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Avenida Infante Santo, Année 2, 6 septembre, 12h32
Lisbonne espace lisse
Il y a cette veille opposition entre espace lisse et espace strié.
L’espace strié, c’est Google Maps : carte et territoire à la fois mais grille, surtout, qui géolocalise, guide, situe, en compartimentant, classant, striant, et, finalement, fixant. Et les stries, ce sont les rues, les lignes qui nous les représentent, et les bulles orange indiquant un café, celles marron un point d’intérêt, les bleues un endroit où acheter quelque chose.
L’espace lisse, c’est l’étendue, la forme. c’est une absence (de ligne, de frontière) plus qu’une présence, une négation (le non-fini, le non-défini) plus qu’une affirmation, un chemin plutôt qu’un point. C’est le désert, l’océan, l’horizon, la page blanche ; et si c’est une ville, c’en est une que l’on continue à ne pas dé-finir. C’est celle dans le regard contemplatif de ce couple de retraités silencieux, attablé à la terrasse d’un café.
Nomade, on arpente la ville lisse, on en contourne les aspérités, on y nage. Sans fin, car elle n’en a pas.
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Année 2, 4 juillet, 0h43
“Ce sont souvent des amours secrètes, celles qu'on partage avec une ville. Des cités comme Paris, Prague, et même Florence sont refermées sur elles-mêmes et limitent ainsi le monde qui leur est propre. Mais Alger, et avec elle certains milieux privilégiés comme les villes sur la mer, s'ouvre dans le ciel comme une bouche ou une blessure.” Albert Camus, L’été
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Café/Restaurant Pão de canela, année 2, 14 juin, 14h54
[Déjeuner fille-mère expatriées] Fille (théâtrale) — Maman, est-ce que MOI je te parle des TES potes ? Non, eh bien TOI tu me parles pas de MES potes.
Mère (lasse, à la serveuse) — Queria a conta se faz favor.
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Prazeres, année 2, 1er juin, 17 heures
Le car GREENCITY dépose une quarantaine de touristes asiatiques sur le rond-point qui fait face au cimetière de Prazeres (”Lisbonne est de ces villes qui respirent la poésie et ce n’est pas un hasard si le mot lisboète rime avec celui de poète. Et pour preuve de cette poésie constante, quelle autre ville du monde eut l’inspiration de nommer l’un de ses principaux cimetières le « Cimetière des Plaisirs »”, a écrit d’un ton (faussement ?) émerveillé le rédacteur d’un guide en ligne cherchant à monétiser à peu de frais son site. Le mot Prazeres en question vient pourtant du vocabulaire religieux qui irrigue la toponymie lisboète – tiens, qui rime avec “pouet !”, aussi – et en l’occurence d’une dévotion à la Vierge Marie, dévotion étant apparue suite un miracle survenu – ou pas – comme tant d’autres au Portugal). 
Le car GREENCITY dépose une quarantaine de touristes asiatiques sur le rond-point qui fait face au cimetière de Prazeres, donc. Le but de ce jeu mobile incongru : descendre du car et attendre que parte le prochain tramway numéro 28, pour un trajet qu’aurait pourtant pu faire le car GREENCITY. C’est que le tram-vingt-huit n’est plus une ligne de transport, c’est le symbole marketing parfait de la Lisbonne traditionnelle, un kit prêt-à-faire-fantasmer. Le tram-vingt-huit, son intérieur en bois sexy, ses crissements follement attendrissants, son parcours sinueux qui vous bringuebale amoureusement, est par conséquent de plus en plus emprunté pour son utilité seconde de monowagon à city-breaker du Vaucluse ou de Hollande que pour son utilité première, celle de transport, après tout, public.
Sur l’étroit trottoir pavé qui n’en demandait pas tant, se presse alors un essaim coloré. Hors de l’espace réel de la ville, l’essaim se déforme et se reforme au gré des petits écarts faits pour une photo ; pour un étirement de ses muscles sursollicités par ces mille pérégrinations non-maîtrisées dans les “jolies ruelles escarpées” et autres “petits coins de paradis en plein cœur de la capitale portugaise” promis ; pour une photo ; pour un dépliage de mini-carte touristique ; pour un court moment d’isolement à l’écoute de son audioguide ; pour une photo. 
