Le Lycanthrope
Je dis:
Les chants nuptiaux résonnaient encore.
Mais on ne se marie pas en cette saison.
Et la robe blanche, filée d’or et de pourpre,
Et la couronne brûlante sur sa tête blonde,
Et les cheveux tressés et relevés,
De ma chère je regardais.
Les chants résonnaient encore,
Et les gémissements de sa mère,
Et les rugissements de ses frères
Déchiraient et le ciel, et l’air, et la forêt,
Et les yeux d’un père durci fixaient sans se mouvoir
Les pas qui s’évanouissaient dans la neige grise
Près du chemin, de nos jours oublié.
Elle quitta ses gens, sur ce chemin.
On la pleura, comme on m’avait pleuré,
Mais il n’y eut jamais de regret
D’avoir laissé partir une si belle brebis.
La fiancée quitta ses gens, sur ce chemin,
Chargée d’or et de miel, rayonnante comme le soleil,
Blanche comme la lune, froide comme les étoiles.
Elle pénétra dans les bois,
Impitoyables, ils l’avalèrent,
Et jamais ne la rendirent à son père.
Les chants cessèrent, la lyre se fit entendre,
Les tambours poursuivaient l’enfant,
L’exhortant à chaque pas,
Chassant la crainte, enhardissant son cœur.
La solennelle marche entre les hautes voûtes des noirs arbres
Semblait avoir été préparée pour elle,
Et sa voix s’élevait,
Ainsi je connus sa venue.
Cette voix adorée résonnait, s’approchait,
Mon âme trembla et je crus défaillir.
2. On ne marie pas les vierges en cette saison.
Pourtant, cousue sur cette aimable chair
La robe blanche, filée d’or et de pourpre
Annonçait l’heureux jour
Où la bien-aimée était amenée
Dans les bras de son bien-aimé
Mais elle venait seule, la fiancée,
S’unir à l’âme et la chair de son fiancé.
Comme tant d’autres avant eux.
Seule, elle se tint,
Les gâteaux de miel entre ses mains,
La cire coulait sur ses doigts roses,
Et la flamme illuminait son adorable visage,
La chère de miel, aux yeux de glace,
La chair de miel, fraîche et blanche,
Telle la neige qui cédait sous ses pas.
Seule, elle se tint,
Et les yeux durcis me percèrent,
Me percèrent l’âme.
Ma promise s’approcha,
D’un pas sûr et terrible,
Et sur la neige s’allongea.
A mes pieds elle se trouva,
Elle dénoua ses tresses,
Et ses blonds cheveux balayèrent la neige grise,
Et la robe blanche, filée d’or et de pourpre, tombée,
Vint égayer son visage.
Le jour était venu pour elle aussi,
L’heureux jour de cette union singulière,
Qui depuis l’enfance illuminait ses rêves,
Durant les nuits comme celle-ci,
Les nuits froides, placides et mourantes,
Où la lune, dévorée, ne connaissait plus sa place
Dans le firmament délaissé du blond soleil.
Souriez, belle enfant, voici venue la nuit.
3. Car je dévorai la lune et la laine,
Les blés d’été et les enfants d’hiver,
Vos frères et vos sœurs,
Et par votre don, ils seront protégés,
Et moi, bien-aimée, je retrouverai mon âme,
Que la sorcière avait ravie en une semblable nuit.
Or moi, sourire je ne peux point.
Car je dévorais la lune et laine,
Les blés d’été et les enfants d’hiver,
Vos frères et vos sœurs
Et vous étiez protégée et je vous aimais,
Mais par votre don, je retrouverai mon âme,
Que la sorcière avait ravie en une semblable nuit.
Et la vôtre s’enfuira, loin de mes bras
Qui ne serreront plus que vos aimables cendres.
Dieu pardonnera-t-Il jamais un tel péché ?
Répondez, ô sœur de mon cœur.
4. La Vierge parle:
Cette âme et cette chair qui ...
