien l’auteur s’est dit en cours de route qu’une femme à un poste militaire, ça ne va pas. Je ne penche pas pour cette théorie, étant donné qu’on trouve plus tard des guerrières comme le moineau Becquerelle au tome 2 ou la musaraigne Ugmuray au tome 3.
Ou bien la traductrice est inconsistante, ce qui me parait être la théorie la plus vraisemblable.
Toujours sur la forme, j’ai apprécié des originalités comme le fait que la moitié des chapitres sont centrés sur Cluny, l’antagoniste, et en point de vue interne. Je ne vois pas ça souvent et j’ai trouvé cela intéressant.
II. Un lore prometteur, mais trop confus !
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Source. Sans déconner, ça donne pas envie ?
Ce qui fait la force de Rougemuraille, son attrait principal, si je puis dire, c’est la combinaison entre des animaux vaguement anthropomorphes et une Angleterre basse-médiévale voire de la première modernité pré-Réforme. Moi qui suis un fan du Robin des Bois de Disney, j’en suis ravi ! 
Le soucis, c’est qu’aucun de ces deux aspects ne semble avoir été pensé jusqu’au bout, ce qui crée un certain nombre de confusions, d’incohérences et d’anachronisme.
Sur le plan historique, d’une part, le roman collectionne les anachronismes. Cela ne me gênerait pas dans un univers purement fantasy, mais comme je l’ai dit, il nous pose un contexte réaliste historique : on est en Angleterre, on sait que la France existe puisqu’on nous la mentionne, on sait que le monastère de Rougemuraille est d’obédience catholique et qu’on y prie la Vierge et Jésus. Le roman cherche à recréer un réalisme médiéval, mais malheureusement ne va pas jusqu’au bout. Ainsi, les personnages mangent avec une fourchette alors que celle-ci ne se diffuse dans la société qu’au XVIIIe siècle. Avant cela, elle reste l’apanage exclusif des cours royales. La nourriture qui est consommée ne fonctionne pas du tout, il s’agit essentiellement de produits d’importation américaine qui n’étaient pas encore consommés à l’époque : la pomme de terre et la tomate par exemple. Le roman commence par un grand repas organisé à l’abbaye où tout le village semble être convié, ce qui donne lieu à des aberrations comme par exemple le fait que les hommes, dans l’abbaye, soient mélangés aux femmes, ou bien qu’on laisse performer des saltimbanques (dont un illusionniste !!) dans l’abbaye . 
Et parfois, certains éléments nous sortent complètement de ce bas Moyen Âge anglais réaliste, comme par exemple lorsque l’abbé nous parle tantôt de Dieu, tantôt des dieux, comme si l’auteur était incapable de se décider entre un univers de fantasy et un univers réaliste. 
Bref, même si la saga Rougemuraille a le potentiel d’introduire un jeune lectorat à l’histoire médiévale, elle échoue à cela à cause de son aspect incomplet. Ces romans utilisent des lieux communs ahistoriques concernant la société médiévale afin de créer un contexte exotique mais pas trop quand même, qui reste familier de ce que le lectorat croit connaître sur la période, mais elle demeure en fin de compte une introduction superficielle à l’histoire médiévale. Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous conseille l’article de Cynthia Rostankowski publié en 2003, The Monastic Life and the Warrior's Quest: The Middle Ages from the Viewpoint of Animals in Brian Jacques's Redwall Novels.
Cette indécision se sent également dans tout ce qui touche à l’animalité. Les tailles n’ont aucun sens. Par exemple, on nous explique que 400 rats sont stationnés à l’église Saint-Ninien, une petite église de campagne, ce qui signifie que l’église est à taille humaine et que les animaux ont des tailles d’animaux. Mais un peu plus tard, ces mêmes rats sont décrits comme montant à cheval - des chevaux adaptés à leur taille, j’entends. 
Parfois, tout le monde a l’air de faire plus ou moins la même taille, comme sur cette charte :
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Mais parfois, la différence de taille est vraiment tangible, comme ici.
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Et malheureusement, je trouve que ces inconsistances rendent difficiles le fait de se projeter dans cet univers : comment le faire quand tout change en permanence, quand on n’est jamais sûr-e ne serait-ce que de la taille des personnages les uns par rapport aux autres ?
III. Des personnages trop souvent sans saveur
Je vais déjà commencer par le protagoniste, la souris Mathieu, novice de Rougemuraille qui se découvre un lien avec le fondateur de l’ordre, le guerrier légendaire Martin. Je... n’aime pas Mathieu pour de multiples raisons, la principale étant qu’il est un Gary Stu. Il est l’Elu et ça sort de nulle part, il n’a pas le moindre défaut, il passe de souris timide à super guerrier de ouf sans transition, tout le monde l’aime, il contre les plans de Cluny sur des pressentiments...
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Est-ce que vous voyez son sourcil droit se froncer, alors qu’il essaie de paraître gentil et inoffensif ? Ton numéro ne marche pas avec moi, Mathieu !
Je n’aime pas du tout sa relation à Florine, une villageoise de l’âge de Mathieu et son intérêt romantique. Je la trouve d’une part inconsistante, comme si l’auteur ne savait pas très bien quel était le rapport entre ses personnages et que leur relation changeait d’une scène à l’autre. Et d’autre part, est-ce que c’était nécessaire de coller une romance à un futur moine ? C’est super forcé, on dirait que l’auteur voulait à tout prix caser un personnage romançable, mais sans faire l’effort de développer ladite romance. 
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En vrai j’ai bien envie de voir le dessin animé, leur romance y a l’air un peu plus intéressante...
Je trouve aussi super malaisant la façon qu’ont les personnages de « sexualiser » constamment Mathieu et Florine, en mode « regardez on dirait un couple s’occupant de leurs bébés » lorsqu’ils sont avec les jumeaux Souricis. Ce sont des enfants... ils ont 13 ans !! C’est pas mignon du tout de les imaginer avec des gosses à leur âge...
Les autres personnages secondaires sont sympathiques, sans plus. Un seul est véritablement au dessus du lot : Basile Lelièvre-Cerf. Il est stylé, grandiloquent, drôle, et c’est le plus caractérisé dans ses dialogues !
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Ne déborde-t-il pas de charisme ?
L’autre grand défaut, c’est Cluny. Cluny est un méchant cliché et sans aucune perspective. Je rigole pas, son objectif c’est, comme énoncé par lui-même, d’avoir un domaine avec des esclaves qui le servent, et son moyen pour y parvenir c’est de tuer tout le monde... Moins creusé, comme objectif, tu meurs !! Tous les antagonistes sont extrêmement décevants. Ils sont tellement tous montrés comme bêtes, incapables et désunis que c’est à se demander comment ils en sont arrivés jusque là, et en quoi ils représentent vraiment une menace...
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GREUHAHAHEUEHAHEUHHEU JE SUIS MÉCHAAAAANT.
Bref, pour résumer : un premier tome (ou un début de tome) plutôt plat, qui manque cruellement d’enjeux, et qui est d’autant plus décevant qu’il était prometteur.
Ma note : 3/20.
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navisseli · 3 years
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Bérénice
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Auteur : Jean Racine
Maison d’édition : Belin / Gallimard
Date de publication : 2017 (édition), 1670 (originale)
Nombre de pages : 159
Genre : théâtre, tragédie
___________________________________________________________
Ce qu’en pense Naviss :
Que c'est beau ! Contrairement à Phèdre, l’autre pièce de Racine que j’avais lu juste avant Bérénice, y a ici un enjeu tangible : la légitimité chancelante d’un jeune empereur qui doit renoncer à son amoureuse de longue date pour respecter les lois de son peuple. Et quelle amoureuse ! Bérénice est badass, fière, elle connait sa valeur et ne se laisse pas marcher sur les pieds par son mec qui change d’avis comme de chemise, tout empereur des Romains fut-il. Les personnages en général sont très vivants, très profonds, très attachants. 
Sauf peut-être... Antiochus. Je l’ai trouvé insupportable. Antiochus est décrit comme un amant maudit qui reste l’ami fidèle de Bérénice et Titus, même s’il est amoureux de Bérénice, mais il a quand même des grosses « nice guy vibes », genre le gars tout son stratagème c’est d’être là pour Bérénice pendant qu’elle se remet de son chagrin d’amour pour pouvoir la pécho ensuite, et il se vexe quand elle le rejette alors qu’il vient littéralement lui annoncer qu’elle se fait larguer ? Il est tellement intéressé !
Mais bon, même lui n’est pas complètement à jeter : Antiochus se remet en question et la pièce nous montre qu’il était surtout sous la mauvaise influence de Paulin.
Bref, une très belle tragédie.
Ma note : 14/20.
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navisseli · 3 years
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Phèdre
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Auteur : Jean Racine
Maison d’édition : Belin / Gallimard
Date de publication : 2015 (édition), 1677 (originale)
Nombre de pages : 196
Genre : théâtre, tragédie
___________________________________________________________
Ce qu’en pense Naviss :
Phèdre est une pièce magnifiquement écrite, avec des personnages intenses - mon chouchou reste Hippolyte, qui est un bon gars dans ses actions malgré ce que tout le monde dit sur lui, et qui a de très jolies tirades. Sa relation à Phèdre est très intéressante : elle est certes techniquement sa belle-mère, mais ils ont le même âge, ils ne se sont jamais rencontrés, et il n’y a aucun rapport de force entre eux. 
Par contre... tant de drama pour au final pas grand chose ! Mais bon, c'est souvent le propre de la tragédie...
Ma note : 13/20.
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navisseli · 3 years
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Mélusine, tome 6 : Farfadets et korrigans
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Auteurs : Clarke et François Gilson
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 1999
Nombre de pages : 46
Genre : BD, humoristique, fantastique
___________________________________________________________
Ce qu’en pense Naviss :
Une BD inventive et amusante, dont l'humour repose souvent sur des décalages : parfois, ça marche, et parfois, ça tombe à plat. Il y a moins de male gaze sur ce tome que sur les volumes précédents (c'était déjà le cas au tome d'avant), mais il y en a toujours un peu, c'est dommage.
Ma note : 9/20.
1 note · View note
navisseli · 3 years
Text
Mélusine, tome 5 : Philtres d'amour
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Auteurs : Clarke et François Gilson
Maison d’édition : Dupuis
Date de publication : 1998
Nombre de pages : 48
Genre : BD, humoristique, fantastique
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Ce qu’en pense Naviss :
Imaginatif et cocasse, j’ai apprécié retrouver Mélusine dans ce tome, même si l’humour tombe parfois un peu à plat. Beaucoup moins d’hypersexualisation dans ce tome : même s’il y en a toujours un peu avec la Güdrün, c’est bien moins présent que précédemment. Un extra point pour cette planche, dont l’histoire est ma préférée :
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Ma note : 10/20.
4 notes · View notes
navisseli · 3 years
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Partie II. Une monarchie pas trop beaucoup parlementaire
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Les principaux problèmes historiques ayant été évacués, penchons nous à présent sur l’autre grosse faiblesse de l’univers d’American Royals : la description de sa société étatsunienne sous une monarchie. C’est là que les inspirations de l’autrice sont rapidement limitées, car il est clair qu’elle a été déchirée entre l’envie de créer un univers inspiré de la monarchie britannique (plusieurs chapitres concernant la princesse Béatrice sont extrêmement réminiscents de The Crown) et son envie de raconter une histoire bien plus légère, bien plus soap, plein de drames et de passions entrecroisées. Le soucis, c’est qu’en refusant de trancher en faveur de l’un ou de l’autre, on se retrouve avec un entredeux un peu étrange qui a selon moi un des pires défauts de worldbuilding : le flou le plus total et ses conséquences. Tout est si emmêlé dans ce roman que je m’excuse par avance si cette partie est un peu bordélique.
Militer et lutter pour ses droits
J’en ai déjà beaucoup parlé dans la première partie, mais je reviens quand même un peu dessus. Disons que c’est à titre de transition.
La société d’American Royals est une société multiculturelle à l’image de la notre : existent en son sein une variété d’ethnies, d’orientations sexuelles et de cultures qui vivent dans une relative harmonie sous l’égide bienveillante de la monarchie. Elles sont même plutôt intégrées puisque l’une des anciennes chambellan de Sa Majesté est une femme latina ouvertement lesbienne, mariée avec une autre femme. Cela signifie donc qu’il y a eu des luttes sociales et politiques en faveur des droits des femmes, des LGBTQI+ et des personnes latine qui sont parvenues à percer jusqu’aux plus hautes sphères. Comme dit auparavant, il y a aussi des personnes racisées dans la noblesse. Je me pose une question tout de même... Comment c’est arrivé, étant donné que le roman nous montre lui-même que le racisme est encore bien ancré dans ce pays ? Et, comme on le verra plus tard, le pays est d’un conservatisme encore bien agressif. Si on se fie aux quelques explications que j’ai déjà soulevées, la solution est venue d’une mesure politique de la monarchie. Un chapitre entier est consacré à la façon dont le roi écoute les critiques de son peuple, ce qui aurait mené entre autres aux duchés amérindiens, souvenez vous. On peut supposer qu’il en va de même pour les droits des femmes et des personnes queer.
Le soucis, c’est que ça réduit des histoires de luttes complexes, jalonnées d’horreur perpétrées par les dominants, à de simples remarques qui suffisent à changer le monde. Encore un biais actuel plaqué sur le passé, oui, mais avec d’autres conséquences. Interrogez les Afro-américains sur le massacre de Tulsa ou les personnes LGBTQI+ sur Stonewall. La solution aux discriminations et aux violences ne viennent jamais des pouvoirs politiques, bien au contraire, elle vient des gens concernés qui se battent, se font incarcérer ou assassiner pour oser revendiquer ces droits. En général, la reconnaissance politique s’applique à une société qui a déjà acté le changement de paradigme, et là, on fait des lois. Aujourd’hui, on enseigne le combat de Martin Luther King dans les écoles, et il nous semble légitime d’assurer avec confiance que c’était un combat juste. Il a quand même été assassiné pour ses idées et à l’époque de ses combats, il a été vu comme une menace par beaucoup de blancs.