Le tram-vingt-huit n’arrive pas. L’essaim bourdonne. L’une de ses abeilles, rose depuis les baskets-confort jusqu’au bob, poursuit sa danse articulaire, et entraîne trois amies – violette, rayée de rouge, et aussi rose que la première – à faire de même : il s’agit de plier ses bras en mettant ses coudes à hauteur de ses épaules puis de faire mouliner alternativement l’avant-bras gauche et l’avant-bras droit, tout en pliant/dépliant deux groupes composés, l‘un, du pouce de la main gauche et des quatre autres doigts de la main droite, l’autre, du pouce de la main droite et des quatre autres doigts de la main gauche. Le mouvement est apprécié. Quelqu’un rote. Le vendeur de glace plonge les mains dans son tablier, regarde au loin : les petites abeilles sont trop pressées à attendre qu’elles ne l’ont pas vu et ne chercheront jamais à se demander si le cornet, c’est mieux que le petit pot. 
Le tram-vingt-huit arrive. Tout cela se tasse à nouveau, mais mieux : il ne semble y avoir plus un picomètre d’espace entre les uns et les autres. L’essaim, lentement, s’engouffre, entre petits cris d’excitation, mouvements de tête furtifs, gesticulation de mains. Une écolière et sa mère tentent de progresser au milieu de l’essaim, mais déjà, le tram-vingt-huit est plein. Il faudra attendre le prochain.
Silence. 
Six couples de septagénaires (entre 420 et 480 ans de vie, donc) français arrivent. 
— TIENS ! REGARDE C’EST LÀ LES BUS ! REGARDE ! 
Le glacier éteint sa cigarette.
Prazeres est donc aussi le cimetière du tourisme de masse, et on n’a pas fini d’écrire la chronique tragi-comique de l’entrechoquement des expériences urbaines vécues par ceux qui "passent” la ville et ceux qui la vivent. Pouet.
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JOUR 427
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Calçada das Necessidades, Alcântara, Lisboa
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Le jour où il fait plus froid chez moi que dehors
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Nécessités
“Não desprezeis as nossas súplicas em nossas necessidades” (”Ne méprisez pas nos prières dans le besoin où nous sommes”), dit la prière. La nécessité, c’est à la fois l'essentiel (ce dont on ne peut pas se passer ; les premières nécessités) et l'inévitable (le cours des choses : Nécessité, la déesse grecque de la Destinée et de la Fatalité). La nécessité ponctionne notre liberté : c’est l’obligation impérieuse d’accéder à certains besoins primaires (nourriture, soins, logement) et d’accepter les contraintes du monde. En portugais, l’une des périphrases utilisées pour désigner la Vierge Marie, c’est Nossa Senhora das Necessidades (littéralement, Notre-Dame des Nécessités). Pas de la nécessité, mais bien des nécessités : on attend de la Vierge qu’elle réponde à nos besoins primaires à nous, pas qu’elle fasse quoi que ce soit contre les contraintes (guerre, famine, inégalités) du monde. Cruelle lucidité.
La chapelle Nossa Senhora das Necessidades, à Lisbonne, était connue pour ses miracles. João V, le monarque absolu, la choisit opportunément pour y construire un couvent mais surtout le palais qui accueillerait les souverains du pays pendant près de deux siècles. La nation se met sous la protection de la Vierge, seule à même de protéger ses occupants dans leur situation de nécessiteux. Aujourd’hui, le palais reste le siège du Ministère des Affaires étrangères, et Necessidades est l’équivalent dans les médias portugais de l’expression “Quai d’Orsay”. Le palais das Necessidades, rose et baroque, s’ouvre toujours délicatement sur le Tage, tapi dans un quartier peu moderne, qui titille l’imaginaire du visiteur hivernal. On croit pouvoir toucher du doigt une Lisbonne révolue : de rares passants se promènent dans le romantique parc de 10 hectares du même nom (l’ancien jardin de chasse du palais, et sa petite serre ronde en verre), longent sans le savoir la muraille d’un ancien bastion, arpentent les pavés de ruelles aux noms héroïques (ruelle des Contrebandiers, traversée du Trésor, Place de l’Armée...). Sous le soleil pâle et le ciel blanc, s’y oublient les nécessités.
