Grand égarement
Je marche dans les ruines de mon amertume. Drapé de blanc je marche comme un nouvel espoir. Je marche vers les nébuleuses hypnotiques. Je marche sur la mer comme un songe d’éternité. Sur la vermine poussent les fleurs. Sur la vermine se tissent les souvenirs brulants. Sur la vermine miroite un nouvel horizon. Un ailleurs où je pourrais renaitre. Un au-delà de toute douleur, un instant seulement. Entre deux rêves neurasthéniques hurlent les désirs inassouvis. Et mon sang coule chaud sur mes mains impuissantes. Tout s’éteint et se rallume, c’est la frénésie des âmes errantes. Urgence de vivre, dernier tombeau. Où mènent toutes ces routes escarpées ? À dos de murène je perce les nuages. De la beauté des cœurs ne filtre que de l’incertitude. Je n’ai plus rien à perdre que ma foi en l’éternel.
Urgence de vivre. Avidité diabolique. Dans les nuits de mon amertume je fonds et me liquéfie en une infime goutte d’eau. Je ne suis rien. Rien que le souffle de mon âme. Je ne pèse rien. Léger comme une promesse intenable. Inextinguible soif. Affamé comme une louve en hiver dans les nuits blanches d’un pays sans fin. Sur la crête enneigée se dressent des hêtres décharnés. Et mon regard s’égare sur les délices de ton sourire. Mon regard s’égare sur ton immensité. Dans la nuit épaisse je balbutie les derniers mots de mon corps. Balbutie de fines bulles de savon. Et sur l’intouchable crête, les arbres nus s’immergent dans un ciel criblé d’or.
Le grand massacre. Insoutenable naufrage. L’eau salée et crue, gorgée d’écume, s’éventre sur les récifs. C’est un murmure, une complainte. Une obédience au salut des noyés. Ici tout s’éparpille. Sous les étoiles de plomb, tout se disloque. Les derniers cris fondent dans l’oubli. La nuit est sans écho et ma douleur impuissante.
À la pointe du jour naissant j’aperçois des flamants roses s’arracher à l’eau morne des étangs. Derrière c’est la mer, début et fin de toute chose. Confidente et assassine. L’eau saumâtre exhale le soufre. Entre la bruyère et les roseaux, je serpente pour fuir mon horreur. Elle me suit comme mon ombre. Je cours. Je cours embrasser cette lueur rose et l’enfer s’égrène sur mon passage. On ne fuit pas la douleur, on ne fuit pas son désastre. On s’en enduit comme d’un onguent salvateur, une nouvelle chrysalide qui contraint tout mouvement. Fonctions primaires. Survivre envers et contre tout. Et la pommade pénètre sous la peau, entre les cicatrices et les frissonnements. La souffrance se distille dans le sang. Elle hurle dans les ruines, se consume sous la beauté des petites choses. L’odeur du pain grillé, tes jambes d’opale que le drap ne couvre pas, le gerbera planté dans une bouteille de gin, le bruit du torrent qui découpe en deux mon paradis montagneux. Le silence d’une hêtraie noyée sous la bruine de juillet. Ton baiser sur ma joue quand tu pars et que je songe encore dans mon impossible. Ton sourire ou le rire d’un enfant.
Grande est la meurtrissure. Plus grande encore sera la Résurrection. Le Seigneur n’est pas ingrat. Implacable, mais miséricordieux. Il faut savoir lire le temps qui s’échappe et les hurlements des yeux. La nuit ne peut durer éternellement et c’est à ton rire que je m’accroche lors de mon périple vers la Lumière Eternel. Ton sourire qui n’est plus que souvenir. Hésitations sanguinaires. Tremblements, quand la main du vice veut étrangler le dernier souffle de vie. Bien souffrir c’est apprendre à vivre. C’est goûter à la valeur des aboiements viscéraux. Amour, jalousie, colère, désir et tout le chapelet jusqu’au dernier chapitre. C’est se dire qu’un jour des bras nous cueillerons pour nous guider vers le repos des braves. Les souvenirs défilent comme le paysage par la fenêtre d’un train. Fugaces et immortels.
Il n’existe pas d’ailleurs. On porte son horreur en son sein comme le fruit son noyau. Et allongé sur les margelles de la piscine, au cœur d’une nuit sans lune, je cherche ces boules de feu qui scarifient le ciel. Déjà deux depuis que j’ai oublié le temps. Je caresse une cicatrice encore sensible et boursouflée. Souvenirs. Grand égarement dans le dédale aquatique des pulsions tentaculaires. Je recommencerai. Mon sang est gorgé d’immortalité. Il y a la Bête. Cruelle et féconde. Mais je n’en ai que faire. Mon effronterie je la mets à genoux et dans les églises j’hurle ma peine en silence. Demain il fera beau. Demain c’est la Résurrection. La nuit ne peut durer éternellement.
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Noirceur étoilée
C’est dans la noirceur étoilée que se tissent tes rêves fardés. Etirés, émiettés, les voici drapés sous l’abîme. Enfouis dans l’incertitude des secondes qui coulent implacables sur tes lèvres closes. Les mots tus et les feulements des cœurs écharpés. L’élégie de ta grâce hésitante exhale une mélancolie suave. Tes mains sont brulantes et ta voix étouffée. Crier sous les étoiles comme une louve affamée. Crier sous les étoiles comme un perdant désabusé. Hurler dans la nuit sans écho. Abandonner.
Et je cours sur les pentes nacrées de mes désirs balbutiants. Gorgé d’une audace folle, je dévale l’impossible comme un dévot use ses genoux sur le marbre poli de la Grande Cathédrale. Babylone la putain s’est vêtue comme une altière impératrice, et sur les pyramides rayonne le soleil rugissant tel un fauve enivré. Perce le trop plein d’amertume et enveloppe les rêves d’enfants dans un linceul de papier de soie doré.
Exquise est la morsure… exquise est la morsure de tes pulsions en fleurs comme un magnolia blanc surplombant le vertige de toute naïveté. A la proue du monde, assise sur le phare du dernier cap à franchir, se dessine l’immortalité de tes hésitations frénétiques. Atomes centrifugés. Pulsions en Si mineur comme la Grande Messe. Le Diable sort des ténèbres enfumés pour s’asseoir au premier rang. Impair. Velours rouge. Coupole de feu peinte par des doigts de fées. Le spectacle commence et le hautbois virevolte au-delà de toute attente. Médusé le parterre. Silence tombal entre les nuances saturées de couleur miel. Ecarte ta voix, écarte ton sein. Accueille l’audace et croque la part du rêve. L’amour est à la proue de l’île Saint Louis, étiré entre un platane et un banc peint de vert. Un instant, la suspension impalpable de la sidération ôte toute gravité. Toi et moi. Nous flottons dans l’indicible éternel, le temps d’un clin d’œil fugace et provocateur.