Je me perds sans doute en conjectures, mais on ne peut pas nous présenter une société similaire à la notre née d’une monarchie sans nous donner un minimum de contexte et d’explications. Le problème vient encore une fois des justifications de l’autrice pour légitimer son système monarchique : le roi est à l’écoute et ouverts aux critiques. Sauf qu’en montrant cela, encore une fois, on réécrit l’histoire des groupes d’opprimés pour améliorer l’image de leurs oppresseurs. Expliquer que les droits des gens, c’est grâce au roi et pas grâce aux manifestations, aux morts et surtout aux personnes concernées dans un univers si proche du notre, c’est un non catégorique. Délégitimer des luttes car “c’est du bon sens” pour asseoir le peu de légitimité de son système monarchique, non plus ! En vrai, une phrase dit bien que les contestations naissent “en dehors de la monarchie”, mais c’est vraiment comme balayer les cendres sous le tapis à ce niveau tellement c’est vague...
Quelle est la légitimité de la monarchie étasunienne ?
Pour commencer simple, disons que la légitimité d’un pouvoir monarchique a souvent une base religieuse. Pour reprendre l’inspiration de l’autrice, à savoir la monarchie britannique, la reine est actuellement la cheffe de l’Eglise anglicane, une sorte d’équivalent au pape tout de même. Si je reprends l’histoire de la monarchie que je connais le mieux (la monarchie française), la légitimité du roi vient de son sacre : son autorité est transmise directement par Dieu durant la cérémonie. Inaugurons la festival des réponses vagues en répondant au titre de cette sous-partie. Alors, la légitimité de cette monarchie est-elle religieuse ?
Oui et non.
Ah...
Mais que dit le roman au juste ?
“Constitution américaine. Article I : La Couronne
A la tête de l’Etat, le roi est le symbole de son unité, de sa gloire et de sa pérennité. Le jour de son intronisation, le roi reçoit la charge divine de gouverner le royaume dans le respect de ses lois et de protéger les droits de ses sujets. [...]”
American Royals, Page 517 (ebook)
Pas besoin d’explications, le terme “charge divine” est suffisamment clair. Sauf que plus tard...
“Dans d’autres pays, les nouveaux souverains étaient couronnés par des prêtres, dans des églises. Ce n’était pas le cas en Amérique, où l’Etat restait l’Etat, en dehors de toute entité religieuse. Ici, les monarques se couronnaient eux-mêmes.”
American Royals, page 636 (ebook)
Pardon ? “Reçoit la charge divine de gouverner le royaume” c’est pas tellement l’Etat séparé de la religion. Et apparemment cet article de la constitution est encore en vigueur donc... quoi ?! Relire coup sur coup ces deux passage me fait encore me demander comment cette incohérence a pu passer à la relecture. Sans parler de l’orbe crucifère, un symbole religieux très important, au sein du trésor de la couronne au même titre que la main de la justice, mais bon on est pas à un détail près dans ce roman... Au passage, si cette édition de la constitution est actuelle, la princesse Béatrice ne pourrait pas régner, car il est bien dit “le roi”. Je ne suis pas juriste, mais de mémoire, quand on veut changer un article de la constitution... on met à jour la constitution avec les nouveaux termes. C’est pas juste un vieux papier qu’on met dans un musée pour faire joli une constitution, c’est la base fondatrice de ta nation. Bon et puis une monarchie de droit divin laïque, ça a au moins le mérite d’être original...
Bon du coup, impasse. On ne sait pas si la légitimité est religieuse du coup, mais a priori non.
L’institution aristocratique alors ?
Ce n’est pas très bien détaillé, mais le royaume semble fonctionner sur des institutions aristocratiques qui font très ancien régime. Autrement dit, le roi règne sur des ducs, qui ensuite ont autorité sur d’autres nobles disposant d’un fief de taille variable. On a donc un peu en vrac des ducs, des comtes, des marquis. Le tout semble extrêmement hiérarchisé.
La princesse Béatrice, héritière du trône, est sommée d’épouser un duc et rien d’autre. Donc pas de nobles de “qualité inférieure”. Le but affiché est de montrer la stabilité du royaume en se mariant avec un rang comparable. Une critique qui m’a fait beaucoup rire résume très bien la situation :”on lui demande d’épouser un titre pourvu d’un pénis”. Sous-entendu, un mariage autre aurait des conséquences néfastes sur l’institution monarchique. C’est donc bien qu’il y a un risque et une nécessité de conserver un status quo. Par ailleurs, il est clairement montré qu’habituellement les mariages des princes et princesses suivent des directives diplomatiques, en épousant des princes et princesses étrangers, en but d’établir des alliances, et au sein du royaume. Il est sous-entendu que les mariages entre nobles et roturiers sont proscrits sous peine de perdre ses titres.
Au début du roman, alors que tous les fils de ducs font des ronds de jambes à la princesse Béatrice, il nous est expliqué que la royauté étatsunienne a une vie de cour : les nobles résident au moins une partie de l’année à la capitale pour fréquenter la famille royale. Le but n’est pas clairement expliqué et les motivations ne sont pas bien établies (ça commence à devenir une habitude), car c’est tout de même un certain investissement financier conséquent.
Oui c’est vrai que ça fleure la monarchie absolue d’un autre temps, personnellement ça m’évoque énormément la monarchie absolue de Louis XIV au XVIIème siècle. En ce qui concerne les mariages entre nobles, ils ont plusieurs raisons d’être. La première est de transmettre un titre : il faut un héritier, mâle de préférence, qui pourra le reprendre à la mort du tenant actuel. Avec le titre, on transmet souvent des prérogatives, des terres et un patrimoine. C’est bien pour cela que Béatrice se marie avant tout. Le roman aura beau épiloguer sans fin sur la nécessité de régner avec quelqu’un à ses côtés pour tenir le choc, le but est de produire des héritiers légitimes, sous entendu par le sang, au sein d’un mariage. Cela démontre un attachement particulier aux institutions. Le second but est davantage politique. En empêchant les mariages entre nobles et roturiers, on perméabilise les classes sociales en les rendant hermétiques : c’est un moyen de conserver son pouvoir et ses privilèges en s’assurant qu’ils restent toujours au sein des castes dirigeantes. Cette partie semble relativement solide mais entre en contradiction, encore une fois, avec l’image que le roman veut donner de cette famille royale progressiste qui écoute son peuple et permet à des minorités de casser le plafond de verre et acquérir de hautes fonctions. Si une femme lesbienne latina sans aucun titre peut obtenir un tel poste (tout en étant une superbe vitrine pour la politique du roi), quel intérêt de conserver des règles si archaïques qui ne sont de toute façon plus nécessaires pour protéger les prérogatives de la noblesse ? On en est même plus là, car à ce stade, cela sous-entendrait que les mariages homosexuels sont interdits pour les nobles (puisqu’un des buts est la production d’héritiers de sang). Et donc que le peuple possède plus de droits que la noblesse ? En vrai, pourquoi pas, mais ce n’est pas exactement un développement intéressant, c’est un prétexte. La réponse est simple en fait... Si on enlève ces règles stupides cela nous prive de deux romances impossibles au sein de l’intrigue, dont celle de l’héritière en personne... A priori ça créé tout un tas d’incohérences mais bon, apparemment ce n’est pas grave.
Et pourtant, la noblesse tient tellement à ses prérogatives néfastes (à ce stade c’est masochiste), que pour les conserver, il y a même une cour. Enlevez tout de suite vos images de belles soirées avec des dames en robe à crinoline et des messieurs en queue de pie qui bavardent gaiement en mangeant des amuse-gueule et qui se racontent en chuchotant les derniers potins. Une cour, à quoi ça sert ? Globalement, si je me fie à mes connaissances sur Louis XIV et si j’en crois les dires de Monsieur de La Boétie, un grand ami de Montaigne et grand détracteur des rois de France, une cour est un outil politique dont le roi use pour contrôler la noblesse. En gros, le roi s’arroge le droit d’attribuer des titres (un titre de noblesse qui va avec une terre) et des charges (sorte de postes rémunérés à la cour, comme un poste de ministre ou encore d’organisateurs de soirée, parce que les nobles aussi ont besoin de flouze, ça coute cher d’entretenir des terres) à qui bon lui semble. Sauf que pour que le roi vous remarque et donc pense à vous donner un titre ou une charge, il faut être vu et apprécié, ce qui implique de vivre en permanence près de lui (en louant une chambre au palais ou en faisant construire une résidence proche, selon vos moyens) et surtout se plier en quatre pour lui faire plaisir. Ainsi occupé, vous n’avez plus le temps ou l’argent pour fomenter des révoltes, et plus aucun intérêt à vous dresser contre le roi. Il vous surveille, et en plus vous payez pour ça. La vie d’un courtisan est contraignante au possible en plus d’être un gouffre financier sans aucune garantie de retour sur investissement (il faut payer les tenues, le fiacre et la résidence, et sans être sure que le roi vous donne une charge et une rente). Donc quand on est courtisan, on est là pour une TRES bonne raison.
Dans American Royals, quand les ducs viennent courtiser Béatrice, on est certes dans un contexte particulier où chacun va venir pour tenter d’obtenir la main de l’héritière. Mais apparemment, ils ont tous une résidence à la capitale. Et bien, ils sont vraiment pêtés de tunes les nobles étatsunien (et le fils de duc Teddy, soit disant complètement ruiné qui peine à payer sa maison dans sa région natale, il fait comment pour rester à la capitale ? Il dort sous un pont et se chauffe avec un feu de bidon ?) parce que quand tu n’as pas les moyens, pas de vie de cour, faudrait voir à pas trop finir sur la paille quand même. Et si ils sont là une partie de l’année hors parade nuptiale royale, c’est qu’ils attendent quelque chose du roi. Un titre ? Une charge ? Une rente ? On ne dirait pas. A aucun moment il n’est indiqué que le roi a besoin de garder les nobles sous sa coupe, qu’ils sont une potentielle menace si lâchés dans la nature. Mais il faut quand même que Béatrice épouse un duc parce que... scénario ! Ce qui signifie aussi que les grands de ce pays claquent de l’argent par millions juste pour passer du temps avec la famille royale... quelques soirées par an seulement, et pas forcément à la capitale. Le roi et la reine doivent être d’une compagnie absolument délicieuse.
L’héritage historique ça pourrait le faire. Après tout, ils descendent de Georges Washington, le fondateur du pays ! Insuffisant, ce genre d’héritage, relativement pauvre n’aurait pas permis à lui tout seul de faire surgir un régime, surtout si ils ont du renoncer à un titre d’empire (c’est sous-entendu bien sur, mais au vu des indices, on ne peut que déduire que c’est un ancien empire). Regardez le Second Empire français ou le titre d’empereur des Indes chez les Britanniques, qui ont tout deux fini par chuter alors qu’ils jouissaient tout d’eux d’une histoire nationale qui étaient de vrais vecteurs d’union nationale... L’histoire pourrait créer un sentiment d’union nationale (comme dans le vrai monde quoi), mais ne peut pas légitimer toute seule une monarchie.
La dictature alors ? Le roi pourrait contrôler les médias et les forcer à sortir une propagande d’Etat formatée avec un pouvoir basé sur une répression armée. Ah bah non, on est dans une monarchie sympa donc on ne sait pas qui gouverne l’armée et la liberté de la presse est totale.
Donc là non plus ça ne marche pas, car il n’y a aucune contrainte expliquant comment la monarchie tient. Les nobles ne sont pas chiants et n’ont pas d’intérêts politiques à défendre. Mais bon sang de bois comment il peut encore y avoir une monarchie dans un monde pareil ???
Le véritable amour est plus fort que tout
Non, je ne parle pas de la relation entre Béatrice et son garde du corps (je garde ça pour la partie III), mais bien de la relation qu’entretient la famille royale avec son peuple.
La famille royale est aimée, adorée même. Toute la presse est à leur chevet, les gens ne s’imaginent pas vivre avec autre chose (”des élections mais vous n’y pensez pas huhuhuh”), à tel point que quand le roi est à l’hôpital les gens sont figés devant leur télé à pleurer toutes les larmes de leur corps (je sais vu de France c’est surréaliste, mais pas si bizarre). De ce qu’on voit, il n’y a pas réellement d’opposition, des groupes antimonarchistes qui utiliseraient le moindre bout d’argument pour discréditer la famille royale, pas même l’ombre d’une revue anarcho-communiste. Du coup, la seule réponse qu’il nous reste est la suivante : la légitimité de la monarchie étatsunienne est l’amour que le peuple porte à son roi. Oui, le même type qui a un pouvoir absolu mais ne le partage pas mais en fait si (on va en reparler).
Il suffit de voir l’attachement des membre de la famille royales aux sorties publiques, aux déclarations dans la presse, à l’image de leurs enfants sur les réseaux sociaux. Justifier un régime uniquement par l’amour du peuple, ça ne tient pas deux minutes, mais c’est ce qui est montré donc admettons... Sauf que plusieurs éléments viennent mettre à mal cet état de fait.
La princesse Béatrice a été élevée pour devenir la prochaine reine. Elle est respectueuse des convenances, bien sous tout rapport, ne rechigne pas trop à se montrer. Ce sont ces qualités de monarque qui lui ont été enseignées : en tant que future reine, elle doit être médiatiquement irréprochable.
Son père, le roi, dans une conversation privée, qui va juste dire “On s’en fiche de l’opinion publique.” Attends quoi ?! J’ai oublié le contexte exact de cette citation (il y a tellement de trucs qui m’ont hérissée je peux pas me souvenir de tout), mais en réfléchissant deux secondes, impossible qu’il puisse dire ça, si ce n’est pour plaisanter. Sauf que non, il était sérieux ! Si ta seule légitimité c’est l’approbation de ton peuple, aller contre lui c’est être sûr de se retrouver avec une forêt de torches et de de fourches devant la porte du palais dès le lendemain. Et au passage prendre un risque vital à chaque réforme proposée mais passons.