Lire le reste du poème sur mon blog:
Le Lycanthrope
3 notes
·
View notes
L’orée ou la poétique de l’errance
Ce jeudi 14 octobre 2021, le service culturel de l’université de Rennes 2 accueille deux artistes, Jean-Baptiste André, acrobate, danseur et metteur en scène et l’écrivain et dramaturge Eddy Pallaro, dans le cadre du festival Concordan(s)e où deux pratiques, l’écriture et la danse, se rencontrent. Nous avons pu assister à la représentation et interroger les deux artistes sur le processus de création.
Un récit ouvert
Le titre du spectacle, L’Orée, bien qu’énigmatique, renvoie aux notions de fiction et de réalité, à la limite qui subsiste entre elles, donnant lieu à un récit sans contexte, « à l’orée de la réalité et de la fiction » selon Jean-Baptiste André. Ainsi, leurs personnages n’ont pas de nom, pas d’espace temporel, ils les ont imaginés comme un « matériau ouvert » : libre à chacun d’imaginer son histoire. Dès lors le paysage et l’histoire des personnages naissent de la subjectivité du spectateur.
J’imaginais alors ces deux hommes sur les routes,
l’un fatigué de suivre l’autre,
ce dernier cherchant désespérément un sens à sa vie.
Le processus d’une création
Les contraintes imposées à la création d’un projet pour le festival Concordan(s)e sont multiples : l’espace réduit (6×6), mais aussi le temps destiné à la fois à la création du spectacle, du texte et de son interprétation, soit un mois1. Il devait être possible de le jouer n’importe où, dans des lieux qui ne sont habituellement pas destinés à accueillir ce type de création (médiathèque, bibliothèque, musée, etc.). D’autres écueils se sont imposés aux deux artistes : le temps de la représentation qui devait être initialement de trente minutes et la rencontre de deux artistes (chorégraphe et auteur) qui ne s’étaient encore jamais rencontrés. Mais Eddy et Jean-Baptiste ont un peu triché : leur œuvre dépasse le temps imparti et ils travaillent ensemble depuis 2014.
Le thème choisi, l’errance, et les contraintes plus ou moins respectées… Le spectacle a pris forme sous l’impulsion d’une énième contrainte qu’ils se sont imposé. L’auteur ne bougera pas, il sera au sol et le chorégraphe dansera, bougera – choisissez le verbe d’action qui vous convient le mieux. Une contrainte qu’ils considéraient comme caricaturale, au regard des postes qu’ils occupent. L’auteur spectateur, maestro des mouvements, se voit ici ballotté de part et d’autre, tandis que le danseur, ce pantin qu’on manipule généralement, reprend la main. Pour ne pas tomber dans la caricature, les rôles se sont inversés ; et ce faisant, l’écriture se met au service de la danse.
Cette création a été essentiellement nourrie d’improvisations et de modifications au fil des représentations. L’improvisation était tout à la fois textuelle et corporelle. Le texte s’est progressivement construit à partir de mouvements. Une partie reste écrite, planifiée mais ils ont décidé de garder une liberté, que l’on reconnaît à l’opéra, à la danse ou au théâtre qui révèlent l’imprévu ou tout simplement le vivant. La pratique du danseur est telle qu’il paraît impensable d’écrire comme on écrit pour le théâtre selon Eddy Pallaro. La danse et ses mouvements sont bien plus évocateurs qu’une intrigue ou une thématique.
15 octobre 2021.
0 notes
Errances littéraires dans le Montana
Elle pensa au mal qu'on pouvait faire à quelqu'un, un mal parfois incalculable, et puis il y avait aussi le mal qu'on se faisait parfois à soi-même, en s'endurcissant.
La fille du fermier, Jim Harrison
J'ai bien aimé ce recueil de 3 nouvelles et je trouve que la 1ère, La fille du fermier, est particulièrement réussie. Ces récits portent sur 3 personnages solitaires, chacun éprouvant des difficultés à s'intégrer à la société. Malgré cela ils sont en quête d'amour, en recherche de vengeance ou de rédemption et tentent de se construire en dépit de leur solitude et des épreuves qu'ils traversent.
C'est une très bonne nouvelle dont j'ai apprécié la lecture. C'est le portrait de Sarah, une adolescente isolée et solitaire qui tente de se construire seule en dépit de son traumatisme. C'est également une histoire de vengeance, que Sarah considère comme une condition essentielle pour avancer et nfin s'ouvrir au monde.
0 notes