Nue. Lumière rasante. Torpeur sourde. Nue. Effervescence des effluves enlevés à la dissection des rêves frémissants. Un jaguar dévore le cœur encore chaud d’un malheureux singe effronté. La seule loi qui opère est qu’il n’y en a pas. Ruissellements assourdissants de l’armée décadente des entrevues égarées. Egarées et garées entre deux gares de campagne. Dans le jaune d’une pâquerette j’entrevoie la faille boursoufflée offerte à mon dévolu. Rose. Crème. Insubmersibles désirs d’opale. Le sang et le feu se dressent comme une muraille. Il faudrait une poterne ou, creuser en dessous ou, n’en avoir que faire et alors prendre la mer. Le feu sous la glace. Prendre la mer, de vagues en vagues que les mots dépassent. Que les mots se noient dans le marasme des hésitations tentaculaires.
Et dans la noirceur étoilée. Au trois-quarts du bout du monde. Pendus à l’horizon chevrotant. Défaits de toute crainte, absous de toute horreur, drapés dans la candeur amère d’un labyrinthe insoluble. Nous y voilà. Plantés sur la phallique oraison transcendantale des vies bégayantes. Nous voilà dans le couloir de l’insondable naïveté de l’être. Sourde. Offerte. Dans le dédale des possibles apparait l’exaltation suprême… où les mots touchent et bouchent les fissures muettes des égarements du cœur.
Et où alors tu lévites, Madone. Rideau noir. Silence grinçant. Tu lévites, Madone. Bras de flanelles et bouche cousue. Je me jette en ton sein et m’endors jusqu’à la prochaine Cavalcade.
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Fragments IV
Pour quoi vis-tu
Sidérée elle pâlit
Pour quoi vis-tu…
elle n’entend plus mais le sait parfaitement
Il s’agit de bien mourir évidemment
***
L’Enfer de Dante tatoué sur mon torse
Lasciate ogni sperenza, voi ch’entrate
Que chacun soit mis en garde je suis le danger absolu
Dès lors je dors paisible sur mon horreur
tandis que les requins de la bienséance souillent mon âme électrique
***
Cruelle pivoine tu abandonnes sur ma compagne
tes pétales de plumes envolées au vent
La pauvre dilapide son pécule en fleurs et autres sottises
comme on se soule avec du mauvais vin
***
C’est donc ça l’amour
Une barque qui s’abîme sur les récifs
en pleine mer…
Comment peut-on mourir dans la force de l’âge
si ce n’est par un crime diabolique
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Fragments III
Fureur de vivre grisante comme une locomotive
ivre fonçant vers l’abîme des parvenus
Mangeurs de rêves que rien n’arrête
Ni le fléau de la honte ni le crime d’imposture
Ô Jour de Colère abas-toi donc
***
Nuée de rêves étirée du midi au septentrion
Ton bonheur couve encore dans sa chrysalide de coton
Dénude-toi face à l’éternel et
pose ton âme à ses pieds
Enjambe alors tes craintes et cueille les fruits de ton obédience
***
Foudroyée dans sa grâce altière la princesse de velours
sent s’écrouler son royaume de cristal
Le prince s’est ouvert les veines d’une vertigineuse rage
Chairs à nu et flots de sang
La grande meurtrissure frappe à la porte
***
Immensité crue trempée dans la bruine
La hêtraie étourdit tout à l’entour
par sa beauté démesurée
Le silence de l’eau coulant des feuilles sur la bruyère
chuchote la chanson de l’Autre-Rive
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Sublimes défaites
J’ai vécu tant de choses qui ne m’appartiennent pas. Ou plutôt qui m’ont échappées, qui ne m’appartiennent plus. Qui ont glissées des mains de mon indolence. Dont on a étêté la substance. Oté la légèreté. Brisées, atrophiées et lourdes. De ces moments, de ce sang versé dans le vase du fil des jours, restent des souvenirs d’une pesanteur effroyable. Quand elles perlent à mon âme je ressens comme une déchirure, un abîme. Un vertige pointé vers le ciel. J’ai la sensation d’une mort imminente, d’un dédoublement de mon être, éclaté dans sa temporalité. Morcelé à travers les milliers de jours qui ont passé comme un train de fret d’un kilomètre de long.
Je me souviens de la poussière. La poussière du bush australien. Interminable. Ces routes en terre, qui ne se courbent pas pendant des kilomètres. Etourdissants mirages. Par plus de quarante degrés dans un vieux van Mitsubishi aménagé. Je me souviens d’aubes bleutées comme des nébuleuses, perchées sur les crêtes de l’horizon. Je me souviens du soleil surgissant de la mer tel un ange porte un nuage rose. Jaune profond, irradié. Je plonge nu dans le Pacifique, il n’est pas encore 7h. La plage, sauvage et touffue, s’étire parfois sur quinze kilomètres. Telle une ligne de front entre l’exaltation et l’éternité crue.
Là-haut, à Bouhy, toit de la Puisaye, perdu sur une carte. Un point que personne ne regarde. Un village qui sommeille depuis si longtemps que des toiles d’araignées se tissent sur les poignées de portes des habitations. Un tracteur passe. Son conducteur soulève son béret vers les étrangers que nous sommes. Une épicerie-café est ouverte, seule commerce de ce minuscule village. C’est comme entrer chez ses grands-parents. La tenancière prépare deux sandwichs. Puis c’est le repos à l’ombre du grand château d’eau, avant de repartir. Sur le plateau rasé se dresse, mystique et pesant, un Calvaire érodé. Il est comme un phare dans la nuit. Dieu nous tient en son sein. Nous laissons le septentrion s’égrainer derrière nous. Insouciants et légers. L’éternité reconnaitra les siens. Et les blés… Que l’on fauche en juillet. Tragiques et hurlants, terre pelée, comme écorchée, et, disséminés çà et là, des ballots de paille. Paysage d’aquarelle. On grimpe dessus comme si c’était le Colisée. Et la route serpente, à demi fondue par le soleil de plomb. Descendant la vallée du Rhône, sertie par des champs de tournesols insolents. Avaler le bitume, les pointillés, jusqu’à l’arrivée. Puis. Embrasser la mer azur-cuivrée.
Je me souviens de tes cheveux éparpillés dans l’herbe à l’ombre d’un grand chêne. Siestant à demi, offerte à la beauté de l’instant. Offerte aux souvenirs indélébiles. Ta bouche entrouverte buvant le sommeil des braves et une coccinelle noire se dandinant sur ton épaule. Un autre jour, ailleurs. Faire l’amour sur la plage sous un croissant de lune acéré. Le bruit des vagues. Extase tranchante comme une lame de rasoir. Moments volés à la félicité. A l’unicité christique de l’effarement des voies impénétrables de la Joie. Planté en mon âme comme un poignard dans les tripes. Souvenir cru et palpable comme la courbe de tes seins. Une réalité que le temps estompe mais dont la remembrance reste éternelle.