Heureusement que le roi meurt à la fin et empêche sa fille de faire une grosse connerie sinon la princesse Béatrice resterait dans l’histoire comme celle qui a fait tomber la monarchie par sa seule stupidité ! Par amour pour son petit-ami/garde du corps roturier ultra toxique, elle envoie chier son fiancé, un duc, et va contre la loi en souhaitant épouser un roturier. Bon déjà, elle est bien gentille mais une loi ça se modifie pas comme ça, même dans une monarchie (même Louis XIV, le boss final des monarques absolus, ne faisait pas que ce qu’il voulait et Henri VIII a carrément dû changer de religion et foutre tout son peuple dans la merde en plus de créer des crises diplomatiques, juste pour pouvoir divorcer). Ensuite, dans une monarchie où son pouvoir tient à l’affection de ses sujets et a priori un relatif contrôle de la noblesse, elle veut envoyer chier les nobles et l’opinion publique (le peuple était dingue de ces fiançailles). Naturellement, le roi fait un malaise en entendant ça, parce que reformulé ça donnerait ça “Papa, je veux perdre toute légitimité et donner aux gens une raison de se rappeler que notre pouvoir repose sur pas grand chose”. Oui, elle a une soeur qui pourrait reprendre le relais en cas d’abdication, mais ce n’est pas le problème !
Mais comment cette monarchie qui ne repose sur rien a pu survivre à deux siècles si les monarques se contrefoutent de leur seule légitimité ? Le roman fait un problème de la raison d’Etat dans la storyline de Béatrice mais s’évertue à prouver que ce n’est pas un réel problème. Donc aucune légitimité stricte, le peuple est donc composé de millions de blaireaux qui apprécient de se faire gouverner par une bande de truffes. Chaque régime, peu importe sa forme existe parce qu’il se trouve une légitimité. La seule conclusion logique ici est que l’amour du peuple pour le roi est plus fort que tout. Car dans American Royals, la monarchie est si naturelle qu’elle ne PEUT PAS être remise en question, même si elle ne repose sur rien.
Comparons avec la monarchie britannique. Si on devait résumer son histoire depuis le début du XXème siècle, je propose le titre “S’adapter ou mourir”. Durant la Première Guerre Mondiale, ils ont même dû changer de nom de famille pour éviter un retour de bâton de l’opinion publique. En effet, le nom de l’époque, Saxe-Corbourg-et-Gotha, en plus de méchamment sonner allemand, était également le nom de ceux qui larguaient des bombes sur la tronche des anglais. Du coup ils ont changé pour Windsor, afin d’éviter de se faire déposer à la fin du conflit. Ils ont eu raison au vu de ce qui est arrivé au Kaiser allemand et à l’empereur d’Autriche, voire même au Tsar russe... Le Prince Philipp, mort récemment, a consacré sa vie à faire bonne presse et moderniser l’image de la famille royale malgré quelques “dérapages” (humhum...) pas toujours contrôlés. Les problèmes conjugaux de Charles et Diana sont devenus un enjeux de communication d’Etat, de même que la mort de la princesse (regardez The Queen, de Stephen Frears, qui résume en quoi sa mort a été un enjeux majeur pour la monarchie). Pourquoi croyez-vous que Buckingham prend tellement à coeur la scandaleuse saison 4 de The Crown (qui parle de Lady Di comme par hasard) ou que les révélations de Meghan et Harry donnent des sueurs froides à la presse britannique ? Parce que l’opinion publique, c’est important. Et encore, Elizabeth II a une légitimité certaine à la tête de l’Etat (par rapport au Commonwealth entre autres) alors qu’elle exerce un rôle essentiellement représentatif. Donc imaginez un régime avec un roi disposant d’un pouvoir concret qui ne repose QUE sur l’opinion publique. La moindre contestation ferait chuinter dans les oreilles du roi le doux son de la guillotine.
Quoi les pouvoirs du roi ? Eh bien on y vient, mais je vous préviens, ça va pas être beau à voir. Vous aviez déjà l’impression qu’on était en train de démonter un beau brûlot monarchiste ? Eh ben c’est pas fini !
Mais kikifé le roi en fait ?
Si depuis le début je spécule sur le fait que ce soit une monarchie parlementaire, c’est parce qu’aucune réponse claire n’est donnée (décidément). Vu que les inspirations de l’autrice vont clairement vers la monarchie britannique, je suppose donc qu’on est sur une monarchie parlementaire où le roi a un pouvoir exécutif, et que le Congrès représente l’organe législatif. C’est confirmé bien tard dans le roman, mais confirmé. Ouf ! Donc monarchie constitutionnelle !
Oui et non. Incohérence : le retour de la vengeance !
Déjà, la cour. On ne courtise pas un roi qui n’a qu’un pouvoir exécutif, on courtise un roi qui peut te filer des terres et de la thune. Sauf que personne n’a l’air là pour ça et que les possessions de la famille royale ont l’air d’être des possession de l’état. Je vois donc difficilement donner à ses nobles quelque chose qui ne lui appartient pas vraiment sans que la moitié du Congrès saute au plafond. Surtout que de ce qu’on voit, les seuls titres donnés sont symboliques, et pas accompagnés de rentes ou de terres.
Quand Samantha nous parle des occupations de son roi de père, elle évoque des rapports, un service de presse, des organisations de charité... Si tu as besoin d’institutions de charité gérées par toi même alors tu as du pouvoir c’est vraiment que tu fais mal ton job... Mais surtout, il a que ça à foutre le roi ? Lire les rapports ? Il devrait pas, moi je sais pas... appliquer les mesures du Congrès en mobilisant les services publics ? La police ? L’armée ? “Quoi la guerre ? Une seconde messieurs mon responsable de presse me dire que j’ai un problème d’image alors vos missiles ça peut attendre”. Je pense que les conseils des ministres ça doit être fun avec un roi qui se contente de lire les rapports et faire des soirées caritatives...
Plus tard, encore dans le fameux chapitre sur la critique du pouvoir, le roi dit qu’il reçoit des lettres de ses sujets qui se plaignent de mesures, de lois, et qu’il fait ce qu’il peut pour leur faire plaisir. Mettons que ses sujets ne soient pas au clair sur les prérogatives du roi (je les comprends, moi non plus !), c’est pas son boulot de s’occuper des lois, le sien c’est de les appliquer (ça veut dire ça exécutif). Je veux bien que le pouvoir exécutif puisse proposer des lois, mais une fois que c’est fait, ce n’est plus son problème, c’est celui du Congrès. A moins qu’il y ait aussi des 49.3 au royaume des Etats-Unis...
“Elire une reine ou un roi ? Quelle drôle d’idée ! Il était évident que les élections ne concernaient que les juges et les membres du Congrès. Quel désastre ce serait si la branche exécutive devait se plier aux exigences de tous les citoyens et les supplier de voter pour elle ! Un tel système n’attirerait que les loups aux dents longues et aux intentions inavouables.”
American Royals page 340 (ebook)
Parce qu’il est bien connu que ceux qui héritent du pouvoir juste grâce à leur naissance ont les intentions les plus pures qui soient ! Désolée j’ai pas pu m’en empêcher. Il n’y a que moi qui ait l’impression que ce paragraphe contredit complètement le précédent ? “Il faut écouter les demandes du peuple pour bien gouverner, mais si jamais ils veulent commencer à choisir qui les dirige, là ça devient ridicule !” Et puis je suis presque sure qu’on trouve des arrivistes chez les juges et les membres du congrès, ce serait naïf de croire le contraire. Mais attends, n’y aurait-il pas un personnage de noble arriviste dans ce roman ? Mais attends, mais si ! Donc ce passage n’a aucun sens !
J’ai fait quelques recherches sur la monarchie constitutionnelle. Il existe deux cas de figure. Le premier où le roi est chef théorique de l’exécutif : beaucoup de variants, mais souvent le roi ne forme pas le gouvernement et si il a un droit de regard sur les affaires de l’Etat, il est souvent cantonné à un rôle représentatif. Le deuxième où le roi a de réels pouvoirs, mais dans lesquels il nomme le gouvernement et propose les lois. Donc American Royals pioche un peu partout, mais sans donner de lignes très claires (j’ai l’impression de me répéter). Les membres du gouvernement sont élus (pouvoir exécutif théorique) mais le roi est roi par volonté divine (monarchie de droit divin) ou pas selon les pages. Il a un droit de regard sur ce qui se fait car il lit des rapports (pouvoir exécutif théorique) et propose des lois (pouvoir exécutif réel), quand il n’est pas trop occupé par sa comm ou ses organisations de bienfaisance (dont a priori il n’a pas le droit de s’occuper non plus, selon les pages). Vous trouvez ça confus ? Moi aussi... Bon après, sans doute que l’autrice a inventé son propre modèle, je ne critique pas ça. Mais y insuffler du sens et un minimum de cohérence, c’est trop demander ?
Mais au final, c’est quoi les Etats-Unis d’American Royals ?
Comme pour la partie I, je veux conclure rapidement sur la pertinence de mes sempiternelles démonstrations. Est-ce important de disserter des heures durant sur les incohérences politiques d’un bouquin de romance ? Contrairement à la partie I, je ne peux pas qu’invoquer la cohérence interne à une oeuvre, car le problème est ici un peu différent. Si on peut éventuellement mettre de côté le passif historique dans une histoire actuelle, que dire du contexte politique ? Comme vous l’avez vu, j’ai abordé des points clés de l’intrigue qui sont impactés par ce manque de rigueur et qui les font paraître bien artificiel. Davantage que dans la partie I. Comment puis-je me sentir en empathie avec le personnage de Béatrice, qui se prépare à devenir reine, si je ne sais pas ce que ça implique pour elle ? Ou pire, si je me rend compte que tout dans le contexte du roman créé des enjeux artificiels ? Si j’ai fait tout ce développement et que j’ai cherché les réponses, c’est parce que cela m’a gênée. Je parle d’un point de vue personnel, mais si jamais un univers doit s’adapter à ce que l’auteurice a décidé pour le personnage en sacrifiant la sogique, c’est un problème. On ne peut pas tout avoir. A tout hasard, un monde culturellement proche du notre mais avec une élite qui évolue encore selon des codes vieux de cent à quatre cent ans...
Et cela étant établit, je n’ai pas qu’aller au bout de mon raisonnement et me demander ce que cette oeuvre voulait dire. Quels étaient ses messages.
Quand on dit que toute oeuvre est politique, elle l’est dans le sens où l’oeuvre dépeint une société ainsi que le point de vue de son créateurice sur ladite société. Que ce soit la plus innocente des séries télévisées pour petits enfants ou la plus pointue des fictions cyberpunk. Ici, c’est pareil. L’autrice ne revendique aucune ligne politique vis-à-vis de son univers, si ce n’est un certain féminisme bourgeois, qui s’adresse aux femmes privilégiées (notamment sur la question du plafond de verre ou du double standard masculin/féminin). En revanche, son œuvre nous en apprend beaucoup sur les Etats-Unis tels que perçus ou fantasmés par l’autrice. Ou plutôt de l’Amérique...
Un truc qui m’agace prodigieusement en tant que professeur d’histoire et de géographie, c’est cette propension qu’on a tous à dire “Amérique” ou “Américains” pour qualifier le pays et ses ressortissants. Bah oui, parce qu’on a tellement l’habitude de le dire qu’on l’oublie mais “l’Amérique”, c’est un continent qui compte pas moins de trente-six états et six dépendances. Moi-même, en rédigeant cette chronique, j’ai du me faire violence pour écrire en permanence “Etats-Unis” et “étatsuniens” tellement ça parait peu naturel. Mais du coup pourquoi on fait l’amalgame ? Parce que les étatsuniens eux mêmes utilisent à profusion les termes “America” et “American”. Il est vrai qu’United States n’est pas un terme toujours facile à employer, mais on dégage quand même une ligne idéologique qui date de la guerre froide (pour ce que j’en sais, si ça se trouve c’est plus ancien). Les Etats-Unis sont une nation impérialiste qui impose sa suprématie par la force mais aussi par sa culture, et durant la guerre froide, le pays a fait tout ce qu’il a pu pour imposer sa domination sur le reste du continent en en faisant sa chasse gardée face au bloc soviétique. Sauf que là aussi ça a été moche. Comme les Natifs avant eux, les Etats d’Amérique du sud et centrale en ont pris plein la figure et aujourd’hui, par ce terme, on les oublie. Je vous mets deux liens vers l’histoire du canal du Panama et les républiques bananières, car l’article est trop long et je ne veux donc pas développer encore. Donc quand ce roman répète sans arrêt que Béatrice est princesse d’Amérique, ça me file un arrière-gout repoussant dans le fond de la bouche. Et cet impérialisme passe par quelque chose d’aussi “innocent” qu’un simple mot. Je trouve dommage que le sujet soit esquivé, d’autant plus qu’un personnage principal est latine descendante de l’immigration. Bah oui, c’est immigration latine, elle vient de quelque part non ?
De la partie I, la vision dépeinte du multiculturalisme américain demeure très blanc étant donné qu’on oublie les autres. Les Natifs se font cuire un oeuf et les personnes racisées ont vu leurs luttes passées sous silence par une simple mention. De même, voir les Etats-Unis comme influenceurs politiques mondiaux depuis 1781, c’est une notion avec de forts relents nationalistes. Encore une fois, je n’évoque pas les convictions politiques de l’autrice, que je ne connais pas, je ne fais qu’analyser le texte qu’elle nous offre. Tout ce que j’insinue c’est que ces idées viennent bien de quelque part. Donc c’est une vision nationaliste blanche ? De ce qu’on voit oui.
