Littérature mon Amour
Soir commençant, fumées courantes sur le ciel, fiévreuse première étoile, est-ce que tout, autour de nous, n'était pas aussi grave et aussi tremblant que nous-même ? Un homme, banni des éléments qui l'avaient jadis porté, rêvait amèrement...
Amèrement, -- maintenant j'en suis sûre. Il faut du temps à l'absent pour prendre sa vraie forme en nous. Il meurt, -- il mûrit, il se fixe. "C'est donc toi ? Enfin... Je ne t'avais pas compris."
Colette, Sido, 1930.
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Littérature mon Amour
"Enchantée encore de mon rêve, je m'étonne d'avoir changé, d'avoir vieilli pendant que je rêvais... D'un pinceau ému je pourrais repeindre, sur ce visage-ci, celui d'une fraîche enfant roussie de soleil, rosie de froid, des joues élastiques achevées en un menton mince, des sourcils mobiles prompts à se plisser, une bouche dont les coins rusés démentent la courte lèvre ingénue... Hélas, ce n'est qu'un instant. Le velours adorable du pastel ressuscité s'effrite et s'envole... L'eau sombre du petit miroir retient seulement mon image qui est bien pareille, toute pareille à moi, marquée de léger coups d'ongle, finement gravée aux paupières, aux coins des lèvres, entre les sourcils têtus... Une image qui ne sourit ni ne s'attriste, et qui murmure, pour moi seule : "Il faut vieillir. Ne pleure pas, ne joins pas des doigts suppliants, ne te révolte pas : il faut vieillir. Répète-toi cette parole, non comme un cri de désespoir, mais comme le rappel d'un départ nécessaire... Regarde-toi, regarde tes paupières, tes lèvres, soulève sur tes temps les boucles de tes cheveux : déjà tu commences à t'éloigner de ta vie, ne l'oublie pas, il faut vieillir !
"Éloigne-toi lentement, lentement, sans larmes ; n'oublie rien ! Emporte ta santé, ta gaieté, ta coquetterie, le peu de bonté et de justice qui t'a rendu la vie moins amère ; n'oublie pas ! Va-t'en parée, va-t'en douce, et ne t'arrête pas le long de la route irrésistible, tu l'essaierais en vain, -- puisqu'il faut vieillir ! Suis le chemin, et ne t'y couche que pour mourir. Et quand tu t'étendras en travers du vertigineux ruban ondulé, si tu n'as pas laissé derrière toi, un à un, tes cheveux en boucles, ni tes dents une à une, ni tes membres un à un usés, si la poudre éternelle n'a pas, avant ta dernière heure, sevré tes yeux de la lumière merveilleuse, si tu as, jusqu'au bout, gardé dans ta main la main maie qui te guide, couche-toi en souriant, dors heureuse, dors privilégiée..."
Colette, Rêverie du nouvel an, 16 janvier 1909.
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Littérature mon Amour
"Nous étions sorties pour contempler la neige, la vraie neige et le vrai froid, raretés parisiennes, occasions, presque introuvables, de fin d'année... Dans mon quartier désert, nous avons couru comme trois folles, et les fortifications hospitalières, les fortifs décriées ont vu, de l'avenue des Ternes au boulevard Malesherbes, notre joie haletante de chiens lâchés. Du haut du talus, nous nous sommes penchées sur le fossé que comblait un crépuscule violâtre fouetté de tourbillons blancs ; nous avons contemplé Levallois noir piqué de feux roses, derrière un voile chenillé de mille et mille mouches blanches, vivantes, froides comme des fleurs effeuillées, fondantes sur les lèvres, sur les yeux, retenues un moment aux cils, au duvet des joues... Nous avons gratté de nos dix pattes une neige intacte, friable, qui fuyait sous notre poids avec un crissement caressant de taffetas. Loin de tous les yeux, nous avons galopé, aboyé, happé la neige au vol, goûté sa suavité de sorbet vanillé et poussiéreux..."