Plusieurs fois j’ai dit : Adieu. Ou plutôt, j’ai répondu… murmuré… bredouillé et même pleuré des adieux. S’abîmer en mer, je connais la musique. Chaque note, chaque nuance, chaque timbre arraché à l’impossible espoir. Vibrant et pathétique. Les veines palpitent et le cœur balbutie. La locomotive ivre fonce vers l’abîme écartelé. Le viaduc s’est écroulé. Le chemin s’arrête au fond des gorges, le fil d’or reliant l’amour à l’éternel est sectionné. Comme une paire de ciseaux planté dans le bras. On ne peut plus enjamber l’horreur. Toucher les étoiles et se perdre dans les yeux l’un de l’autre. Tu criais quand on faisait l’amour. Aujourd’hui le silence est lourd comme une pyramide de béton, froide et inflexible. Le sang gicle au rythme des pulsassions. Elles s’espacent et bientôt, la bête sera exsangue. Car est-on toujours un homme quand on survit encore à tous ces naufrages ? Est-ce une résilience extraordinaire ou le cœur s’est-il changé en pierre ? Ou encore s’agit-il des hurlements de cette urgence de vivre…
Partir. Prendre la mer. Encore… Idyllique traversée, de la matrice à l’empyrée, interrompue par le naufrage. Inévitable, peut-être. Terrifiant, sans doute. Réel, à coup sûr. C’est un obstacle qui ne dit pas son nom. Un obstacle fardé d’un espoir malin qui ne distille que du mensonge. Rien ne l’empêche. Ni les cris étouffés des noyés, ni la fadaise d’une seconde chance. On ne nait qu’une fois, chaque seconde s’écoule sur la mort de la précédente. Il n’existe aucun retour possible. Droit devant, sur un fil, étriqué entre le vide et la falaise. Ite missa est.
La lumière du phare tourne dans la nuit sans accroc depuis plus de deux cents ans. De loin c’est un clignotement, comme un battement de cœur. Il représente le salut. Stoïque, fiable. Ce phare, auguste, à la pointe de sa péninsule, vise les horizons avec précision, il prévient et accueille les âmes errantes sur les flots d’encre de la mer infinie.
Reprendre la mer, partir. Sans réfléchir. Reprendre la mer, aimanté. Oublieux des risques. Oublieux des naufrages passés. Partir. Encore… Que faire d’autre, après tout ? Alors, nous voilà. Sur la rade. Embarquement. Cœurs galvanisés, cotillons et farandoles. Les trompettes de l’insouciante et fulgurante passion sonnent leur mélodie suave. Doux est le cuivre comme blanche est ta peau de nymphe. Prendre la mer et ne jamais la rendre. Allons gaiement, le Purgatoire n’est jamais bien loin. Et j’agrippe tes cheveux noirs pour mieux t’étreindre. Dans la pénombre de ta petite chambre tapissée de crème brulent trois bougies bleues sur un candélabre d’airain. Il siège sur ta table de chevet. De l’autre côté, une autre bougie, blanche, plantée sur une bouteille vide de Meursault 2019, menace de s’éteindre. Je reprends mon souffle. Tes cheveux collent à ton visage béat. Je t’enlace sous le drap de coton imprimé Liberty. Corps à corps dans la nuit sans lune, je m’endormirai avec ta main sur ma hanche et ton rire dans la tête.
Alors pourquoi s’éteindre si l’on sait si bien s’étreindre ? Pourquoi hurler quand on sait si bien murmurer à l’oreille, des faux secrets, des douceurs et des gâteries. Pourquoi sauter du haut du pont quand on pourrait prendre le train en marche ? Je m’égosille de douleur. J’ai pris un train qui court à travers la plaine. Je regarde par la fenêtre. Lucarne frénétique qui avale le paysage et tout ce qui s’étend sur les centaines de kilomètres de voies. Forêts, champs de colza, villages, usines, entrepôts… Comme un nuancier d’un monde bien bâti. Fier. Un monde vautré dans sa purulence. Forniquant avec la nausée. Stupide et suffisant. Un monde blafard où l’on croit vivre la nuit et dormir le jour. Tout, maintenant et tout de suite ! On vivra une éternité, voire deux ! Un monde où nul n’a besoin d’idéal car tout est possible. Un monde violé par la cupidité existentielle de l’homme. Un monde pour ceux qui ne savent pas mourir. Un monde que je regarde se consumer comme un feu de paille au lieu de se tirer une balle dans la bouche.
Je suis monté jusqu’à la chapelle qui surplombe la ville du haut d’un promontoire escarpé. J’ai passé par le chemin du Calvaire, jalonné du récit de la Passion du Christ. Je t’ai emmenée ici cet été… Aujourd’hui c’est un jour venteux et froid de février. Le mistral est sans pitié. Je me suis assis sur les marches, regardant vers ma petite maison cachée entre les collines en contrebas. Et j’ai observé. J’ai contemplé le paysage. Les dents de Fourcade, le pic de Bertagne et toute la chaine de la sainte Baume qui court vers l’est. Malheureusement d’ici on ne voit pas la mer. Si colossale et absente. Tout comme toi… Il m’arrive encore, même après tous ces mois, de te chercher dans le lit. Alors c’est le désastre, le grand effarement. J’ai contemplé cette campagne que j’aime tant. J’ai dénudé ma vie aussi. Vidé la remorque à souvenirs. Feuilleté le livre des milliers de jours passés. Restent peut-être un milliard de secondes si le Seigneur est clément. Ça laisse le temps de réfléchir. J’ai prié un peu. Pensé à ceux qui restent. Ils sont si peu… et si précieux. D’horreurs en terreurs on élague, on taille, on affine, on rend la pierre tranchante et l’arbre prêt à se redécouvrir. Mais toi… Toi, monolithique et impossible. Toi je t’ai perdue à jamais. Les souvenirs sont fades et contrits. Trop douloureux. Je me suis enduit d’amertume. Baigné dans un lac glacé d’angoisses. J’ai fait le deuil de la Grande Défaite. Il ne me reste que mon Salut. Patiemment, je l’attends. Qu’Il me rappelle en son sein. Qu’Il me rappelle en son sein et embrasse mon front avec miséricorde.