Mais Katharine McGee est-elle royaliste ? Parce que être fasciné par la monarchie ou du moins intéressée, c’est quelque chose que je partage, ce n’est pas pour rien que j’avais très envie de lire ce roman. Le problème, c’est que ces réflexions sur la corruption des élus du peuple, cohérents (et encore) dans le roman, prêtent énormément à confusion. Le simple fait que le peuple soit quasiment absent du roman (non, Nina, ça ne compte pas, c’est la meilleure amie d’une princesse et sa mère a un poste politique important), et que tout ce que nous savons de lui c’est qu’il adore la monarchie. Tout gouvernement qui n’est pas dictatorial est critiqué par une frange de la population, du coup, ne pas en voir la moindre mention, c’est louche. De plus, cette volonté de présenter une monarchie modèle, à l’écoute de ses citoyens, qui a abolit l’esclavage, créée des duchés amérindiens, essaie de bien se faire voir, avec un roi souple et moral qui est complètement dépourvu d’intérêt autre que celui de son peuple (contrairement aux vils élus du peuple), c’est un message indéniable, une tentative d’en donner une bonne image sans aucune contradictions, en passant sous silence les aspects les moins glorieux de son histoire (si le fait qu’il n’y ait jamais eu de reine est la faute la plus grave de ce régime, moi je m’appelle Ghandi). Donc oui, c’est royaliste.
J’ai le sentiment que la vision de la monarchie d’American Royals est sensiblement la même que celle de The Crown : cette idée que la Couronne est une entité pérenne, indiscutable, qui est là un point c’est tout, et que ceux qui exercent le pouvoir doivent s’en accommoder. La différence majeure étant que The Crown nous offre des personnages complexes et des trajectoires interpersonnelles passionnantes et vraiment dramatiques.
AMERICAN ROYALS : Uchronie problématique, mais surtout ratée
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American Royals tome 1
Autrice : Katharine McGee
Maison d’édition : Lumen
Date de publication : 2019
Nombre de pages : 562
Genre : Romance, uchronie
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Ce qu’en pense Seli :
Mon titre donnant la couleur, je me permet de commencer cette chronique en répondant à la question présente sur la couverture française…
“Et si une famille royale régnait sur les Etats-Unis ?” Apparemment les changements seraient relativement mineurs… Dommage que les éditions Lumen aient ajouté cette phrase à leur marketing car elle met clairement en avant le plus gros défaut du roman qu’il comptent vendre… et focalise l’attention des lecteurices, notamment la mienne, sur cet aspect avant même de lire la première page. Je n’ai aucune formation d’éditrice, mais j’aurai trouvé plus judicieux de vendre avant tout l’aspect bling bling et glamour… comme le fait l’illustration quoi ! Car sans le titre, rien ne nous indique que cette dame est de sang bleu, simplement célèbre et glamour.
Je vais découper cette critique en plusieurs parties thématiques histoire de ne pas partir dans tous les sens comme dans cette intro…
Bref, je tiens quand même à vous avertir de deux choses avant de commencer à démonter ce roman (la lecture a été une série presque ininterrompue de facepalm, je dois extérioriser !) :
Comme toujours, je vais pas mal spoiler, et même aller au fond des détails de certains passages. Je vais dévoiler la fin ainsi que la plupart des retournements de situation. Je vous rassure, si vous voulez le lire, ce sera toujours lisible après, l’intérêt du roman ne repose pas tant sur ses retournements que sur ses personnages.
Si vous avez lu et aimé ce livre, je ne pense pas que cette critique soit pour vous. Déjà parce que je vais en dire beaucoup de mal avec pas mal d’ironie et sans doute un peu de condescendance. Et ensuite car ce qui m’a gâché ma lecture, ce ne sont pas tant les personnages et les retournements (je crois comprendre que beaucoup les ont aimés) mais bien la cohérence interne et la construction de l’univers uchronique. Quand je lis une fiction, j’ai deux principaux critères : un univers crédible et bien construit (surtout en fantasy et sf) et un univers historique détaillé et crédible (surtout en littérature contemporaine et bien évidemment historique). Malheureusement pour lui, American Royals se retrouve à l’intersection des deux, ce qui m’a donné envie de le lire. Et j’ai vite compris qu’aucun de ces deux critères n’était satisfaisant à mes yeux. Donc si vous ne voulez pas que je gâche à mon tour vos souvenirs de lecture (ce que je comprends parfaitement, j’ai tendance à le faire aussi), passez votre chemin.
Sur ce commençons :
Partie I. Le fond historique
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Evacuons tout de suite la critique facile : non le prémice, à savoir que Georges Washington aurait fondé une dynastie royale plutôt qu’une démocratie, ne me pose aucun problème. C’est la base de l’histoire, et selon les sources que j’ai pu trouver, ce n’est pas aussi improbable qu’on pourrait le croire. Mais je comprend que certains lecteurices étatsuniens très attachés à leurs Pères Fondateurs l’aient mal pris… Cette idée est intéressante, et pour une nation aussi impérialiste que les Etats-Unis, je trouvais même que c’était une réécriture qui pouvait même se muer en pastiche ou en parodie.
Non, ce qui m’a posé problème vient juste après, dans la première partie du livre où on nous présente cette réalité parallèle. Déjà, d’un point de vue général, mis à part le fait qu’une famille royale règne sur les Etats-Unis, rien ne semble avoir vraiment changé, le quotidien des personnages nous reste très familier. C’est là que j’ai eu un mauvais pressentiment. Et arrive ensuite les vrais points problématiques qui ont immédiatement cassé mon immersion. 
La géopolitique mondiale
Selon le roman, le fait que les États-Unis soient devenus une monarchie a empêché la plupart des monarchies d’Europe de tomber. Seulement, comme le roman ne fournit aucune explication, je n’ai pas manqué de hausser un sourcil. Si on dépasse le constat chauvin bien étatsunien qu’en tant que superpuissance actuelle il en a toujours été ainsi, et le réflexe presque pavlovien des français de défendre leurs exceptions historiques, ça ne tient tout de même pas vraiment debout. Sont nommées plus spécifiquement les révolutions françaises (1789) et russes (1917), qui ne sont jamais survenues, permettant aux Bourbons et aux Romanov de régner encore en 2019.
Déjà, le fait que la révolution américaine ait lieu avant ne signifie pas forcément qu’elle a influencée d’autres nations. C’est un raccourci qui simplifie à l’extrême les mécanismes d’une révolution politique.
Ensuite, si on peut en effet affirmer que la participation du Royaume de France à la cause étatsunienne a vidé les caisses de l’état et engendré une crise ayant mené à la convocation des états généraux, ce n’est qu’un élément déclencheur parmi tant d’autres. Comme la philosophie des Lumières, la contestation des prérogatives du clergé et de la noblesse, des luttes intestines entre la noblesse terrienne et les nouvelles élites négociantes, etc. De toute façon, si on suit le roman, la révolte a bien eu lieu donc la France serait de toute façon dans la même situation, aussi bien dans notre réalité que dans l’uchronie. Rappelons également que la France n’a pas connu qu’un seul renversement de la monarchie, mais bien cinq (toutes causes confondues), qui ont à chaque fois conduit à déposer un roi ou un empereur. Donc pour affirmer que l’instauration d’une monarchie étatsunienne a préservé la monarchie absolue en France, il faut soit réécrire entièrement l’histoire de la révolution soit méconnaître complètement cette histoire.
De même pour la révolution russe, bien plus lointaine car ayant eu lieu plus de cent ans après la création des Etats-Unis. Même en admettant qu’une monarchie étatsunienne existe, rien ne prouve qu’elle a pu contribuer à garder les Romanov sur le trône de Russie. D’ailleurs, cette affirmation baigne dans un flou total : y a t-il eu une première guerre mondiale ? Les Etats-Unis y ont-ils pris part ? Les alliances royales étasuniennes ont-elles interféré avec la généalogie des têtes couronnées du vieux continent ? Comme aucune réponse n’est apportée et que le roman nous présente un monde proche du notre, cela non plus ne paraît pas crédible. Si la première guerre mondiale a vu chuter de nombreuses monarchies qui paraissaient inébranlables, ce n’est pas un hasard de l’Histoire : cette guerre a été un catalyseur de toutes les dissensions sociales internes. Les russes ne se sont pas réveillés un matin de guerre en réalisant qu’ils détestaient leur Tsar, mais bien parce que ces tensions étaient déjà bien présentes avant. Même la monarchie britannique qui paraît de nos jours si forte y a laissé des plumes. Rappelons enfin que les États-Unis sont restés très en marge des conflits européens pendant plus d’un siècle (l’inverse n’est pas vraie) et qu’ils ne se sont engagés dans la guerre que bien après. Que ce soit dans notre réalité comme dans l’uchronie, si les États-Unis ont eu une quelconque influence sur la révolution russe, elles ne peut être que minime.
Cependant, même si j’ai l’air de chipoter, ces omissions ne perturbent pas la crédibilité du roman dans son ensemble, ce ne sont que des points de détail. On peut y voir une petite maladresse de la part de l’autrice qui voulait focaliser son récit sur autre chose. A part heurter les oreilles fragiles des amateurs d’histoire (comme moi) et des nationalistes français et russes (pas comme moi), il n’y a rien de vraiment gênant (ça se voit que je prend des pincettes pour nuancer mes propos avant de balancer du lourd ?).
Le génocide des natifs américains
Mon deuxième haussement de sourcils vient d’un autre point de détail, mais cette fois ci les implications sont réellement problématiques. Lors d’une cérémonie où le roi décerne des titres honorifiques aux citoyens méritants, toute la noblesse est présente et sont mentionnés deux personnages : les fils de deux duchés amérindiens, le duché Sioux et le duché Iroquois. Juste avant, on nous parle d’un certain comte de Huron, au nom atrocement anglophone… et si vous savez un peu ce qui est arrivé à tous ces peuples vous devez commencer à deviner le problème. Qu’avons nous ici ? Une autrice qui nous indique donc qu’à un moment donné, deux peuples amérindiens (ou natifs) (je dis peuple mais Sioux et Iroquois sont des noms donnés par les colons blancs qui ont mis dans le même panier des tas de cultures vaguement semblables) ont reçu de la part du roi des terres à administrer. L’intention est claire, réécrire une partie du génocide amérindien pour en proposer une version où ça se finit « mieux » pour les populations concernées (et je dis mieux seulement, car on va voir ce que ça implique tout de suite). L’objectif est aussi de nous rendre ce système monarchique plus sympathique, et on verra encore à plusieurs reprises que c’est une corde dont l’autrice aime bien user mais qui cause encore plus de soucis.
Petit rappel histoire de voir où on met les pieds : les premiers colons blancs ont commencé le génocide. Les Etats-Unis l’on poursuivi jusqu’à nos jours !
Reprenons… les peuples iroquois sont en contacts avec les européens depuis le début de la colonisation en Amérique du nord, le territoire qu’ils occupaient à l’origine correspondant au nord est du pays, plus une partie du sud du Canada. Les problèmes de voisinages ont commencé dès lors, de même que le vol progressif des terres aux populations natives et les affrontements de colons par tribus natives interposées (coucou la guerre de sept ans). On en est a peu près là au moment de la guerre d’indépendance. Donc George Washington, dans son infinie bonté (je rappelle que la monarchie est censée être très positive dans ce roman) accorde à des populations qui étaient là depuis bien plus longtemps un territoire donné, mais sous son autorité. Vous me direz, c’est mieux que ce qu’ils ont eu. Oui, mais ça reste quand même du vol, de la colonisation pure et simple. Ajoutez à cela que le mot iroquois est un terme occidental inventé de toutes pièces pour désigner six peuples différents. Ce qui signifie que ce bon George a imposé à son duc de nommer son duché Iroquois (et non Haudenosaunee, le mot iroquois correspondant), un terme qui correspond vaguement à sa culture, et surtout une forme de gouvernement vaguement féodale qui ne cadre pas du tout avec ladite culture. Et on est censé trouver ça positif ? C’est mieux que la réalité oui, mais mieux que pire, est-ce que ça en fait quelque chose de bien ?
Et les Sioux ? Comme les Iroquois, il ne sont pas un peuple uni mais plutôt une catégorie faite par les colons pour rassembler des peuples partageant des langues proches. Leur nom en lui-même serait dérivé d’un mot ojibwé qui signifie « petit ennemi » utilisé par les français, qu’ils ont finit par adopter à leur tour. Si colons et Sioux se connaissent depuis le XVIIème siècle, les conflits territoriaux émergent aux alentours de 1830, quand une route de migration est installée par les blancs vers l’actuel Oregon. Ils y mettent un bazar par possible et transmettent aux natifs le choléra, créant une véritable épidémie qui décime plusieurs tribus. Voyant leur territoire menacé, ils signent un traité et délimitent des frontières en accord avec le gouvernement étatsunien. La suite, on la connaît. Ce traité ne sera jamais respecté, leurs terres seront spoliées sous divers prétextes. Mêmes les soulèvements pacifiques seront réprimés dans le sang et aujourd’hui, les Sioux vivotent dans des réserves, certains peuples ayant presque disparus. Et des gens hésitent encore à parler de génocide ?Si on reprend le roman, la majeure partie des contacts entre Sioux et étasuniens débutent après que les États-Unis soient devenus une monarchie. Le territoire des Sioux n’appartenait alors évidemment pas aux États-Unis. Ce qui signifie que dans un soucis d’expansion, le Royaume s’est étendu et a occupé des terres Sioux, les ont sans doute militairement défaits, on colonisé leur territoire et ont placé ce territoire sous leur joug. Comme pour le duché Iroquois, le nom de duché Sioux nie à la fois toute une culture linguistique (eux mêmes se nomment Oceti sakowin oyate) et politique (ce nom faisant référence aux sept peuples). On peut tourner ça comme on veut, on est sur de la colonisation pure et dure avec en prime une politique d’acculturation très claire.
Vous vous souvenez du dénommé comte de Huron ? Ce noble a priori blanc que j’évoque au début ? Et bien Huron est le nom donné par les blancs à un autre groupe de peuples natifs, les Wendats. Eux semblent avoir eu moins de chance car on a repris le nom attribué de leur peuple pour nommer le comté et leur dirigeant est un bon étasunien de souche avec un nom bien anglophone. Supposons tout de même que ledit comte ne soit pas blanc mais issu du peuple Wendat (après tout, on a aucune description physique), sa famille a subit une telle dépossession de sa culture que son nom a dû changer. Eux n’ont même pas eu la chance d’avoir un semblant de souveraineté sur ce qui était jadis leur territoire.