Colette, Rêverie de nouvel an, 16 janvier 1909.
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Enfin l'oubli
Je n’ai pas vu ton nom
Sous les soleils fanés
Des jours qui ne sont plus
Seulement le vent et ses sirènes
Poussant vers l’horizon ma toison de pensées
Je n’ai pas vu tomber le soleil et ses rais
Et c’est vrai, vous vous en êtes allés
La nuit éclate comme un grand jour
Il n’y a plus personne que l’air du soir qui souffle
Emporte ma mémoire à jamais
Je n’ai pas vu ton dos
Entendu ton pas
Ta voix
Dire au-revoir pour quoi ?
Je n’ai pas tu la joie
Le grand soupir de soulagement comme le vent soufflant en bourrasque
Je l’ai lâché comme on lâche un oiseau
Il a volé comme vole un oiseau
Il est parti comme partent les bleus
Sur mes pensées qui ne sont plus
Mes souvenirs qui en ont fini de se souvenir
Le ciel était immense
Je n’ai pas vu la différence
Comme si tu n’avais pas été
Image par Daniel Reche de Pixabay
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Poème pour M #621
Tout est de plume
Et de brume de joie
Chaque caresse
Du bout de tes dix doigts
De mon front à mes lèvres
Où se pose un baiser
Tu me bordes de rêves
De sentiers etherés
Et de velours doux effleurés
De plaisir je me fonds dans ton souffle et ta flamme
Mon cœur bat dans ce feu qui embrase mon âme
Je t'aime et je frissonne et tu me fais l'amour
Et l'amour me façonne et façonne nos jours
photo de Tabea Edelstein
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Poème pour M #620
Tu n'es plus qu'un mirage
Un songe évanescent au parfum des espoirs
D'avant
Tu n'es plus qu'un doux rêve
Un récit que je conte
Comme un baume parfois
Pour apaiser mes plaies
A peine un souvenir
Mémoire vacillante
Miroitement d'émois
Passés
Au soleil du présent
Presque effacés
Qui pourrait croire amour combien je t'ai aimé
Image par Catkin de Pixabay
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Médiumnité
Affûtée au tranchant de la vie
Forgée, formée et transformée
Je suis l’œil et la serre aiguisés
Le vol rapide de l'effraie
Ne m'effraie plus
Tremble le voile de l'aveugle
J'ouvre les portes de ma pensée possédée
Dépossédée de ma parole
Je parle comme parlent les ans
Comme un oracle comme folle
La langue leste je devine
Divine voix qui m'assassine
Me fait revivre
Me traverse
Ah ! Tous les flots que je déverse
Tous les lendemains que j'expire et fait paraître
Les jours défilent sur le fil de mes présages
N'ai-je pas d'âge ?
En moi tous les temps se confondent.
Vieille déjà à l'aube tendre
Et jeune encore de mon âme éternelle
Je psalmodie à en battre des ailes
Les alizés que Dieu m'inspirent portent
Tous les destins les horizons latents
Tous les demains que tes espoirs transportent
Image par thank you for 💙 de Pixabay
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Poème pour M #619
Je cherche ton visage et ton rire solaire
M'apaise, c'est le chant des aubes millénaires
Des retrouvailles d'or à l'or d'un ciel nouveau
Parsemé d'au-revoir. Et te revoir, enfin !
Pourvu que les passés, le présent à venir,
Grandissent, enflent, s'envolent dans nos cœurs fidèles
Et que mus par ces ailes, drapés de ces heures,
Heureux nous convolions en des noces nouvelles.