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Fragments II
Chaque jour se tisse un nouveau fil d’or
allant de ton cœur à mon cœur
Comme un équivoque balbutiement
de l’inévitable grande œuvre
***
Par-delà les lacs glacés perchés sur les montagnes
se dresse l’étendard de tes désirs contentés
Aucune miette ne se perd
Aucune fêlure ne vient gâcher la cavalcade
***
Bouches crues et salées
le long des falaises opalines fouettées par la mer
Tu regardes vers l’impossible
en comptant tes pas
***
Feulements dans la moiteur du soir
c'est toujours la bataille quand tu défais tes cheveux
Les voilà tombés sur tes épaules
et avec ton air de madone tu attends que les étoiles s’allument
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Fragments I
Sous la lune suspendue
perlent tes larmes ensanglantées
Et le cimetière des horreurs glacées
déborde de toute part
***
Féline est la main est la main qui s’enroule à ton cou
et de brisures en meurtrissures
se révèlent tes tourments blêmes
Je malaxe la chair comme un onguent
de l’âme retrouvée
***
De la poussière des blés qu’on fauche
émane une odeur âcre
Celle de la fin des choses
souvenirs ballotés comme des bouteilles jetées à la mer
***
Ô délices de grâce évanescente
Je vois devant nous mille et une promesses rugissantes
Certitudes boiteuses enrobées de miel
je goûte au nectar comme au jus de ton abandon
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L’Univers la Matrice et le Tout
Tes pas félins sur les remparts
Dans tes yeux je vois la pureté de l’eau des montagnes
Je vois l’innocence du nouveau-né
La grandeur des pyramides
L’étourdissement des bacchanales et
Les désirs assoiffés de la Grande Recherche
L’insoupçonnée allégresse lentement tisse sa toile de velours
Autour des nymphes et des chérubins
Et tes joues empourprées te donnent la suavité d’un ange
Tu manges des étoiles
Je te regarde cueillir avec grâce l’immensité des possibles
Ton étreinte…
Si riche
Si poignante
Ténébreuse et hurlante
On dirait un Adieu mais c’est bien un Toujours qu’elle crie
Ton étreinte a le goût d’éternité
Et cette saveur réveille les morts
Je rêve que je t’emmène avec moi
Jusqu’aux confins du désert indévorable
Là où pousse l’amour
T’emmener aux confins du désert pour que tes yeux s’ouvrent en grand
Alors je caresserai ta nuque entre tes cheveux noirs
Et j’embrasserai tendrement ton cou jusqu’à atteindre ton épaule
Désirs cruels comme une odeur de sabotage
Des détours et des songes
Pulsions insensées
Sans tête
Animales comme tes gémissements
Epaule contre épaule
Mes doigts courent sur ta peau d’olympe
Et les sens se réveillent en transe
Rendent muette la raison
Pour sonner au diapason de l’insaisissable
Croquer un bout d’impossible
Enchevêtrements de passions de la première heure
Le soleil vient se noyer rougeoyant dans les larmes de l’océan
Encore faut-il enjamber la mer
Lécher le sel et caresser ta peau frémissante
Au chevet de l’heure dorée
Ta bouche onctueuse et ton abandon aux étoiles
Que faire de tous ces cris
Ces hurlements emprisonnés dans la poitrine et dans le ventre
Comme un fauve
Prêt à bondir
A déchirer les chairs
A l’orée d’une jungle aux méandres impénétrables
Que faire de tous ces cris que seules tes caresses apaisent
Avec tes mains bien faites
Avec tes mains en joie
Dans le silence d’une coursive en colonnades
Bordée de marronniers en fleurs
Roses et blanches
De la mousse sur les marches qui escaladent vers la chapelle
Le grand saut
Un radeau dérivant sur les eaux noires d’encre
S’ancre les balbutiements du grand Inquisiteur
Innocents et purs
Dérive loin de la colère de Dieu
Dérive dans l’ouate des amours dévorés
Jusqu��à atteindre le golfe de la félicité
Bordé d’une extase fière et lourde comme un monolithe d’or
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Un point noir sur l’horizon
Je suis la tempête de tous les vices
Hurlez criez j’arrive
Enveloppez-vous d’amour et de vertu
Peut-être alors je vous épargnerai la disgrâce
Champs de tournesols et blés fauchés
Torrents de montagnes et cimetières abandonnés
C’est dans les tranchées de l’exaltation que vient souvent s’asseoir l’amour
L’incertitude est balayée par la chaleur des cœurs battants
Le doute écrasé par l’étreinte des amants
Et les champs sans fin de tournesols apaisent les dernières hésitations
Appuyé contre un ballot de paille
Ta tête posée sur mes cuisses
Ma main caresse tes cheveux de jais
Et tu serres mon autre bras contre ta poitrine
Je voudrais que tout s’arrête ici
Quitte à en mourir
Car dans cet instant tout est accompli
Consummatum est
Et le temps coule comme un fleuve emporte tout
Désirs et chagrin
Amour et trahison
Cadavres et bouts de bois
Tout roule jusqu’à son éternité
Et c’est dans le dépouillement le plus total qu’il faut savoir embrasser sa mort
C’est elle qui ferme le cercle de l’existence
Qui ne meurt pas n’est pas vivant
Ballots de paille et champs de tournesols
Clairsemés de coquelicots
A perte de vue
Sous la chaleur torride de juillet
L’azur du ciel épouse ce jaune exquis
Bleu royal se reflétant dans tes yeux noirs
Quel délicieux labeur que l’amour exalté
Quand il trouve seul les réponses
Ou ne se pose même pas de questions
Ailleurs c’est le désastre
Quand il n’y a pas de place pour deux sur le grand plongeoir
C’est toujours l’un ou l’autre qui chute et s’égare
Parfois les deux disparaissent dans le labyrinthe des amours perdus
Hurler dans les ruines
Sans même obtenir un écho
Hurler dans les ruines histoire de moins pleurer
Hurler à en perdre la voix
Hurler pour croire encore à la belle pyramide
Dans les ruines…
Je marche sur les remparts de la citadelle ocre
Face à l’océan argenté et les falaises de l’autre bout du golfe
Tout est désert et un instant un sentiment de félicité me soulève
Et la marée inlassable se jette contre les falaises
Sous le soleil brulant
C’est ici que je t’ai vue pour la dernière fois
Tu es partie je suis resté
A moins que je sois resté et toi partie
Quelle importance ?
Rien ne sert de compter les morts
Tout le monde perd en amour
Il n’y a pas de rémission possible
Quand on a tout consommé il ne reste même plus de mots
Même la langue s’engourdit
Les cœurs sont exsangues et les âmes poignardées
Tu es partie…
Dans ta jolie robe bleue et blanche
Et tes sandales
Ton sac de coton en bandoulière
Tu es montée sur le bateau
Je t’ai vu de dos essuyer tes larmes
Quelques instants plus tôt nous étions face à face
Dans une dernière étreinte je te demandai pourquoi fallait-il que tu partes
La voix tremblotante et des larmes plein les yeux
Parce qu’il le faut
Il faut quoi
Il faut fuir la mort
Il faut vivre et ici cela court au massacre
A la tragédie
A la blessure grave
Alors je pars…
Je n’aime pas le goût du sang
Je pars pour que toi comme moi nous puissions atteindre la résurrection
Et embrasser un meilleur amour
Il n’existe pas de meilleur amour
Bien que le notre agonise
Tu as relâché ton étreinte et tu es partie
Un point noir à l’horizon
Toute ma vie tout mon cœur
Un point noir à l’horizon
Et les champs de tournesols se jettent à ma mémoire
Tes cheveux noirs
Et des coquelicots fanés
Tout
Un point noir sur l’horizon aiguisé comme un adieu
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Inatteignable horizon
Perles nacrées voguant sur les horizons salés
Dans l’embrun et les ravages
Telles des funambules aux yeux bandés
Larmes amères coulant sur le repos des braves
Des braves écorchés
Ecartelés entre le néant et le tout
Indicible noirceur