Plus loin dans l’histoire, le roi évoque que les Duchés Sioux et Iroquois ont été établis grâce aux efforts d’un certain Red Fox James. Ce dernier a vraiment existé, mais était issu du peuple Blackfoot (Niitsitapi dans leur langue), donc rien à voir avec les Sioux ou les Iroquois. Si on résume, cet homme s’est donc battu pour la reconnaissance des peuples natifs au sein du royaume Etats-Unis et a obtenu des terres pour quelques peuples… le sien n’étant pas inclus et toujours sous la domination a priori de nobles blancs. Il a du finir sa vie de façon bien amère. Cette simple mention démontre quand même d’un manque de recherche et de sensibilité assez évident.
Au delà du parti pris éthiquement très discutable de réécrire l’histoire d’un génocide pour mieux représenter celui qui l’a perpétré (même si c’est une forme fictive, l’état concerné existe bel et bien), qu’est-ce que cela nous apprend sur cette merveilleuse monarchie ? Que c’est un état colonial qui utilise les élites de peuples dominés pour asseoir sa domination. L’idée de “rendre justice” aux natifs est louable, mais y réfléchir plus de cinq minutes fait se rendre compte de l’aberration créé, à peine plus positive que la réalité. Tout pour montrer que dans cette uchronie, les États-Unis se sont montrés plus « justes » avec les natifs. Imaginez donc quelqu’un écrire une uchronie similaire, mais à propos du génocide juif. L’auteurice serait immédiatement appelé antisémite à vouloir modifier ainsi l’histoire de ce génocide et à raison. Il est vrai que les deux ne sont pas entièrement similaires en terme de moyens, mais les visées étaient tout de même proches : détruire des peuples qui « gênaient » l’expansion d’autres peuples dominants.
Cependant, dans un autre point de détail, on nous révèle qu’il y a dans les joyaux de la couronne une couronne “impériale”. Ce qui signifie que les Etats-Unis se sont revendiqués à un moment donné comme un Empire. Si on compare aux autres empires ayant existé, et à l’influence principale de l’autrice, à savoir la monarchie Anglaise, on est donc bien sur une monarchie anciennement impériale qui basait sa puissance sur les colonies. Cette simple mention tend à confirmer toutes mes hypothèses sur le génocide des natifs dans cet univers. L’autre soucis est que durant mes recherches, j’ai lu que ces mentions des duchés natifs étaient absentes des premières versions du roman (je n’ai trouvé qu’un commentaire sur goodreads donc j’ai peut-être tort), ce qui signifie qu’elles ont été ajoutées pour éviter toute critique sur l’invisibilisation des natifs. Ce n’est pas très flatteur pour l’autrice si c’est vrai, mais dans tout les cas la version finale n’est pas beaucoup plus flatteuse.
Cependant, tout cela pouvait marcher. Après tout, les États-Unis étant un état impérialiste, sa version monarchique pouvait tout aussi bien avoir les mêmes problèmes. Simplement, ce n’est pas décrit ainsi dans le livre. Le roman ne nous dépeint que les aspects positifs de ce régime, sans discours critique sur ses institutions. L’autrice dit en interview s’être basée sur les monarchies existantes, mais c’est quand même omettre ce gigantesque détail que les États-Unis et le Royaume-Uni n’ont absolument pas eu le même développement entre 1780 et 2019, les monarchies peuvent donc se ressembler, mais en aucun cas au point de réduire le génocide des amérindiens à ce qui est proposé, un détail mentionné pour faire progressiste mais vite occulté. Quelque part, heureusement que la mention des natifs se limite à deux noms et une ligne de texte, si l’autrice avait creusé plus profondément, ça serait vite devenu très moche.
Le mouvement des droits civiques
Cette sous partie sera rapide (ou pas), car la condition des afro-américains est à peine plus évoquée que celle des natifs (oui je sais…), ce qui fait un peu mal aux fesses au vu de la visibilité de leurs combats et du contexte où le roman à été publié (les tensions internes liées au violences policières sur les personnes noires sont des questions brûlantes depuis au moins 2015). Mais quelles sont ces mentions ?
Le fait qu’à un moment donné, un roi étatsunien a aboli l’esclavage, mais on ne sait pas précisément quand, ni pourquoi. Il est sous-entendu que c’est une question de bon sens. On est sur un anachronisme très connu des historiens où on plaque sur notre passé des considérations actuelles. De nos jours, il nous parait évident que l’esclavage est un crime contre l’humanité, mais pour nos ancêtres non, la preuve il y a bel et bien eu de l’esclavage. Cette simple idée efface aussi au passage tous les combats des esclaves et de certains pères fondateurs pour l’abolition. Alors oui, le livre nous indique que Georges Washington n’a pas pu abolir l’esclavage comme il le souhaitait (ça correspond plutôt bien à nos connaissances historiques sur la fin de vie du président), mais c’est bien qu’il y avait des pressions non ? Ce n’est pas juste une question de bon sens ! Il faut tout de même préciser que la jeune monarchie (ou démocratie, dans ce cas ça revient au même) était en banqueroute après s’être détachée de son ancienne métropole (dont elle dépendait énormément au demeurant) et que pouvoir compter sur une main d’œuvre gratuite et corvéable à merci a été d’une grande aide pour redresser l’économie, entre autres choses. Le problème c’est que le livre ne se mouille pas et refuse d’accepter que sa monarchie fictive a appuyé son pouvoir sur l’esclavage (c’était obligé, pas le choix pour le coup), et a donc évacué immédiatement ces considérations en laissant sous entendre que l’abolition était “évidente”.
La présence d’un noble noir qui danse avec la princesse Béatrice lors d’une soirée organisée à la cour. Ici, on est sur l’un des grands écarts les plus conséquents que j’ai jamais vu ! On passe quand même sans étape intermédiaire entre l’esclavage et la noblesse. Belle progression ! Les droits civiques ? Martin Luther King ? Rosa Parks ? Malcolm X ? Sans doute perdus dans les limbes de l’Histoire. Cela me rappelle diablement la vision du racisme dans la série Bridgerton… Petite aparté… Cette série se déroule en 1813 en Angleterre et prend place dans les hautes sphères aristocratiques. Pour pouvoir inclure un casting divers tout en évitant de froisser les racistes qui viendront évoquer la sacro-sainte “crédibilité historique” pour râler, l’équipe a créé une mini uchronie où le roi, pour pouvoir épouser une femme noire dont il était amoureux, a abolit l’esclavage et titré plusieurs familles racisées, comme le Duché de Hastings dont le duc est noir. Deux problèmes : malheureusement pour eux, cela n’a pas empêché les racistes de critiquer le casting de la série (dommage, mais c’était bien tenté de la part de l’équipe) et en plus cela créé une grosse incohérence historique. La société fictive de Bridgerton semble entièrement dépourvue de racisme (les couples mixtes sont acceptés sans soucis, il y a de nombreux racisés parmi la noblesse et les femmes noires ne sont apparemment pas forcées de se plier aux critères de beauté blancs), sauf que abolir les discriminations politiques comme l’esclavage ne fait pas disparaitre le racisme. Regardez notre réalité : l’esclavage est abolit en France et aux Etats-Unis depuis plus de 150 ans et pourtant le racisme est encore omniprésent. Dans American Royals c’est pareil, sauf qu’aucun effort n’a été fait pour tenter d’expliquer cet état de fait. Pour le peu qu’on sache, le racisme s’est effacé tout seul comme un grand, parce que le racisme c’est maaaaaaaal, c’est du “bon sens”. On retombe sur exactement les mêmes problèmes. 
Qu’en dire ? Au mieux c’est maladroit, au pire c’est irrespectueux. Je ne remet pas en cause les opinions de l’autrice, je pense qu’elle n’a pas pensé à mal, mais dans ce cas, ils étaient où les bétas lecteurs, les éditeurs pour lui expliquer ? Apparemment la suite inclus un personnage principal noir, donc c’est corrigé. Je pensais quand même important de mentionner ce manque… 
Est-ce important ?
On peut légitimement se poser la question. C’est un roman après tout, pas un traité d’Histoire de la Révolution Américaine, donc mon développement pourrait être totalement hors-sujet. La professeur d’Histoire en moi aurait envie de hurler : “Oui ! Bien sur que c’est important, quand on joue avec l’Histoire, on fait un minimum attention !” Mais vu qu’il s’agit d’une critique littéraire, je vais me baser sur un point de vue littéraire. 
Ce roman ne se revendique pas un récit fantasque sur une monarchie fictive (auquel cas, toute cette critique n’aurait pas lieu d’être), mais bien une uchronie : un présent alternatif basé sur des événements historiques divergents. J’ai lu quelques interviews de Katharine McGee, et nulle part je n’ai vu de malveillance. Un peu de naïveté peut-être, et une sincère envie de s’amuser avec un concept qui lui plaisait. Cependant, c’est oublier qu’on parle de sujets sérieux et que malgré toutes ces bonnes intentions, elle a complètement réécrit l’histoire d’un pays sans réelle structure ou recul critique. Cela créé des incohérences, mais surtout si on se penche sur les informations données : cela donne à son contexte un fond nauséabond à base de colonisation, d’acculturation, d’exploitation et de génocide à peine mieux que ce que nous avons vraiment eu. Avec un petit travail de réécriture, on aurait pu l’éviter. Ce livre est problématique, et au vu de certaines critiques lues, certains lecteurices concernés l’ont aussi trouvé, notamment une qui qualifiait le féminisme de ce livre de féminisme blanc, excluant le reste du spectre, et au vu de ce que montre le livre, je peux difficilement lui donner tort. Je reviendrai sur les conclusions militantistes dans une autre partie. Nous sommes ici sur des considérations éthiques. Quels sont les messages véhiculés par ce roman ? Que l’histoire des natifs et des noirs n’est qu’un détail qu’on peut évacuer comme cela au sein d’une fiction au profit de l’état qui les a oppressé pendant des siècles. 
Le plus dommage sur ce roman, c’est que ces écueils auraient pu être évités très facilement. Toutes les informations que j’ai trouvé sur les Sioux, les Iroquois, Red Fox James, Washington ou l’esclavage, celles que j’ai cité dans cette partie, je ne les ai pas trouvées sur Persée. Non, je les ai trouvées sur Wikipédia. Comme quoi il aurait été facile de se documenter un peu pour éviter les raccourcis historiques (relativement inoffensifs) et le révisionnisme (largement moins inoffensif). Oui, toute forme d’uchronie est révisionniste, mais de là à utiliser les cultures opprimées pour montrer à quel point la monarchie qui les a assimilées est trop bien, je trouve ça affolant. Chers lecteurices qui se sont sentis offensés, je comprend tout à fait !
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navisseli · 3 years
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Les Prénoms épicènes
/!\ ATTENTION : cet article contient des spoilers majeurs concernant la totalité de l’histoire. Il traite également des sujets suivants : classisme, racisme, sexisme, pervers narcissique. /!\
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Autrice : Amélie Nothomb
Maison d’édition : Albin Michel
Date de publication : 2018
Nombre de pages : 162
Genre : Contemporaine
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Ce qu'en pense Naviss :
Bonjour ! Je suis aujourd'hui plein de motivation, je viens à l'instant de terminer ma lecture, et j'ai envie de vous partager ce que j'en pense. Ce livre m'a été prêté par ma mère il y a plus d'un an, j'en avais lu 15 pages, il m'avait saoulé, et il trainait depuis tout ce temps dans ma bibliothèque en attendant d'être repris. Et quelle erreur !!
Partie 1 : Un début difficile, mais pour la bonne cause
Tout le début du roman est difficile à lire, dans le sens pénible, et c'est pour ça que j'ai lutté (et perdu) la première fois que j'ai voulu m'y mettre.
Le roman commence en 1970, l'année du lancement de Michel Sardou, avec un dialogue entre deux personnages. L'une est une dame au nom de Reine et l'autre son mec anonyme, pas content de se faire larguer et aux réactions on ne peut plus drama.
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Tu t'appelles Reine. Au début, ton prénom me terrifiait. A présent, je ne supporterais pas que tu te nommes différemment.
Mais... Mais qu'est-ce que c'est que ces dialogues ?
- Avec moi, tu n'auras pas une vie médiocre. [...]
- Jean-Louis devient le numéro deux d'une énorme compagnie d'électronique. Il m'emmène à Paris.
Ah ben génial, le personnage sexiste de la meuf qui se barre avec un type plus riche pour son statut...
Suite à ce prologue, on rencontre donc enfin le personnage principal de ce roman, Dominique, qui est tranquillement en train de boire un café en terrasse  lorsqu'elle se fait aborder par un harceleur de rue qui s'assoit devant elle même si elle n'est pas consentante, mais il est charmant donc ça va.
- Bonjour, mademoiselle. Puis-je vous offrir un verre ?
Elle ne sut pas quoi dire. Il prit cela pour un consentement et s'assit en face d'elle.
Donc il s'invite à sa table et ils commencent à discuter. Péniblement.
- Je ne sais pas quoi vous dire, monsieur.
- Appelez-moi Claude. Nous avons le même âge.
- Je ne suis pas une créatrice d'entreprise, moi.
- Ne vous attardez pas à ce détail. J'aimerais vous revoir.
C'est très vallée de l’étrange, mais en plus négatif. Tout parait surréaliste...
Il lui extorque son numéro de téléphone, et finalement, une semaine plus tard, notre charmeur l'invite au restaurant où... il commande pour elle ?! Et elle "y éprouve du plaisir" parce que comme ça, ça lui évite l'embarras de choisir un plat peu distingué ? Argh... Mais c'est pas romantique du tout, ça ! C'est ce qui me gène le plus avec toute cette première partie : elle vise à nous dépeindre Claude, un Parisien ambitieux, successful, impulsif, intelligent et sûr de lui, qui apparait tel un prince charmant dans la vie de Dominique, Brestoise effacée de 25 ans. Et il est censé être parfait. Oui, il la demande en mariage une semaine après leur premiere rencontre et harcèle Dominique. Mais celle-ci trouve cela valorisant et, je cite, « éprouva la joie du gibier victorieux » (p. 19).