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JOUR 371
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Aeroporto de Lisboa, Lisboa
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Le jour où j'ai commandé une Margarida au lieu d'une margarita.
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Tarmacs
À Lisbonne, le tarmac est le même qu’ailleurs. Je l’aime pourtant bien, ce tarmac-ci. C’est parce que, je crois, les tarmacs sont la conscience de nos voyages. (Voilà, il fallait une phrase un peu définitive et mélo pour lancer le truc, bam, d’entrée. C’est pas mal, ça, la “conscience de nos voyages”. La “mémoire de nos passages”, ça marche aussi. Ou la “mort avérée de nos bagages”, tiens, aussi, quand les lanceurs de bagages sont particulièrement blasés, mais bon va enchaîner un texte de 1 000 mots là-dessus après.) Sur les tarmacs, la foulée est pourtant brève. Peu sépare, pourtant, la salle d’embarquement et ses portes vitrées de (qu’on distingue déjà) la passerelle low-cost de l’avion béant et affamé de voyageurs. Mais l’air, après d’interminables minutes qui se sont irrévocablement refermées sur nous dans un aérogare étanche et fourmillant de congénères moites, nous saisit — c’est agréable. L’air nous saisit et le kérosène nous monte au nez — curieusement, c’est agréable. On réalise (sauf si on pense déjà à la place qu’on a et à “bon je monte devant ou derrière ? C’est chiant je suis à la 17C. 17 c’est plus derrière ou devant ? De toute façon je vais faire la queue 20 minutes le temps que chaque gros manche de touriste prenne le temps de hisser sa putain de valise 45x36x20 dans le compartiment dédié”), on réalise, dis-je, qu’on est en train de quitter ce qu’on est en train de quitter. On regarde, un peu las et soudain mélancolique, les gros grains bitumeux du tarmac, se disant qu’on va bientôt filer l’air et embrasser du coton. On regarde, un peu las et soudain grave soulé, la passerelle low-cost de l’avion béant et affamé de voyageurs, se disant qu’on sera très bientôt enfermé dans une cabine étanche et fourmillante de congénères moites et que ce sera l’avion qui dans ses bottes de sept lieues filera l’air et embrassera du coton. On regarde le tarmac, et l’horizon se dégage une dernière fois, au ras du sol, entre les pieds des agents chargés des bagages et ceux des agents de sécurité, entre les petites roues ridicules des gros avions, entre toutes sortes de véhicules dont l’utilité nous échappe, vers les reliefs sinueux, au loin, loin de la ville. À Lisbonne, le tarmac est le même qu’ailleurs. Je ne me souviens pas de ses contours, de ses formes, de ses lumières et de ses odeurs, à lui, mais je me souviens, quand même, de lui. Du lieu que je retrouve, du lieu que je quitte.
Et 17C, c’est plutôt derrière.
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JOUR 338
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Café Tati, Cais do Sodre, Lisboa
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Le jour où je suis resté tellement longtemps dans un café que j'ai fini par tester toute les tables
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Impression Café Tati
« Un jour viendra où l'observation innocente d'une simple carotte engendrera une révolution ». C’est une citation du Cézanne contemplatif tapi dans son dernier atelier des environs aixois qui termine le menu du Café Tati que je referme alors j’applique Cézanne mais il n’y a pas de carotte donc j’observe innocemment l’absence de regard de cette étudiante face à moi noyée dans le fond de son café au lait et entre les lignes d’Ecrire de Marguerite Duras et j’observe innocemment cette voix chuchoter dans mon dos à son interlocuteur la traduction en français d’Os Irmãos Karamazov alors bon c’est pas la révolution mais c’est bien quand même.
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