De vagues en vagues
Inlassable
Eternité sublime c’est déjà la famine
Hurle
Hurle et crie encore
Voilà la déferlante
Voilà que tout arrive comme un cheval sans tête
Abominable et fascinant telles les promesses d’un amour perdu
C’est le raz de marée du renversement des possibles
Le ciel est noir et la terre en feu
Et nos âmes flottent augustes entre deux enfers scarifiés
Lentement la lame pénètre la chair ouatée
Douce et diaphane comme les ailes d’un ange
La douleur est absente et le sang vermillon
Il coule et se répand comme une perfide calomnie
Ô cruel mensonge transpercé de doute
Les yeux fermés
Il coule
On presse la blessure
Blessure grave comme un adagio
Tragique telles les hésitations des cœurs massacrés
Des cœurs émiettés auxquels il ne reste que le silence et son amertume
Le sang coule
On presse la blessure
Bientôt il s’arrêtera et ne laissera que des souvenirs rances et une cicatrice
Seul témoin
Dans les chairs
Marquées à jamais comme l’épitaphe d’un instant hurlant dans des ruines
Enfin derrière les yeux clos apparait l’heure dorée
Féline et lascive
Odeur de chèvrefeuille
Le soleil rougit sur l’horizon et les vagues inlassables charrient les regrets des âmes égarées
Noyées en mer
Jetées des falaises opalines
Empalées sur l’injustice du jour à venir
Que reste-t-il ici qu’un impossible amour
Et des pulsions réfrénées
Auxquelles on coupe les ailes
Pourtant ton corps embrasse le mien
Embrasse le mien sur un banc du square de la rue du Moulin Vert
Ton corps enlace le mien et nos bouches avides explosent et se dévorent
Impérieux est le désir
Absous de tout péché
Désir diaphane et exalté à la fois mais qui exhale déjà les balbutiements d’une stérilité douloureuse
L’odeur putride d’un amour volé
Un amour suicidé et bordé dans un linceul immaculé
Où allons-nous
Sans doute nulle part
La route s’arrête là où reprend la vie
Les rêves vivent dans l’incorruptible nuit ou dans l’obscurité des fantasmes
Là où le jour se farde à son bon vouloir
Princier et hautain
Laisse couler le temps
Comme la neige fond
Laisse couler le temps vers un autre monde
Une autre réalité
A l’aube l’horizon est bleuté et Mars brille au-dessus des collines
Je ressens ta chair
Ton odeur m’assaille
Palper la chair
Malaxer
Malaxer la chair laiteuse jusqu’à ce qu’elle rougisse
Malaxer la chair rugissante et prendre le raccourci vers la fusion des corps
Trempés de sueur à la faible lueur d’une vieille lampe à la lumière orangée
Malaxer…
Un instant
Reprendre son souffle
Trop perçants sont les souvenirs
Juste un instant enveloppé dans ton odeur de madone
Dans les cols ariégeois trempés de bruine je gravis les pentes
Extasié dans ma solitude
Epanoui dans ma souffrance
La seule qui soit bonne
La seule qui soit douce
Emerveillé par le silence des hameaux et des arbres
Et mes roues qui dévorent le bitume
Alors je rentre
Je rentre dans ma tanière
Un tombeau emplit d’une solitude sans écho et de désirs aux yeux crevés
Longtemps j’erre dans la pénombre des approximations du cœur
Dans les méandres marécageux des passions réfrénées
Le cœur ne pense pas il hurle
Et froidement la raison l’étouffe
Mais le pur amour est celui que l’on entend crier même dans le silence
Entre les murs et les fissures sentimentales son cri résonne
Que faire de demain quand aujourd’hui est déjà trop tard
Il faudrait être deux et jeter le moribond dans une basse fosse
Et alors désormais nus attendre que le Sublime ouvre ses bras
Comme un Christ aux yeux percés de Lumière
Et du haut des falaises j’attends l’Eternel fusse-t-il toi
Mon seul salut
J’attends ton regard amoureux pendu à mon cou au son du chant de l’Autre-Rive
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La nervure
Il existe une nervure, aiguisée comme la mort, qui s’étire sous la peau depuis les affres de l’âme jusqu’aux confins de l’espoir. Saillante et boursouflée comme un sourire de clown, elle relie l’indicible à son impossible étoile. Guidée par Hadès jusqu’aux portes des ténèbres. Un Hadès émerveillé de tant d’audace, lui qui jamais ne pousse les portes dérobées de son Sacro-saint Enfer. D’où vient cette pulsion, cette embryonnaire pureté qui cherche quelque chose qu’elle ignore ?
Enlacé dans la nuit noire d’un mois dont j’ai oublié le nom et l’odeur. Je suis blotti entre mon horreur et l’aube à venir. Tes doigts ne courent plus sur ma nuque. J’y sens désormais le souffle fétide de la faucheuse endimanchée. Mes sanglots sont ma deuxième langue. La première je joue avec et la troisième est tailladée, elle s’étouffe dans son sang. Comme le jour se lève, cuivré tel des cheveux anges, je vois les blés brûler jusqu’à éblouir les portes de l’Empyrée. Le délice se cristallise ici. L’extase flotte, fière et tendue, au sommet du mat de mon intouchable. La nuit est morte. La gorge tranchée. Elle reviendra, prodigue, comme l’Agneau qui se tient debout.
C’est toujours avec une insondable ambivalence que j’embrasse la souffrance quand elle me prend aux tripes. Je veux la fuir, la tuer, l’ignorer, être plus fort… Je n’y parviens jamais… Elle colle à la peau. A vrai dire elle est ma peau. Comment me détacher de ce cancer ? Le suicide ? Ça n’a rien de romantique. Et on ne peut fuir son ombre. Non. La souffrance, on doit la boire, bien la vivre. Rilke, dans Les Cahiers de Malte Laurids Brigge, nous parle de la nécessité de bien souffrir sa mort. Mais bien vivre sa souffrance ne signifie pas se lamenter et crier à l’injustice, car toute choses est Juste de part son existence, c’est intrinsèque. A l’opposé, cela ne requiert pas une dévotion aveugle envers les châtiments divins. Il faut trouver son milieu, sa gravité, sans tristesse ni extase, dans une aussi simple que douloureuse souffrance qui souvent ne dit pas son nom.
La marée va et vient. La grève est étroite et bordée de fastueuses maisons qui regardent la mer. La marée va et vient, comme le sang gicle de mes veines. La marée va et vient, implacable, si fidèle dans son immuable. La marée va et vient, juste. Juste. Va et vient comme les horreurs de mon âme qui ne trouvent pas de mots. Silence sur mes yeux clos. Dans la douceur du soleil qui filtre à travers les paupières. S’assoupir. S’assoupir aux frontières du coït aquatique. Et qu’elle m’emporte la mer, qu’elle m’emporte avec toi… Je paie le ticket pour l’oubli de mon existence. Et mes yeux se rouvrent sur cette grève qui ne connait pas le temps qui passe.
Je paie le ticket pour l’oubli de mon existence et j’amorce ma descente vers ma dernière demeure. Mes yeux sont crevés et je tiens mon cœur chaud entre mes mains. Il bat encore. Pas si facile de mourir. On n’a pas l’habitude. J’aperçois la lumière à l’orée des ténèbres. La patience et l’abnégation sont le carburant de celui qui vit dans le tragique perpétuel de sa douleur. À s’en tailler les veines, courir le long des falaises, et hurler nu qu’il est le roi du monde, un immortel. C’est une question commune qui germe depuis les douleurs profondes : « Si j’arrive à tenir ces assauts répétés, cette violence muette, que je me relève. Que je me relève même amputé de toute possibilité. Qu’est-ce qui parviendra à me tuer ? » Je suis immortel crie celui qui ne peut que croire en l’éternel ou mourir. Car le reste est trop vaporeux, trop irréel…
Qu’importe, cette nervure sous ma peau tailladée mène au repos des braves. Et ceux qui connaissent l’enfer au sein du corps charnel et de l’âme exaltée que leur a prêté le seigneur, peuvent entrer au Purgatoire la tête haute.