Il lui offre un parfum, et on a ensuite le droit à une scène vraiment super étrange qui m'a laissé un goût de r/menwritingwomen où Dominique, assise sur sa baignoire, est au bord de l'extase en sentant l'odeur du Chanel n°5 sur sa peau et réalise qu’elle est amoureuse de Claude.
Il faut que je vous l’intègre parce que c’est exceptionnel.
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Claude enchaine les comportements creepy, comme par exemple déclarer à Dominique qu'il veut se marier le plus vite possible avant qu'elle ne change d'avis (ah, cool), tous interprétés par la concernée comme une marque d'affection tempétueuse, et interprétés par moi comme des signaux de psychopathe en devenir.
Ils se marient, déménagent à Paris, et là, soudainement, le roman se révèle beaucoup plus nuancé que mes impressions premières. Claude multiplie tellement les red flags qu'on se croirait à un défilé en République Populaire de Chine. Pourtant, l'autrice arrive à garder parfaitement la l'équilibre entre le fait de montrer clairement à son lectorat que Claude n'est absolument pas un type bien, et en même temps montrer que son personnage principal, Dominique, en est intimement convaincue. Et c'est là que commence la descente aux enfers. Dominique est isolée socialement : loin de sa famille restée à Brest, elle n'a plus d'amis et ne s'en est pas faits de nouveaux, elle ne travaille pas, son mari est son univers, elle est complètement dépendante de lui, et elle ne peut rien lui refuser. Il lui impose des rapports sexuels quotidiens afin qu'elle tombe enceinte et « elle se persuade qu’elle y prend du plaisir ». Il distille son affection comme les friandises distribuées à un chien méritant. Du coup, quand le chien n'est plus méritant, il n'a plus de friandises. Dominique n'étant toujours pas enceinte après plus d'un an de mariage, il devient alors cruel psychologiquement avec elle - avant de redevenir doux comme un agneau pour la récompenser à partir du moment où elle attend un enfant. Dès qu'elle accouche, il redevient froid et distant, il la laisse se démerder avec leur fille, et revient à l'assaut en réclamant un deuxième enfant alors qu'il est déjà incapable de s'occuper d'un-e seul-e, et que la première a failli tuer sa porteuse.
En fait, tout ce début malaisant servait à créer un setting « parfait » pour le faire basculer dans l’horreur petit à petit. Ce qui m’ennuie, c’est que tout cela est quand même considéré comme « parfait »… Le comportement de Claude du passé est montré comme un paradis perdu. Mais moi, je le trouvais gênant from the get go…
Partie II : La classe et la race
Dès la naissance d'Épicène, la fille de Claude et Dominique, on change de personnage principal, qu’on suit de l’enfance à l’adolescence. J'aime énormément Épicène et sa conscience aiguë que son père soit un connard (p. 63). Dès ses cinq ans, elle réalise qu’elle préfère “l’appartement sans Papa” (p. 48), jusqu’à admettre l’évidence : elle ne l’aime pas. J’aime beaucoup le parallèle entre l’illumination de Dominique quand elle réalise qu’elle aime Claude (vous savez, l'orgasme de la baignoire ?), et l’illumination d’Epicène quand elle réalise qu’elle n’aime pas son père (p. 50).
Son père, c'est le bourgeois. C'est l'incarnation même de la bourgeoisie au sens de l'Ancien Régime, l'arriviste qui surjoue son statut et obsède sur des considérations superficielles comme ce que vont penser les gens de la rue où il habite, et qui décide que sa fille aura l'agrégation alors qu'elle n'a que 5 ans, parce que ça fait bien. Il s’assure régulièrement que, lorsqu’on lui demande leur adresse, sa femme réponde bien “à côté de la place des Victoires” et pas “rue Etienne-Marcel” parce que ça fait plus chic. Il obsède sur le fait de vivre rive gauche. Il veut que sa fille aille à Henri IV et se plaint que ses amis ne soient pas “plus rive gauche”. Il est manipulateur et construit sa sociabilité selon le statut social qu’elle peut lui apporter, usant de stratégies à cet égard, et incitant son épouse à en faire de même.
Ce livre offre une réflexion intéressante sur la classe d’appartenance et la classe d’origine, notamment quand Epicène débat avec sa meilleure amie Samia duquel, entre le sien et celui de son amie, est le pire collège : celui d’Epicène, sans aucun doute, puisque il est plein de bourgeois. Quand Samia demande ce qu’est un bourgeois, Epicène répond :
- C’est des gens comme mon père.
- Ah oui, dit Samia, semblant mesurer la gravité du problème.
Elle réfléchit et reprit :
- Est-ce que ta mère est une bourgeoise aussi ?
- Non, trancha catégoriquement Epicène.
- Donc, toi, tu es métisse bourgeois-normal ?
- Je ne suis pas une bourgeoise, voyons. Les bourgeoises, tu les reconnais facilement : elles portent un serre-tête [et] des vêtements moches et chers [...].
Epicène s’exclue catégoriquement de la classe sociale d’appartenance de ses parents. Mais malgré tout, elle possède à la fois un privilège de classe et de race, comme le lui rappelle Samia douloureusement après avoir été victime du racisme de Claude.
- Allô ? Ah, oui, tu es Samia, la fille de l’épicier marocain... Comment ça, ton père n’est pas épicier ? Ca existe, des Marocains, en France, qui ne sont pas épiciers ? Attends, ma fille est devant moi, je te la passe.
- Bonjour Samia, dit Epicène.
- Salut, lui répondit une voix glaciale et méconnaissable.
Long silence.
- Tu sais quoi ? Je vais plus jamais te parler, reprit Samia. Et peut-être que tu portes pas de serre-tête, mais tu es quand même une bourgeoise.
Oui, Epicène essaie de s’extraire de son père et de tout ce qu’il représente : elle déteste Paris et sa bourgeoisie, et elle semble revivre quand elle déménage en Bretagne. Elle reste malgré tout la fille du directeur de la branche régionale d’une firme en plein essor, qui vit dans un riche appartement parisien et a accès à une éducation de haut niveau grâce à son intellect développé - sa maturité et ses facilités d’apprentissage sont régulièrement mises en avant par l’autrice, mais aussi grâce aux références culturelles auxquelles elle a pu avoir accès grâce à son milieu social !
Un lien est fait entre classe et race, le mépris de Claude à l’égard de la famille de Samia s’exprimant non seulement parce qu’elle est racisée, mais aussi parce qu’elle est de classe sociale inférieure à la sienne. Le fait qu’Epicène et sa famille soit blanches, renforcent ici leur domination sociale. Au contraire, le fait que Samia et sa famille soient racisées la maintient dans son statut social inférieur. Il faut d’ailleurs noter que ce roman casse avec le cliché de l’homme maghrébin sexiste, en mettant un modèle positif d’homme avec le père de Samia, infiniment plus respectueux des femmes que le père d’Epicène. Je regrette infiniment une phrase qui n’est pas critiquée ou mise en perpective : alors qu’elle tarde à tomber enceinte, Dominique propose à Claude la solution de l’adoption, à savoir “accueillir un petit Vietnamien” (p. 37), ce qui m’a vraiment fait cringe parce qu’elle en parle comme si elle comptait adopter un petit chien... Le site de la CAF présente une étude qui montre qu’entre 1994 et 1999, près du tiers des enfants adoptés à l’étranger étaient nés au Vietnam ; les arguments avancés par les parents qui souhaitent adopter des enfants Vietnamiens étant généralement un rappel de stéréotypes positifs sur les Asiatiques (la docilité notamment)... ce qui est raciste. Et ce n’est pas du tout critiqué ou mis en perspective !
J’en profite pour ajouter quelques liens sur la question de l’adoption transraciale : [1] [2]. Allez lire : le premier c’est une interview d’Amande Gay, et le deuxième c’est le témoignage d’une personne adoptée d’origine vietnamienne.
Partie III : Une sororité à toute épreuve !
Les femmes, dans ce livre, ne sont ni jalouses ni rivales. Elles se serrent les coudes. Dès les débuts du roman, une solidarité féminine est mise en place par l'autrice quand l'employée de la parfumerie essaye de faire passer un message d'alerte à Dominique par une sélection spécifique de parfum. Celle-ci n'ayant pas les codes de la bourgeoisie parisienne, le parfum a l'effet inverse et elle tombe malgré tout dans le piège de Claude.
Elle se poursuit ensuite dans la relation intense qui se construit entre la mère, Dominique, et la fille, Epicène, sans que celle-ci ne soit dévorante ou toxique. Elles veillent l’une sur l’autre sans se prédater, dans un rapport de complicité et de bienveillance : bienveillance de la mère envers la fille d’une part, qui essaie de la protéger du manque d’affection que lui porte son père, et bienveillance de la fille envers la mère d’autre part. En effet, Epicène ne reproche pas à sa mère pas de rester avec son mari pour le confort matériel qu’il leur apporte, malgré les abus qu’il leur fait subir à toutes les deux. malgré les abus qu’il lui fait subir à toutes les deux, en se mentant à elle-même et en attendant le retour d’un homme charmant qui n’a jamais existé que dans sa tête. Le coupable c’est son père, pas sa mère qui n’est que victime des prédations de Claude et de son propre amour pout lui.
Deux autres amitiés féminines intenses et passionnelles sont développées :
La relation entre Epicène et Samia est presque amoureuse. Epicène dit que si elle perdait Samia, elle en mourrait. Elles se comparent constamment à Orphée et Eurydice, chacune correspondant aux deux rôles. Reine compare leur relation à un mariage.
La relation entre Dominique et Reine. Oui oui, la même Reine qu’au début, l’ex du mec anonyme (que tout le monde a deviné être Claude). La narration décrit d’ailleurs Dominique comme “séduite”.
Claude aussi l’avait séduite et elle avait adoré cela, qui avait duré quelques jours. Avec Reine, la séduction n’en finissait pas.
Reine et Dominique deviennent meilleures amies et confidentes. Contrairement à Claude qui ne voit en sa femme qu’une potiche agréable à regarder, Reine voit en Dominique une personne intéressante et qui mérite d’être aimée. Elle est, en quelque sorte, son véritable grand amour. A la demande de son amie, Reine invite Dominique et Claude à dîner chez elle, et Dominique assiste à la confrontation entre les deux ancien-es amant-es. Et j’adore l’attitude de Reine et la manière dont elle réagit face à Claude. Elle n’est jamais une menace par rapport à Dominique, elle est une alliée qui la valorise par rapport à un mari méprisant - lequel apparait enfin avec son vrai visage, celui d’un nice guy pathétique qui utilise l’argument du « c’est à cause de toi que je suis devenu un connard » pour justifier son comportement détestable, confirmant à Reine qu’elle a bien fait de se casser. C’est Claude qui ne mérite pas sa femme. Pas l’inverse.
J’aime beaucoup le développement de Dominique. Contrairement à ce que le début du livre peut laisser à penser, non, les femmes ne sont pas que des gourdes, mais bien des atouts dans l’ascension sociale des hommes. Dominique fuit Paris et ses simulacres avec sa fille pour regagner l’authenticité de sa Bretagne natale. En reprenant contact avec son ancien patron pour qu’il la réembauche, elle découvre que Claude n’est qu’un menteur : contrairement à ce qu’il lui a fait croire toutes ces années, il ne travaillait pas pour la toute nouvelle branche parisienne de la firme quand ils se sont rencontrés. Il s’est fait passé pour son fiancé pour se faire embaucher dans son entreprise, alors qu’il ne lui avait parlé qu’une fois. Jouant de la réputation de Dominique d’être l’employée la plus sérieuse, il a réussi à convaincre son patron de le laisser ouvrir une branche parisienne, qui n’existait pas jusqu’alors... C’est donc grâce à Dominique que le succès de la branche parisienne a été possible.
 Le rôle de personnage principal est partagé, même s’il n’est pas nécessairement partagé en même temps : à la préadolescence, Epicène se met en retrait sans sa propre vie dans l’attente du moment où elle sera enfin libérée de son père, comme un papillon dans sa chrysalide, ou bien un cœlacanthe - c’est l’image employée par le roman. Le fond rejoint la forme, et Epicène rend à Dominique son rôle de personnage principal. A ce sujet, je ne sais pas si c’est fait exprès, mais j’aime beaucoup la symbolique d’Epicène qui se met entre parenthèse, qui me fait penser à l’importance d’employer l’écriture épicène au lieu des féminins entre parenthèse.
Dix ans plus tard, alors qu’elle est désormais titulaire d’une thèse de doctorat en littérature anglaise et de l’agrégation d’anglais, Epicène reçoit un appel de son père, qui lui annonce qu’il est en phase terminale d’un cancer du poumon. Elle décide d’aller le voir à l’hôpital, et Claude essaie de lui embrouiller le cerveau à base de “toi et moi nous sommes pareil” et de “okay je t’ai fait souffrir, mais regarde, ça valait le coup car grâce à moi tu as l’agreg”. Mais non, lui répond Epicène, ce n’est pas grâce à lui qu’elle est devenue ce qu’elle est. C’est en dépit de lui. C’est malgré lui, malgré les traumas qu’il lui a infligé et tous les dégâts que des années de négligence émotionnelle ont eu sur elle. Et je trouve ça très fort, comme message. 
Epicène est construite sur deux parallèles :
Avec sa mère d'une part. Si la première est dans l'amour aveugle de Claude, Épicène est dans la haine sourde.
Avec son père d'autre part, dans leurs obsessions respectives - leurs cravings.
La 4e de couverture statue le fait que "la personne qui aime est toujours la plus forte", par opposition à la personne qui crave et qui ne vit que pour l'objet de cette obsession. Mais je ne suis pas certain que ce soit la morale de l'histoire. Le craving de Claude le tue, certes. Mais celui d'Épicène, qui tue son père en débranchant son respirateur, la rend triomphante : par la mort de Claude, la fin de ce livre, toutes les femmes renouent. Et à Dominique se plaignant de n’avoir été que la tierce personne de sa propre vie, Reine rétorque :
- Vous vous trompez. C’était Claude, la tierce personne.
Ma note : 18/20.