Image par Susann Mielke de Pixabay
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Poème pour M #618
Je te cherche des heures
J'ai ton nom sur les lèvres
Au creux de mes paupières
Ton visage solaire
Chaque fois que je pleure
L'encre de ton sourire
Vient pleuvoir sur mon cœur
Aveugle je délire
Je trace sur ma peau
Tes mots à coup de griffes
Ma mémoire à vau l'eau
Les rejoue comme un riff
Obsessif et je crache
Les formules muettes
Censurées, maladroites
Qui encombrent ma tête
J' exhale les sanglots
J'expire en un soupire
Qui ressemblent à ton dos
Au moment de partir
Je meure le sais-tu
Rejouant le trépas
Ne nos inabsolus
Qui ne s'arrêtent pas
De durer rémanents
Ma pensée carrousel
Tourne inlassablement
Sur nos amours mortels
Image par Engin Akyurt de Pixabay
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Poème pour M #617
Peu importe l'hiver
Le vent qui glace essore
Le cœur sous les paupières
Peu importe ses eaux
Sur les joues qui se glacent
Tant que tes bras me serrent
Peu importe l'hiver
Mon âme est au printemps
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Poésie d'un instant
Cet homme en veste de tweed beige a pris sa course d'une foulée étrange.
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Repos
Et puisqu'à chaque jour
Suffit sa peine, dors
Tu ne sais pas encore
Ce que demain t'amène
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Poème pour M #616
Le soleil, se couchant
Embrase à l'horizon
Le ciel qui enflammé
Va consumer ce jour
Ces heures d'amour dernières
Nous baignent d'une nuit
De velours
Le temps qui passe et court
Ne se rattrape pas
Mais peint de feu les cieux
Pour s'excuser un peu
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Névroses
Si tu savais mon cœur
Ce que me soufflent mes pensées
Quand la nuit vient
Au dehors
Au dedans
Si tu savais les flots déchaînés dans l'obscure et si profonde nuit
Les idées noires d'être baignées de nuit
Noires comme la pluie dans mes yeux lanternes folles
Noires comme les lames de fond qui balaient mes joues de leurs cataractes
De leurs flots tumultueux
Les muscles noués je respire à peine
Je me tends et j'attends
Peur
Angoisse
La nocturne agonie de mon corps qui supplie
Au supplice de mon mental
Acier bourreau
Pas assez pas assez
Je ne dors pas
La nuit me scie l'insomnie me sied
Ricil cernes noir sous mes yeux
Dans mes yeux corbeaux et ciels d'orage
Je ne dors pas je gis.
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Filia mea
Et si le jour chancelle
Je te tiens par la main
Dans tes yeux qui m'appellent
Je pourfends les chagrins
Toi ma fille, ma belle
Aux prunelles d'airain
Et d'onyx ou le ciel
A versé un jardin
Sous l'abri de mes ailes
Je te tiens, tu me tiens
Tu me tends l'éternel
Je te dis ton destin
Viens mon ange, ma frêle
Je suis là, ne crains rien
Contre mon cœur fidèle
Je te fais un écrin.
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Névroses
Reste avec moi quand la nuit vient,
J'ai bien trop peur pour te lâcher la main
Nue sur le fil de mes déséquilibres
L'espoir fragil' se dérobe soudain
Je me dévide et je dérive et je m'abîme
Je tourbillonne entre les abysses et la cime
Reste avec moi je suis sans écorce, sans rien
Reste avec moi je n'ai ni branches ni racines
Ni chemin
Et ma terreur n'a pas de fin
Je perds la raison et avine
Mon âme déjà chancelante
C'est la débâcle longue et lente
Je me dissous dans les embruns
De cet alcool qui m'hallucine
Je deviens flasque de chagrin
Reste avec moi quand la nuit vient
Reste avec moi et me retiens
Et me devine
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L'Homme allongé
L'homme de ciel étoilé
Sur le sol allongé
Les yeux dans les étoiles
Semble rêver
Devient de rêve
Vol en pensée
Pense à l'envol
De l'effraie et se fraie
Un passage secret
Jusqu'à la Lune
Son sourire éthéré
Parle d'éternité
Et d'alanguissement
Sur les ailes du temps
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