Mes mains seront propres.
Mon cœur épuisé, mais noyé de rêves.
Mon âme à genoux.
Et les derniers seront les premiers
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L'abîme
Cours vers l’abîme. Cours. Libère-toi de l’onguent funeste qui colle à ta peau blanche. Cours vers l’abîme, ouvert de toute part, démesuré jusqu’au vertige tendu comme un soleil noir. Ne feins pas la mort du rêve et les hurlements des Walkyries. Embrasse ton horreur dans toute sa purulence, ton salut se dresse au-delà de cet impossible. Et c’est dans une effusion ardente que l’éternité t’enlacera.
Sur les pentes montagneuses et gorgées d’eau d’un pays oublié, se cache l’absolution des désirs inavoués. En farandole, l’innocence cherche son guide vers l’éternelle pureté. Et c’est dans une grâce divine que les derniers souvenirs fleurent à ta mémoire. Abandonne toute espérance. Laisse glisser sur ton âme les murmures de la tragédie. Et l’odeur… L’odeur effroyable du sang séché. Les yeux révulsés de tes cauchemars. Tout ça n’est qu’un passage. Un pont vers l’éternel. Un miroir sans reflet qu’il faut croire aveuglément. Abandonne donc toute espérance et ferme tes yeux pour mieux suivre le guide salvateur à travers les ténèbres rugissants. Abandonne toute espérance car elle est bien trop lourde à porter pour le voyage vers la douceur d’un soleil levant. Quand il surgit de l’horizon fardé d’orange et de jaune. Incandescent comme l’omniscience de la Lumière Eternelle. C’est une nouvelle aube qui te tend les bras.
Cours vers l’abîme. Je ne vois que cette urgence. La seule syllabe. L’unique réalité. Inévitable abandon qui dévoilera la renaissance qui s’épanche de l’exactitude matricielle. Pourquoi partir, te lamentes-tu ? Pourquoi fuir lorsqu’on a tout perdu ? Pourquoi ne pas mourir ? Refuser de respirer. Refuser d’entendre et de voir. Ne plus sentir. Anesthésie macabre. Fondre… Fondre comme des flocons égarés sur une fleur blanche perdue dans les hauteurs. Disparaitre ici…
Il y a dans l’abandon une infime lueur que le désespoir étouffe. Il s’agit de s’offrir aux rêves impénétrables de la révélation. Le papillon quitte sa chrysalide pour virevolter, gracile, entre les fleurs de la garrigue assoupie. Virevolte comme un acrobate jusqu’à sa douce mort. Des fleurs fanées. Souvenirs du faste de la douceur d’un amour colossal. Ensevelie sous des couches amères de désillusions. Le cœur en sang, le cœur en miettes. Il n’y a plus que les ténèbres. Et la douleur atrophie toute pensée, tout mouvement. Admettre son insignifiance c’est faire un pas vers la renaissance. Accepter son horreur c’est payer le passeur qui t’élève aux frontières de l’Empyrée.
Il ne s’agit pas d’oublier les bons et les mauvais jours, mais de croire qu’au-delà de l’abîme, une fois la Bête éventrée, jaillit la Lumière de Celui qui se tient debout. Renaitre par-delà la nuit froide et immuable comme l’acier. Aplatir la perception et frissonner sous la chaude caresse de l’éternité à construire.
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Gouffre
Je ne suis pas au bord du gouffre, c’est le gouffre qui me borde. Dans la Sainte Lumière s’évanouissent les souvenirs. Les stigmates de ta peau ouatée nervée dans la mienne. L’odeur de ton sang qui perle sous ta nuque. Dans la Sainte Lumière mes démons se dévorent entre eux. L’épreuve tisse sa toile comme un cancer. À l’étouffée. L’horizon est blême et la force m’abandonne. Je voudrais me baigner nu dans cette mer glacée. Plonger et disparaître. Plonger et disparaître dans les entrailles matricielles. S’ouvrir les veines. C’est le gouffre qui me borde. Prisonnier d’une île hostile plantée au milieu de nulle part. Entre hésitation et chaos.
Je sens mon cœur trembler à mesure que ton souvenir m’assaille. Ton aura, diaphane et pure, flotte comme un étendard sur l’horizon éventré. Et c’est dans un vacarme assourdissant que mes organes se fragmentent. Le souvenir me dévore et ma chair perd sa substance. Qui y a-t-il entre le corps et le néant ? Poussières d’étoiles... Un chat passe sur les remparts de ma mélancolie. Un instant tout s’arrête. La lumière est crue comme au dernier jour. Les corneilles chantent leur Requiem et l’air est acre comme l’Abîme. Ici tout se suspend. C’est le point de non-retour.
Je ressens les étreintes sous le ciel enflammé. Ton souffle sur mon épaule et tes mains égarées. Les lumières de la ville. Oranges et rudes sous une pluie triste comme la fin des choses. Nos nuits éparpillées. Colossales et cérémonieuses. Dévotion envers l’éternelle promesse. Pendu au souvenir de ton corps couvert d’or, j’erre dans les limbes de ma folie en devenir. Toucher des doigts l’impossible et se brûler à en perdre toute contenance. J’erre dans les limbes d’un massacre inévitable. L’absence grignote les dernières chairs. Abrupte est la chute. C’est un nuage noir qui vient enrober tous mes désirs. Il me coupe les bras, me lacère la langue, lentement je disparais.
Dans le dédale de mon âme mes démons se dévorent entre eux. L’un nourrit l’autre et l’autre nourrit l’un. Ils hurlent comme des Walkyries. La morsure est cruelle. Mais il n’y pas de paix sans désastre. Il faut manger son horreur pour faire pousser des fleurs. Les yeux grands ouverts face à l’atrocité des âmes tailladées. Croulant sous le mensonge et la trahison. Boire sa mort pour renaitre. Tout le monde peut renaitre de ses cendres, seulement faut-il savoir souffrir. Sans résistance ni amertume. Les deux pieds plantés dans l’inévitable tempête. Salvatrice est la douleur à qui sait voir au fond de ses yeux. L’espoir. D’un nouveau jour ou tout serait pardonné. Un nouveau jour où je pourrais de nouveau te serrer dans mes bras assoiffés.
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Derrière l’horizon
L’impossible est la chose la plus palpable qui transperce les amoureux transis de passion. Le reste se noie dans les bouches voraces et écumeuses. Et c’est dans une insoutenable lueur que les désirs se purgent. Saccadés. Houleux comme la mer.
Du haut des phares, à la proue du monde, se dessinent les nervures d’un destin grandiose. Et les deux monarques pavanent sur leur trône. Dans la grande pièce drapée de soie, l’or éblouit tout. L’amour irradie sa chaleur suave et maternelle. Revenir à l’essence. À ce point insaisissable entre l’extrême et le néant. Chercher l’origine pour tracer un trait jusqu’à la quintessence de l’amour enguirlandé. Et gravir, augustes, les marches de la sainte félicité.