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navisseli · 3 years
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AMERICAN ROYALS : Uchronie problématique, mais surtout ratée
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American Royals tome 1
Autrice : Katharine McGee
Maison d’édition : Lumen
Date de publication : 2019
Nombre de pages : 562
Genre : Romance, uchronie
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Ce qu’en pense Seli :
Mon titre donnant la couleur, je me permet de commencer cette chronique en répondant à la question présente sur la couverture française...
“Et si une famille royale régnait sur les Etats-Unis ?” Apparemment les changements seraient relativement mineurs... Dommage que les éditions Lumen aient ajouté cette phrase à leur marketing car elle met clairement en avant le plus gros défaut du roman qu’il comptent vendre... et focalise l’attention des lecteurices, notamment la mienne, sur cet aspect avant même de lire la première page. Je n’ai aucune formation d’éditrice, mais j’aurai trouvé plus judicieux de vendre avant tout l’aspect bling bling et glamour... comme le fait l’illustration quoi ! Car sans le titre, rien ne nous indique que cette dame est de sang bleu, simplement célèbre et glamour.
Je vais découper cette critique en plusieurs parties thématiques histoire de ne pas partir dans tous les sens comme dans cette intro...
Bref, je tiens quand même à vous avertir de deux choses avant de commencer à démonter ce roman (la lecture a été une série presque ininterrompue de facepalm, je dois extérioriser !) :
Comme toujours, je vais pas mal spoiler, et même aller au fond des détails de certains passages. Je vais dévoiler la fin ainsi que la plupart des retournements de situation. Je vous rassure, si vous voulez le lire, ce sera toujours lisible après, l’intérêt du roman ne repose pas tant sur ses retournements que sur ses personnages.
Si vous avez lu et aimé ce livre, je ne pense pas que cette critique soit pour vous. Déjà parce que je vais en dire beaucoup de mal avec pas mal d’ironie et sans doute un peu de condescendance. Et ensuite car ce qui m’a gâché ma lecture, ce ne sont pas tant les personnages et les retournements (je crois comprendre que beaucoup les ont aimés) mais bien la cohérence interne et la construction de l’univers uchronique. Quand je lis une fiction, j’ai deux principaux critères : un univers crédible et bien construit (surtout en fantasy et sf) et un univers historique détaillé et crédible (surtout en littérature contemporaine et bien évidemment historique). Malheureusement pour lui, American Royals se retrouve à l’intersection des deux, ce qui m’a donné envie de le lire. Et j’ai vite compris qu’aucun de ces deux critères n’était satisfaisant à mes yeux. Donc si vous ne voulez pas que je gâche à mon tour vos souvenirs de lecture (ce que je comprends parfaitement, j’ai tendance à le faire aussi), passez votre chemin.
Sur ce commençons :
Partie I. Le fond historique
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Evacuons tout de suite la critique facile : non le prémice, à savoir que Georges Washington aurait fondé une dynastie royale plutôt qu’une démocratie, ne me pose aucun problème. C’est la base de l’histoire, et selon les sources que j’ai pu trouver, ce n’est pas aussi improbable qu’on pourrait le croire. Mais je comprend que certains lecteurices étatsuniens très attachés à leurs Pères Fondateurs l’aient mal pris... Cette idée est intéressante, et pour une nation aussi impérialiste que les Etats-Unis, je trouvais même que c’était une réécriture qui pouvait même se muer en pastiche ou en parodie.
Non, ce qui m’a posé problème vient juste après, dans la première partie du livre où on nous présente cette réalité parallèle. Déjà, d’un point de vue général, mis à part le fait qu’une famille royale règne sur les Etats-Unis, rien ne semble avoir vraiment changé, le quotidien des personnages nous reste très familier. C’est là que j’ai eu un mauvais pressentiment. Et arrive ensuite les vrais points problématiques qui ont immédiatement cassé mon immersion. 
La géopolitique mondiale
Selon le roman, le fait que les États-Unis soient devenus une monarchie a empêché la plupart des monarchies d’Europe de tomber. Seulement, comme le roman ne fournit aucune explication, je n’ai pas manqué de hausser un sourcil. Si on dépasse le constat chauvin bien étatsunien qu’en tant que superpuissance actuelle il en a toujours été ainsi, et le réflexe presque pavlovien des français de défendre leurs exceptions historiques, ça ne tient tout de même pas vraiment debout. Sont nommées plus spécifiquement les révolutions françaises (1789) et russes (1917), qui ne sont jamais survenues, permettant aux Bourbons et aux Romanov de régner encore en 2019.
Déjà, le fait que la révolution américaine ait lieu avant ne signifie pas forcément qu’elle a influencée d’autres nations. C’est un raccourci qui simplifie à l’extrême les mécanismes d’une révolution politique.
Ensuite, si on peut en effet affirmer que la participation du Royaume de France à la cause étatsunienne a vidé les caisses de l’état et engendré une crise ayant mené à la convocation des états généraux, ce n’est qu’un élément déclencheur parmi tant d’autres. Comme la philosophie des Lumières, la contestation des prérogatives du clergé et de la noblesse, des luttes intestines entre la noblesse terrienne et les nouvelles élites négociantes, etc. De toute façon, si on suit le roman, la révolte a bien eu lieu donc la France serait de toute façon dans la même situation, aussi bien dans notre réalité que dans l’uchronie. Rappelons également que la France n’a pas connu qu’un seul renversement de la monarchie, mais bien cinq (toutes causes confondues), qui ont à chaque fois conduit à déposer un roi ou un empereur. Donc pour affirmer que l’instauration d’une monarchie étatsunienne a préservé la monarchie absolue en France, il faut soit réécrire entièrement l’histoire de la révolution soit méconnaître complètement cette histoire.
De même pour la révolution russe, bien plus lointaine car ayant eu lieu plus de cent ans après la création des Etats-Unis. Même en admettant qu’une monarchie étatsunienne existe, rien ne prouve qu’elle a pu contribuer à garder les Romanov sur le trône de Russie. D’ailleurs, cette affirmation baigne dans un flou total : y a t-il eu une première guerre mondiale ? Les Etats-Unis y ont-ils pris part ? Les alliances royales étasuniennes ont-elles interféré avec la généalogie des têtes couronnées du vieux continent ? Comme aucune réponse n’est apportée et que le roman nous présente un monde proche du notre, cela non plus ne paraît pas crédible. Si la première guerre mondiale a vu chuter de nombreuses monarchies qui paraissaient inébranlables, ce n’est pas un hasard de l’Histoire : cette guerre a été un catalyseur de toutes les dissensions sociales internes. Les russes ne se sont pas réveillés un matin de guerre en réalisant qu’ils détestaient leur Tsar, mais bien parce que ces tensions étaient déjà bien présentes avant. Même la monarchie britannique qui paraît de nos jours si forte y a laissé des plumes. Rappelons enfin que les États-Unis sont restés très en marge des conflits européens pendant plus d’un siècle (l’inverse n’est pas vraie) et qu’ils ne se sont engagés dans la guerre que bien après. Que ce soit dans notre réalité comme dans l’uchronie, si les États-Unis ont eu une quelconque influence sur la révolution russe, elles ne peut être que minime.
Cependant, même si j’ai l’air de chipoter, ces omissions ne perturbent pas la crédibilité du roman dans son ensemble, ce ne sont que des points de détail. On peut y voir une petite maladresse de la part de l’autrice qui voulait focaliser son récit sur autre chose. A part heurter les oreilles fragiles des amateurs d’histoire (comme moi) et des nationalistes français et russes (pas comme moi), il n’y a rien de vraiment gênant (ça se voit que je prend des pincettes pour nuancer mes propos avant de balancer du lourd ?).
Le génocide des natifs américains
Mon deuxième haussement de sourcils vient d’un autre point de détail, mais cette fois ci les implications sont réellement problématiques. Lors d’une cérémonie où le roi décerne des titres honorifiques aux citoyens méritants, toute la noblesse est présente et sont mentionnés deux personnages : les fils de deux duchés amérindiens, le duché Sioux et le duché Iroquois. Juste avant, on nous parle d’un certain comte de Huron, au nom atrocement anglophone… et si vous savez un peu ce qui est arrivé à tous ces peuples vous devez commencer à deviner le problème. Qu’avons nous ici ? Une autrice qui nous indique donc qu’à un moment donné, deux peuples amérindiens (ou natifs) (je dis peuple mais Sioux et Iroquois sont des noms donnés par les colons blancs qui ont mis dans le même panier des tas de cultures vaguement semblables) ont reçu de la part du roi des terres à administrer. L’intention est claire, réécrire une partie du génocide amérindien pour en proposer une version où ça se finit « mieux » pour les populations concernées (et je dis mieux seulement, car on va voir ce que ça implique tout de suite). L’objectif est aussi de nous rendre ce système monarchique plus sympathique, et on verra encore à plusieurs reprises que c’est une corde dont l’autrice aime bien user mais qui cause encore plus de soucis.
Petit rappel histoire de voir où on met les pieds : les premiers colons blancs ont commencé le génocide. Les Etats-Unis l’on poursuivi jusqu’à nos jours !
Reprenons… les peuples iroquois sont en contacts avec les européens depuis le début de la colonisation en Amérique du nord, le territoire qu’ils occupaient à l’origine correspondant au nord est du pays, plus une partie du sud du Canada. Les problèmes de voisinages ont commencé dès lors, de même que le vol progressif des terres aux populations natives et les affrontements de colons par tribus natives interposées (coucou la guerre de sept ans). On en est a peu près là au moment de la guerre d’indépendance. Donc George Washington, dans son infinie bonté (je rappelle que la monarchie est censée être très positive dans ce roman) accorde à des populations qui étaient là depuis bien plus longtemps un territoire donné, mais sous son autorité. Vous me direz, c’est mieux que ce qu’ils ont eu. Oui, mais ça reste quand même du vol, de la colonisation pure et simple. Ajoutez à cela que le mot iroquois est un terme occidental inventé de toutes pièces pour désigner six peuples différents. Ce qui signifie que ce bon George a imposé à son duc de nommer son duché Iroquois (et non Haudenosaunee, le mot iroquois correspondant), un terme qui correspond vaguement à sa culture, et surtout une forme de gouvernement vaguement féodale qui ne cadre pas du tout avec ladite culture. Et on est censé trouver ça positif ? C’est mieux que la réalité oui, mais mieux que pire, est-ce que ça en fait quelque chose de bien ?
Et les Sioux ? Comme les Iroquois, il ne sont pas un peuple uni mais plutôt une catégorie faite par les colons pour rassembler des peuples partageant des langues proches. Leur nom en lui-même serait dérivé d’un mot ojibwé qui signifie « petit ennemi » utilisé par les français, qu’ils ont finit par adopter à leur tour. Si colons et Sioux se connaissent depuis le XVIIème siècle, les conflits territoriaux émergent aux alentours de 1830, quand une route de migration est installée par les blancs vers l’actuel Oregon. Ils y mettent un bazar par possible et transmettent aux natifs le choléra, créant une véritable épidémie qui décime plusieurs tribus. Voyant leur territoire menacé, ils signent un traité et délimitent des frontières en accord avec le gouvernement étatsunien. La suite, on la connaît. Ce traité ne sera jamais respecté, leurs terres seront spoliées sous divers prétextes. Mêmes les soulèvements pacifiques seront réprimés dans le sang et aujourd’hui, les Sioux vivotent dans des réserves, certains peuples ayant presque disparus. Et des gens hésitent encore à parler de génocide ?Si on reprend le roman, la majeure partie des contacts entre Sioux et étasuniens débutent après que les États-Unis soient devenus une monarchie. Le territoire des Sioux n’appartenait alors évidemment pas aux États-Unis. Ce qui signifie que dans un soucis d’expansion, le Royaume s’est étendu et a occupé des terres Sioux, les ont sans doute militairement défaits, on colonisé leur territoire et ont placé ce territoire sous leur joug. Comme pour le duché Iroquois, le nom de duché Sioux nie à la fois toute une culture linguistique (eux mêmes se nomment Oceti sakowin oyate) et politique (ce nom faisant référence aux sept peuples). On peut tourner ça comme on veut, on est sur de la colonisation pure et dure avec en prime une politique d’acculturation très claire.
Vous vous souvenez du dénommé comte de Huron ? Ce noble a priori blanc que j’évoque au début ? Et bien Huron est le nom donné par les blancs à un autre groupe de peuples natifs, les Wendats. Eux semblent avoir eu moins de chance car on a repris le nom attribué de leur peuple pour nommer le comté et leur dirigeant est un bon étasunien de souche avec un nom bien anglophone. Supposons tout de même que ledit comte ne soit pas blanc mais issu du peuple Wendat (après tout, on a aucune description physique), sa famille a subit une telle dépossession de sa culture que son nom a dû changer. Eux n’ont même pas eu la chance d’avoir un semblant de souveraineté sur ce qui était jadis leur territoire.
Plus loin dans l’histoire, le roi évoque que les Duchés Sioux et Iroquois ont été établis grâce aux efforts d’un certain Red Fox James. Ce dernier a vraiment existé, mais était issu du peuple Blackfoot (Niitsitapi dans leur langue), donc rien à voir avec les Sioux ou les Iroquois. Si on résume, cet homme s’est donc battu pour la reconnaissance des peuples natifs au sein du royaume Etats-Unis et a obtenu des terres pour quelques peuples... le sien n’étant pas inclus et toujours sous la domination a priori de nobles blancs. Il a du finir sa vie de façon bien amère. Cette simple mention démontre quand même d’un manque de recherche et de sensibilité assez évident.
Au delà du parti pris éthiquement très discutable de réécrire l’histoire d’un génocide pour mieux représenter celui qui l’a perpétré (même si c’est une forme fictive, l’état concerné existe bel et bien), qu’est-ce que cela nous apprend sur cette merveilleuse monarchie ? Que c’est un état colonial qui utilise les élites de peuples dominés pour asseoir sa domination. L’idée de “rendre justice” aux natifs est louable, mais y réfléchir plus de cinq minutes fait se rendre compte de l’aberration créé, à peine plus positive que la réalité. Tout pour montrer que dans cette uchronie, les États-Unis se sont montrés plus « justes » avec les natifs. Imaginez donc quelqu’un écrire une uchronie similaire, mais à propos du génocide juif. L’auteurice serait immédiatement appelé antisémite à vouloir modifier ainsi l’histoire de ce génocide et à raison. Il est vrai que les deux ne sont pas entièrement similaires en terme de moyens, mais les visées étaient tout de même proches : détruire des peuples qui « gênaient » l’expansion d’autres peuples dominants.