Petits pas de louve dans la hêtraie noyée sous la lourdeur des gouttes. Avancer à l’aveugle vers les bras de Dieu. Sentir dans l’instant l’immanence de l’âme. Ame qui cherche son guide dans l’épaisse forêt de tous les possibles. Naviguer loin, naviguer fort. Prendre la mer et ne jamais la rendre. Déposer des mots sur l’horizon pour qu’ils se gavent d’éternité. Trempé d’embrun, dévorant les vagues une à une. Ne rien rendre avant le dernier jour. Tout chaparder, le soleil, les oiseaux et ton odeur de madone. Tant qu’il y aura des hommes la nature sera belle. Belle face à la dégénérescence. Belle face à l’horrible profil de l’âme humaine torturée. Belle comme toi. Elixir.
Puis. Regagner la terre. Un pincement au cœur. Se retourner vers l’immensité vertigineuse. Combien de grains de sable sur cette grève sauvage ? Plus encore que les battements de mon cœur. Plus que la profondeur de tes yeux en éventail. Et combien de gouttes d’eau dans l’océan ? Le trapéziste moqueur va et vient d’un bout à l’autre de la crique. Deux échassiers géants tiennent son trapèze d’argent tandis qu’il virevolte à en perdre la tête. Le trapéziste moqueur va et vient et notre amour saccadé retient son souffle. L’on entend que le bruit de l’air qu’il déplace. Même la mer s’est tue et a figé ses vagues un instant. L’instant où tout arrive. Le seul où une porte s’ouvre sur l’empyrée, les bras grands ouverts et la mansuétude obséquieusement dispensée.
Ah, j’ai vu tant de choses en naviguant par-delà l’horizon. Tant que je ne sais plus compter. J’ai appris à jouir à la place. À caresser tendrement les blés fauchés. Tenir des coquelicots entre mes mains tremblantes. Me noyer dans les volutes du ciel azur clairsemé de nuages doux. Pleurer de beauté et de tendresse. Te serrer fort dans mes bras jusqu’à ce que le cœur m’en tombe. J’ai appris à souffrir ma peine jusqu’à ce que des fleurs poussent dessus et viennent toucher le ciel. Et tournons sur le carrousel, coincés entre les crocs de la vie. La vie d’or. La vie de rêve. L’impalpable douce candeur d’un baiser sur tes yeux clos. Tournons encore. Jusqu’à l’ivresse, la petite mort. Les bras en croix, dans les hautes herbes. Se chamailler, se retrouver. Sous le grand chêne, qui touche le ciel.
Partir.
Voguer sur une barque sans rame, dans un désert d’eau sans âme. S’égarer avec délice. Pour garder la surprise de nouveaux horizons. Et nous glissons vers l’éternel. Vers cette ligne au loin qui cache l’infini des possibles. Vers ce point hurlant dans le ciel congestionné. Ce point lourd comme l’abîme. Ce point cru d’où s’épanche tout l’amour abasourdi, d’où coule toute la passion tumultueuse. Ce point cru d’où exhale ton odeur qui emprisonne. Emprisonne les cœurs et les donne en pâture à la beauté. Là, aux confins du réel et de l’imaginable. Où tout semble s’assembler comme autant de merveilles à conquérir. De ce point, rayonne la lumière éternelle.
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Le poids de mon âme
J’entends mourir les mots crus dans des sanglots de princesses fanées
Entre quatre murs drapés d’or
Et je ne connais toujours pas le poids de mon âme
Des mots aiguisés comme l’émeraude de tes yeux
Et je ne connais toujours pas le poids de mon âme
Sur le chemin qui mène aux rochers j’entrevois la mer azur et lourde
Comme un écrin de velours mes mains glissent sur ta peau
Partir
Revenir
Devenir un souvenir
Et s’égarer
Un gribouillis sur du papier à musique
L’air fier sur une photo abîmée
Une photo qu’on a trop regardée
Où l’on a cherché obstinément l’odeur suave et rassurante du passé
Partir
Revenir
Devenir un souvenir
Et disparaître
Dans les effluves des mémoires entortillées
Dans les étages des cimetières à coulisses
Disparaître ici
Sous tes yeux torturés
Comme un Christ
Sous un soleil ardent
Vue sur l’éternité
Comme un Christ
Toujours sans connaître le poids de mon âme
Je préférais nos errances dans la ville cabossée
Le parvis de l’église
Cette église blanche comme une colombe dont j’ai oublié le nom
Je me rappelle de ses marches chauffées par le soleil hurlant de l’après midi
Parfois nous entrions quand tu avais trop chaud
Moi j’ai toujours aimé la chaleur d’enclume d’un dévoué soleil d’été
Le silence à perte de vue
Dans chaque village d’ocre et de tuiles
Se tremper dans les fontaines de grès sur la grand place abritée de platanes
Oublier le temps et revenir au port
Sans cesse
Chercher la mer et le poids de mon âme
Je préférais nos errances dans la moiteur du soir
Au crépuscule
Au crépuscule tendu
Là où tout meure plein de promesses
Là où chaque malice dessine la courbure de ton sein
Au crépuscule tendu et fier
Arraché à la torpeur de nos journées inoubliables
Noyées d’amour de volupté et de paresse
Ta chair dans ma chair
Sur les extases mousseuses de l’attente enivrée
L’attente de l’impossible étoile
Vierge et olympe
Glorieuse par delà toute l’épaisseur du doute
Ta chair dans ma chair
Le sang qui coule tandis que je ne connais toujours pas le poids de mon âme
Dans le silence ébahi de mes rêves en disgrâce
S’échappent les effluves laiteux de ton cœur emmailloté d’un linceul d’or
Encore tu y reviens
Les mains dans la glaise
Les mains dans le sang
Dans ton souffle saccadé
Encore
La quête immanente des cœurs embrasés
En sourdine les timbales du septième jour annoncent l’Apocalypse
Disparaître ici
Avec le poids de mon âme
Entre tous
Que tout pardonne
Que tout caresse
Partir revenir et puis mourir
Le sang sur le sable
La danse des cyprès
Le dernier souffle derrière l’œil fondu
Gorgé de hurlements insubmersibles
Sous le ciel noir de la colère divine
Accourent le deuil et ses parures endimanchées
La brume épaisse prend à la gorge
Chacun son horreur chacun son pardon
Dans l’immensité des possibles ma détresse n’est qu’un point où rien ne se fixe que mon impuissance
Glas résonnant sorti des muettes ténèbres
Le dernier jour ouvre son âme et déroule le tapis rouge du salut éternel
Jette toi avec moi dans l’horreur sainte des jours oubliés
Pleure avec moi les amours déchirés
Encore brûlants entre nos mains tremblantes
Abandonne toi à l’inexactitude du souvenir
Et embrasse par milliers les marches
du renouveau
Derrière le Golgotha surgit la renaissance inespérée des parvenus
Embrasse cet amour jadis déliquescent
Déploie tes ailes cuivrées comme la passion nervée de volupté
Meurs comme je meurs
Et viens en mon sein
Sans ombrage
Sans peur sourde
Juste toi dans mes bras sous la lune pleine ou pas
Toi avec moi face à l’éternité du doute
Insubmersibles et beaux dans les champs moissonnés
Divins et monarques sur nos trônes sertis de diamants
A deux par delà les océans déchaînés
A deux pour vivre aimer et mourir
A deux pour ignorer le poids de mon âme
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Se perdre en mer
Sous la surface
Mer de tes rêves glacés
Se frayant un chemin dans l’immensité des possibles
Tenir ta voix entre mes mains
Avant que tu ne partes
Avant que tu ne cries des bulles dans le dédale aquatique
Je m’arrête un instant aux deux tiers du bout du monde
Je dérive dans une forêt d’icebergs
Je vois leur coiffe et j’imagine leur corps drapé de noir
Les abysses ne sont pas loin
Tu nages entre deux mondes
Tes rêves glacés dans une main et ta fantaisie dans l’autre
Tenir ta voix entre mes mains
Avant que tu ne partes
Je n’ai que ce désir
Je ne crois pas aux retours je ne vois que des adieux
On ne traverse pas les mers pour revenir
Même en le sachant
On se jette dans la grandiose meurtrissure
Même en le sachant
On s’écarquille sur l’horizon ténébreux et sur les fonds insondables
Quand reviendras-tu
J’ai peur de me perdre en mer moi aussi
D’aduler l’errance et sa sentence
D’y prendre goût
De pavaner à la barre d’un vaisseau voguant vers nulle part
Ou vers mes rêves d’enfants
Flétris
Abîmés par ma vie d’homme
Rendus muets par le poids des jours
Illisibles comme de vieilles lettres sur un mauvais papier
Combien déjà…
Et chaque fois le soleil se noie avant de revenir
Est-ce un miracle ou le symbole de l’aliénation
Eternel recommencement
Le frisson de l’infini qui dévore l’essence de toute chose
J’ai peur de me perdre en mer
D’y prendre goût
Je te cherche comme une impossible étoile
Je suis une route qui n’existe pas vers le sang de ma tragédie
Avant que tu partes…
Tenir ta voix entre mes mains
Avant que tu partes…
Te noyer dans mon amour
Toi qui aimes à courir derrière des parures rapiécées
Des robes serties d’or déchirées sous le poids du désir
Toi qui sens l’odeur du temps dévoré quand tu entres dans des pièces fantômes
Tu fixes le baldaquin de velours vert foncé comme s’il te racontait mille histoires
Et tu déambules avec grâce et légèreté entre les tropiques de ce monde merveilleux
Il ne reste rien des hommes que leur souvenir et leur désastre
La lumière les aveugle au lieu de les guider car ils sont trop impétueux
Tu tournes sur toi-même et mimes la piété de l’éternel
Et dans la mer
Où tu t’étales
Où tu te sauves
Cherches l’impossible
Tu es vulnérable comme un souvenir entre mille
Entre deux mondes
Inatteignable candeur
J’ai gardé l’odeur de ta pureté
Je la renifle avant de m’endormir et me rappeler tes mains douces
Je vais me perdre en mer
Ne pas revenir
Tout le monde ne peut pas comprendre
Mais tout le monde peut sombrer par envie ou par hasard
Je voudrais tout reprendre dans mes bras
Tout ramasser
Tout repêcher
Mais il ne me reste que ton empreinte
Peut-être j’en sculpterai les formes et les audaces
Les douceurs et les rêves opalins
Je ne sais quoi faire d’un tel trésor
Je sens son immensité m’assaillir
Avec une fougue indéfectible
Je vais rester
Rester en mer le temps que tout s’accomplisse
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La meute
C’est par-delà que meurt la meute
Par-delà que les affamés hurlent sous la lune implacable
Fine dentelle à l’horizon
Horizon découpé à la hache
Fine dentelle dont l’aube se drape
Sous nos yeux ignorants
Derrière c’est le vent et le sang
Je caresse ta joue tu embrasses mon épaule
L’odeur de la douceur des premiers jours fleure aux narines amoureuses
Le jour est doux et nous n’entendons rien d’autre que notre sang battre
Qui y a-t-il derrière la montagne du doute
Est-ce donc là que l’on parque ceux qui ont tout perdu
Pourquoi hurlent ils en vain
C’est par-delà que meurt la meute
La meute errante des sentiments à la peine
La meute de ceux qui ont tout brûlé même leur regard
Même leur âme
La meute qui hurle d’effroi sous la lune
Et…
Toi et moi sous un soleil sans voix
Écarquillés d’émerveillement
Absous de nos péchés nous croquons les fruits juteux
La lumière filtre entre nos désirs et nous inonde d’innocence
Enlacés la bouche dans le cou
Les mains courent sur les dos fiévreux
Et demain sera toujours brûlant
Jamais notre amour ne mentira
Même sous le déluge
Même à la peine
Même à la dérive
Ah !
J’ai la bêtise d’imaginer le pire
Pourquoi se sentir vulnérable aux commandes d’un navire insubmersible
Il est vrai qu’on en a vus sombrer
Il est vrai que certains ont fait naufrage
Criant seuls dans la nuit noire
L’eau glacée qui envahit la coque est pénètre dans les gorges
Pourquoi se sentir vulnérable
C’est vrai que la mer est effroyable
Belle et sans pitié
Avale et recrache
Avale et recrache
Enlacés sous l’orage nous sommes seuls au monde
Je te serre plus fort qu’il ne faudrait
Je voudrais que cet instant dure toujours
Toi et moi sous l’orage
Trempés et nus pieds
Avant de s’abriter dans l’église du village
Avec sa fraîcheur virginale et nos rêves éparpillés comme un millier de plumes
Nos rêves disséminés dans le palais de nos désirs
A recomposer
Vivre encore
Ces rêves insubmersibles
Ce nectar qui coule dans nos bouches avides et fougueuses
Où tout cela nous mènera ?
La félicité doit-elle toujours perdre et être sacrifiée sur l’autel de la dernière chance
Malgré le rire
Malgré l’amour
Malgré ta peau
L’intérieur de tes bras et tes yeux rebelles
Qui sait quand les effluves de la fin des choses se feront sentir
En attendant profitons car le désarroi tisse sa toile
Vivre encore
Ces rêves insubmersibles
Roche que les vagues effleurent à peine
C’est par-delà que meurt la meute
Les cygnes noirs
Les assassins et les simples perdants
Les noyés en mer
Trop de fois
Dont les bras ne répondent plus
Où seuls les hurlements désespérés résonnent dans la houle noire
Ici à la proue du monde tout ce dessine pour l’éternité
L’un sombre
L’autre exulte
Alors il faut prendre la mer
Prendre ses rêves
Dans un douloureux exil
Exil salvateur
Parmi les vagues la vérité ne peut se cacher
Et en observant l’horizon je verrai tes yeux brûlants
Et l’amour sera notre
La mer sera notre
Et l’horizon guidera nos pas vers la félicité suprême
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