Cependant, dans un autre point de détail, on nous révèle qu’il y a dans les joyaux de la couronne une couronne “impériale”. Ce qui signifie que les Etats-Unis se sont revendiqués à un moment donné comme un Empire. Si on compare aux autres empires ayant existé, et à l’influence principale de l’autrice, à savoir la monarchie Anglaise, on est donc bien sur une monarchie anciennement impériale qui basait sa puissance sur les colonies. Cette simple mention tend à confirmer toutes mes hypothèses sur le génocide des natifs dans cet univers. L’autre soucis est que durant mes recherches, j’ai lu que ces mentions des duchés natifs étaient absentes des premières versions du roman (je n’ai trouvé qu’un commentaire sur goodreads donc j’ai peut-être tort), ce qui signifie qu’elles ont été ajoutées pour éviter toute critique sur l’invisibilisation des natifs. Ce n’est pas très flatteur pour l’autrice si c’est vrai, mais dans tout les cas la version finale n’est pas beaucoup plus flatteuse.
Cependant, tout cela pouvait marcher. Après tout, les États-Unis étant un état impérialiste, sa version monarchique pouvait tout aussi bien avoir les mêmes problèmes. Simplement, ce n’est pas décrit ainsi dans le livre. Le roman ne nous dépeint que les aspects positifs de ce régime, sans discours critique sur ses institutions. L’autrice dit en interview s’être basée sur les monarchies existantes, mais c’est quand même omettre ce gigantesque détail que les États-Unis et le Royaume-Uni n’ont absolument pas eu le même développement entre 1780 et 2019, les monarchies peuvent donc se ressembler, mais en aucun cas au point de réduire le génocide des amérindiens à ce qui est proposé, un détail mentionné pour faire progressiste mais vite occulté. Quelque part, heureusement que la mention des natifs se limite à deux noms et une ligne de texte, si l’autrice avait creusé plus profondément, ça serait vite devenu très moche.
Le mouvement des droits civiques
Cette sous partie sera rapide (ou pas), car la condition des afro-américains est à peine plus évoquée que celle des natifs (oui je sais...), ce qui fait un peu mal aux fesses au vu de la visibilité de leurs combats et du contexte où le roman à été publié (les tensions internes liées au violences policières sur les personnes noires sont des questions brûlantes depuis au moins 2015). Mais quelles sont ces mentions ?
Le fait qu’à un moment donné, un roi étatsunien a aboli l’esclavage, mais on ne sait pas précisément quand, ni pourquoi. Il est sous-entendu que c’est une question de bon sens. On est sur un anachronisme très connu des historiens où on plaque sur notre passé des considérations actuelles. De nos jours, il nous parait évident que l’esclavage est un crime contre l’humanité, mais pour nos ancêtres non, la preuve il y a bel et bien eu de l’esclavage. Cette simple idée efface aussi au passage tous les combats des esclaves et de certains pères fondateurs pour l’abolition. Alors oui, le livre nous indique que Georges Washington n’a pas pu abolir l’esclavage comme il le souhaitait (ça correspond plutôt bien à nos connaissances historiques sur la fin de vie du président), mais c’est bien qu’il y avait des pressions non ? Ce n’est pas juste une question de bon sens ! Il faut tout de même préciser que la jeune monarchie (ou démocratie, dans ce cas ça revient au même) était en banqueroute après s’être détachée de son ancienne métropole (dont elle dépendait énormément au demeurant) et que pouvoir compter sur une main d’œuvre gratuite et corvéable à merci a été d’une grande aide pour redresser l’économie, entre autres choses. Le problème c’est que le livre ne se mouille pas et refuse d’accepter que sa monarchie fictive a appuyé son pouvoir sur l’esclavage (c’était obligé, pas le choix pour le coup), et a donc évacué immédiatement ces considérations en laissant sous entendre que l’abolition était “évidente”.
La présence d’un noble noir qui danse avec la princesse Béatrice lors d’une soirée organisée à la cour. Ici, on est sur l’un des grands écarts les plus conséquents que j’ai jamais vu ! On passe quand même sans étape intermédiaire entre l’esclavage et la noblesse. Belle progression ! Les droits civiques ? Martin Luther King ? Rosa Parks ? Malcolm X ? Sans doute perdus dans les limbes de l’Histoire. Cela me rappelle diablement la vision du racisme dans la série Bridgerton... Petite aparté... Cette série se déroule en 1813 en Angleterre et prend place dans les hautes sphères aristocratiques. Pour pouvoir inclure un casting divers tout en évitant de froisser les racistes qui viendront évoquer la sacro-sainte “crédibilité historique” pour râler, l’équipe a créé une mini uchronie où le roi, pour pouvoir épouser une femme noire dont il était amoureux, a abolit l’esclavage et titré plusieurs familles racisées, comme le Duché de Hastings dont le duc est noir. Deux problèmes : malheureusement pour eux, cela n’a pas empêché les racistes de critiquer le casting de la série (dommage, mais c’était bien tenté de la part de l’équipe) et en plus cela créé une grosse incohérence historique. La société fictive de Bridgerton semble entièrement dépourvue de racisme (les couples mixtes sont acceptés sans soucis, il y a de nombreux racisés parmi la noblesse et les femmes noires ne sont apparemment pas forcées de se plier aux critères de beauté blancs), sauf que abolir les discriminations politiques comme l’esclavage ne fait pas disparaitre le racisme. Regardez notre réalité : l’esclavage est abolit en France et aux Etats-Unis depuis plus de 150 ans et pourtant le racisme est encore omniprésent. Dans American Royals c’est pareil, sauf qu’aucun effort n’a été fait pour tenter d’expliquer cet état de fait. Pour le peu qu’on sache, le racisme s’est effacé tout seul comme un grand, parce que le racisme c’est maaaaaaaal, c’est du “bon sens”. On retombe sur exactement les mêmes problèmes. 
Qu’en dire ? Au mieux c’est maladroit, au pire c’est irrespectueux. Je ne remet pas en cause les opinions de l’autrice, je pense qu’elle n’a pas pensé à mal, mais dans ce cas, ils étaient où les bétas lecteurs, les éditeurs pour lui expliquer ? Apparemment la suite inclus un personnage principal noir, donc c’est corrigé. Je pensais quand même important de mentionner ce manque... 
Est-ce important ?
On peut légitimement se poser la question. C’est un roman après tout, pas un traité d’Histoire de la Révolution Américaine, donc mon développement pourrait être totalement hors-sujet. La professeur d’Histoire en moi aurait envie de hurler : “Oui ! Bien sur que c’est important, quand on joue avec l’Histoire, on fait un minimum attention !” Mais vu qu’il s’agit d’une critique littéraire, je vais me baser sur un point de vue littéraire. 
Ce roman ne se revendique pas un récit fantasque sur une monarchie fictive (auquel cas, toute cette critique n’aurait pas lieu d’être), mais bien une uchronie : un présent alternatif basé sur des événements historiques divergents. J’ai lu quelques interviews de Katharine McGee, et nulle part je n’ai vu de malveillance. Un peu de naïveté peut-être, et une sincère envie de s’amuser avec un concept qui lui plaisait. Cependant, c’est oublier qu’on parle de sujets sérieux et que malgré toutes ces bonnes intentions, elle a complètement réécrit l’histoire d’un pays sans réelle structure ou recul critique. Cela créé des incohérences, mais surtout si on se penche sur les informations données : cela donne à son contexte un fond nauséabond à base de colonisation, d’acculturation, d’exploitation et de génocide à peine mieux que ce que nous avons vraiment eu. Avec un petit travail de réécriture, on aurait pu l’éviter. Ce livre est problématique, et au vu de certaines critiques lues, certains lecteurices concernés l’ont aussi trouvé, notamment une qui qualifiait le féminisme de ce livre de féminisme blanc, excluant le reste du spectre, et au vu de ce que montre le livre, je peux difficilement lui donner tort. Je reviendrai sur les conclusions militantistes dans une autre partie. Nous sommes ici sur des considérations éthiques. Quels sont les messages véhiculés par ce roman ? Que l’histoire des natifs et des noirs n’est qu’un détail qu’on peut évacuer comme cela au sein d’une fiction au profit de l’état qui les a oppressé pendant des siècles. 
Le plus dommage sur ce roman, c’est que ces écueils auraient pu être évités très facilement. Toutes les informations que j’ai trouvé sur les Sioux, les Iroquois, Red Fox James, Washington ou l’esclavage, celles que j’ai cité dans cette partie, je ne les ai pas trouvées sur Persée. Non, je les ai trouvées sur Wikipédia. Comme quoi il aurait été facile de se documenter un peu pour éviter les raccourcis historiques (relativement inoffensifs) et le révisionnisme (largement moins inoffensif). Oui, toute forme d’uchronie est révisionniste, mais de là à utiliser les cultures opprimées pour montrer à quel point la monarchie qui les a assimilées est trop bien, je trouve ça affolant. Chers lecteurices qui se sont sentis offensés, je comprend tout à fait !
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navisseli · 3 years
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Des femmes queer au fil de l’Histoire
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Ici Seli !
J’adore lire des romans historiques, et parmi mes suggestions, vous en retrouverez encore beaucoup. Et parmi toutes ces histoires, il y a forcément de nombreuses romances et forcément une écrasante majorité de romances hétérosexuelles. Et ces dernières sont malheureusement, dans de trop nombreux cas, toxiques, malsaines et tout ce qui va avec. Le plus souvent, le contexte historique sert d’excuse pour valider les idées et fantasmes de l’auteurice sur les rapports hommes/femmes d’autrefois. Oubliant par là même que même si le patriarcat a souvent été à son apogée dans notre passé, les abus et les viols restaient bel et bien des crimes.
Du coup, histoire de se changer un peu les idées, je vous propose trois romans où ces histoires toxiques sont très en retrait, voir absentes, pour mettre en valeur des relations entre femmes basées sur autre chose que le sexe maître et la domination. Histoire de ne pas oublier non plus que les personnes LGBTQI+ ont toujours été là, et qu’iels militent pour leur droit depuis aussi longtemps que les autres.  
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Reine, guerrière et bisexuelle
Boudicca, de Jean-Laurent Del Soccoro
Résumé :  Angleterre, an I. Après la Gaule, l’Empire romain entend se rendre maître de l’île de Bretagne. Pourtant la révolte gronde parmi les Celtes, avec à leur tête Boudicca, la chef du clan icène. Qui est cette reine qui va raser Londres et faire trembler l’empire des aigles jusqu’à Rome ? À la fois amante, mère et guerrière mais avant tout femme libre au destin tragique, Boudicca est la biographie historique et onirique de celle qui incarne aujourd’hui encore la révolte.
Commençons dans l’antiquité avec la reine Boudicca. Si le but est de nous donner un aperçu de la vie de cette femme semi-légendaire de sa naissance à sa mort, je dois avouer que la question de sa sexualité et de ses amours reste assez en retrait. Néanmoins, cet aspect de sa vie fait corps avec qui elle est et ce qu’elle a entrepris et participe à nous brosser le portrait d’une femme hors du commun. 
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L’histoire d’un couple comme les autres
Beignets de tomates vertes, de Fannie Flagg
Résumé :  "Un sacrée numéro, Idgie ! La première fois qu'elle a vu Ruth, elle a piqué un fard et elle a filé à l'étage pour se laver et se mettre de la gomina. Par la suite, elles ont ouvert le café et ne se sont plus jamais quittées. Ah ! Les beignets de tomates vertes du Whistle Stop Café ... J'en salive encore !" Un demi-siècle plus tard, Ninny, quatre-vingt-six ans, raconte à son amie Evelyn l'histoire du Whistle Stop, en Alabama. Il s'en ai passé des choses, dans cette petite bourgade plantée au nord de la voie ferrée ! Et Evelyn, quarante-huit ans, mari indifférent, vie sans relief, écoute, fascinée. Découvre un autre monde. Apprend à s'affirmer, grâce à Ninny, l'adorable vieille dame. Chronique du Sud profond de 1929 à 1988, ce roman tendre et généreux vous fera rire aux éclats et, au détour d'une page, essuyer une larme. Humour et nostalgie : une recette au parfum subtil ...
Après cette femme incroyable que fut Boudicca, il me semblait important de présenter un autre récit de vie, fictif cette fois, mais plus quotidien. Le couple que forment Ruth et Idgie fait face à de nombreuses embûches mais est empreint d’une grande chaleur et malgré tout, leur amour met du baume au coeur. Leur histoire n’est pas le centre absolu du roman mais en demeure un point essentiel, un tour de force pour un roman paru en 1987. D’ailleurs son adaptation cinéma va se faire ravaler la façade à grands coups d’heterowashing où Ruth et Idgies ne seront plus que des amies... 
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Transgresser le genre, la sexualité et la réalité
Passing Strange, de Ellen Klages
Résumé : San Francisco, 1940. Six femmes, avocate, artiste ou scientifique, choisissent d’assumer librement leurs vies et leur homosexualité dans une société dominée par les hommes. Elles essayent de faire plier la ville des brumes par la force de leurs désirs… ou par celle de l’ori-kami. Mais en science comme en magie, il y a toujours un prix à payer quand la réalité reprend ses droits.
Ce roman évolue quasi exclusivement dans les cercles queer, en particulier lesbiens, de San Francisco et nous propose tout un panel de personnages divers et de relations. Si les personnages principaux et les événements sont purement fictifs, le roman parvient à insuffler au couple formé par Haskel et Emilie un parfum d’évidence au sein d’une société qui fera tout pour que leur idylle n’ait pas lieu. En plus de nous proposer une histoire transpirant la diversité et la solidarité féminine, ce roman nous rappelle qu’en termes de droits, rien ne doit jamais être tenu pour acquis. 
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